C'était un joli jardin, foisonnant, vert tendre. Vert sombre. On se serait cru en mai. C'est pourquoi en y entrant, je criai d'un souffle mi-effrayé mi-ravi "mais on est en février !"
Il y avait des feuilles veloutées, il y avait des baies.
Un jardin de grand-mère ou de curé laxiste, empli de bric-à-brac, sillonné d'allées étroites battues à force de passage. Une vieille américaine rutilant sous sa housse repose dans le hangar.
Là, je ferme les yeux pour revoir le tableau.
Le p'tit toutou, un genre fox-terrier crotté, trop gros, plus tout jeune, a réussi à choper un lapin du clapier. Son corps dépasse de la remise, ensanglanté, pantelant.
Sauf que maintenant, je sais que ce n'est pas une remise. C'est un frigo. Très propre, très ordonné.
Des clayettes reposent les unes sur les autres, emplies de chats, de lapins, de poussins, bien rangés, calibrés.
Ils ne sont pas morts, ils dorment engourdis par le froid. Les clayettes reposent directement sur les corps alignés. Ils se réveilleront quand ont les sortira pour les tuer. Le civet sera bien frais.
Dans mon rêve, je repartais alors sur le sentier de terre battue, luxuriant. Je sanglotais.
A la radio, au réveil, Julie Andrieu choisit son poulet rôti âgé d'au moins 80 jours.
Fermier.
Samedi matin.
Je vais au marché.
(crédit image)