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LA SOLITUDE DES NOMBRES PREMIERS (La Solitudine Dei Numeri Primi) de Saverio Costanzo

Publié le 23 mai 2011 par Celine_diane
LA SOLITUDE DES NOMBRES PREMIERS (La Solitudine Dei Numeri Primi) de Saverio Costanzo
Du premier roman remarqué de Paolo Giordano, Saverio Costanzo (In Memoria di me, Private) tire une œuvre puissante, d’une qualité égale au livre- chose rare en matière d’adaptation. Il fait des destins croisés d’Alice et Mattia, dont les traumas de l’enfance viendront hanter leurs cœurs d’adultes, de véritables films d’horreur, optant pour des choix presque radicaux dans la forme : avec, entre autres, de multiples références au giallo (musique et atmosphère inquiétantes, photographie vieillotte selon l’époque), et une transformation progressive des corps, punition latente qu’ils infligent à la gueule de leurs différences (auto mutilation et anorexie), véritable acte de rébellion face à la cruauté du monde qui les entoure. Le bouquin suivait l’histoire de manière chronologique, Costanzo préfère en bouleverser l’ordre, alternant les allers et retours dans le temps pour mieux appuyer la fragmentation du duo, et, l’isolement social dont ils sont à la fois victimes et acteurs. 1984 pour l’innocence sacrifiée de l’enfance. 1991 pour l’atrocité de l’adolescence. 1998 pour la résignation de jeunes adultes tourmentés. 2007 pour leurs chutes, consenties, mises en scène, inévitables.
Le film est un régal pour les yeux, et les oreilles : les reconstitutions des différentes décennies sont parfaites, le symbolisme n’est jamais lourd, les acteurs y sont incroyables (d’Alba Rohrwacher à Luca Marinelli, en passant par la jeune Arianna Nastro, d’un magnétisme incroyable). Leurs destructions, physiques et psychologiques, le cinéaste les filme de très près, collant aux corps meurtris et aux visages saccagés. Dans la musique notamment, il puise toute la mélancolie (les ballades tranquilles), toute la douleur (les synthétiseurs), toute la violence (la musique techno), retenues, lâchées, puis, retournées contre soi, qui animent et abîment les personnages. Il construit, déconstruit, reconstruit ces êtres sous l’œil d’une caméra tout aussi discrète que voyeuse, captant tout des non dits et des souffrances sourdes. Jusqu’au silence final d’une étreinte qui fige- à jamais- l’incommunicabilité et l’impossible souffle de vie. Intense.
LA SOLITUDE DES NOMBRES PREMIERS (La Solitudine Dei Numeri Primi) de Saverio Costanzo

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