Voilà maintenant une semaine que des milliers de jeunes Espagnols ont investi la place de la Puerta del Sol à Madrid et les rues des principales villes du pays. Ils ne se revendiquent d’aucun parti politique ni d’aucun syndicat. Il s’agit d’un mouvement citoyen, spontané et composite, uni pour exprimer une saine et légitime colère : la colère face à un chômage de masse, qui touche aujourd’hui plus de 45% des moins de 25 ans ; leur colère face à une politique d’austérité qui a échoué à endiguer la crise économique et aggravé les injustices sociales.
C’est en effet à une véritable saignée sociale que le gouvernement Zapatero s’est résigné à procéder sous la pression des marchés financiers et de l’Union Européenne : baisse des salaires, gel des pensions, réduction des investissements publics… José Luis Rodriguez Zapatero a qualifié ces mesures d’ »effort national collectif », mais ce sont en réalité les classes les plus modestes qui ont, une nouvelle fois, été sacrifiées sur l’autel de la finance.
Lors des élections municipales de dimanche dernier, le PSOE a payé cette politique au prix fort. Avec 27,98% des voix, il est arrivé près de 10 points derrière les conservateurs du Partido Popular et a perdu Barcelone, où il était au pouvoir depuis 1979, et Séville, la quatrième ville du pays. Une défaite logique et attendue.
Certes, il aurait été difficile pour le gouvernement Zapatero de résister au chantage des agences de notation. Cependant le choix aurait pu être fait d’augmenter les impôts des classes les plus aisées pour aider à financer des politiques sociales, au lieu d’accepter les coupes drastiques dans le budget au nom de la sacro-sainte réduction des déficits.
Mais à bien des égards, le revers électoral subi par le PSOE dimanche est salutaire. Il montre le refus par les citoyens d’un monde où l’essentiel du pouvoir du politique est confisqué par la finance. Lorsqu’une poignée d’agences de notation peut, par la simple menace de dégradation de la note de tel ou tel Etat, dicter à ce dernier les politiques à mener, il n’y a plus de démocratie. C’est donc le système tout entier qu’il nous faut repenser. En tant qu’acteur majeur de ce système, l’Union européenne a un rôle fondamental à jouer mais cela suppose de renverser la majorité de droite actuelle, elle-même chantre du libéralisme à tous crins.
La gauche européenne a besoin de se dépasser, de s’unifier et de porter un projet politique au service des peuples en rupture avec trente ans de construction européenne libérale. De notre capacité à réaliser cet objectif dépend le succès de la gauche dans les années à venir, et à bien des égards le regain démocratique sur le continent.
MJS
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