J’ai suivi avec une attention sérieuse la prestation de Jean-Luc Mélenchon, dimanche soir, sur la 5 dans l’émission animée par Géraldine Muhlmann, « C politique ». Je sais que mon ami, Reynald Harlaut, membre du Parti de gauche, l’a suivie également puisqu’il porte JLM très haut dans son cœur et dans son esprit.
Ce qui frappe d’abord chez Jean-Luc Mélenchon c’est son intelligence, sa culture politique et historique, sa capacité à répondre aux questions de manière pédagogique sans en éluder aucune. Il sait qu’il parle haut et fort et qu’on l’écoute. Géraldine Muhlmann a rappelé le parcours de son invité, de l’OCI (Trotskyste) au PS (il a été ministre de Lionel Jospin) en finissant par la création du Parti de gauche quelques jours après le congrès de Reims où il crut que Ségolène Royal allait gagner. On comprend mieux ainsi les propositions et le projet politiques actuels de celui qui sera candidat à la présidentielle puisqu’il avoue ne pas comprendre qu’un parti organise des primaires ouvertes (le PS) à d’autres que les membres dudit parti. Sinon à quoi servirait le parti interroge-t-il naïvement ? Cette primaire, il l'ignore.
Ce qu’il souhaite ? Gagner car il n’aime pas perdre. S’il n’est pas le premier à gauche (on peut toujours rêver…) il veut peser sur le programme du candidat PS au second tour (si ce candidat est présent, évidemment) et négocier des propositions «plus» à gauche. Il est demandeur d’un débat public et contradictoire. Citons dans le désordre : contre le traité de Lisbonne, pour la démondialisation, pour la 6e République, pour une nouvelle Europe, pour la réunion d’une assemblée constituante, pour le salaire Maximum, pour une tranche d’impôts sur le revenu à 91 %, et surtout, pour la révolte dans la rue des précaires, des jeunes, des chômeurs, des sans abris…des salariés que les capitalistes continuent d'exploiter. Le fait est qu’il ne cite pas le suffrage universel, en priorité, pour changer le cadre institutionnel. Tous les démocrates doivent s’interroger sur cet oubli ou cette omission volontaire.
L’affaire DSK. J’ai été surpris par la qualité des propos de Jean-Luc Mélenchon. Il ne s’acharne pas sur DSK, n’omet pas d’évoquer la situation de la femme de chambre, victime présumée, situe ce fait divers dans le cadre plus général d’une société machiste et bien sûr invoque la présomption d’innocence tout en prenant le soin de ne pas ignorer la possibilité d’une culpabilité de la part de DSK. Il a cette phrase superbe : « Si les journalistes décident de fouiller dans la vie privée des politiques, il ne faudra pas qu’ils s’étonnent qu’on aille fouiller dans la leur. »
En écoutant le candidat potentiel du Front de gauche (PC, gauche unitaire et Parti de Gauche) plusieurs sentiments m’ont animé. Nous sommes face à homme politique original, sans langue de bois, sincèreet expérimenté. Dans le paysage politique, il détonne. S’il peut convaincre avec son concept de république citoyenne, un écueil se dresse sur son chemin : Jean-Luc Mélenchon est pétri de certitudes. Il supporte mal la contradiction. Qu’elle émane des politiques ou des journalistes qu’il méprise. « Qu’ils s’en aillent tous » écrit-il. En invoquant constamment la grande Révolution (celle de 1789) il joue les Robespierre dont l’Etat vient d’ailleurs de préempter des manuscrits rarissimes. Mais Robespierre, si c’est évidemment la république, c’est aussi les comités de salut public et surtout la terreur ! Je ne dis pas que Jean-Luc Mélenchon est un adepte du totalitarisme. Bien sûr que non. Mais son impérialisme verbal ne me rassure pas. J’ai peur qu’il confonde démocratie citoyenne et démocratie directe. Une démocratie au doigt levé qui ne passe pas par les isoloirs, une démocratie brutale construite autour d’un homme seul, sans la garantie du rôle des assemblées et des corps intermédiaires. La France de 2012 ne peut pas être celle de 1789. Et comme il cite l’exemple de la Tunisie, je ne peux m’empêcher de constater que la convocation de la constituante est repoussée de juillet à octobre 2011 et que les Tunisiens attendent autre chose que des réformes institutionnelles. Ce qu’ils veulent ? Du travail et du pain.