Sihem Souid, policière en exercice, est l’objet de la vindicte de sa hiérarchie parce qu’elle dénonce des faits délictueux répétés qu’elle a constatés dans les services de police. Il faut dire que le reproche est de taille : elle a brisé l’omerta qui règne dans ces milieux, où racisme, sexisme, xénophobie, homophobie sont considérés comme choses normales. Scandalisée de ces propos qu’elle entendait quotidiennement, elle a décidé de dénoncer et de s’adresser à l’opinion publique, puisque les responsables policiers semblaient considérer qu’il s’agissait là d’une forme de coutume dans le métier, puisqu’ils refusaient d’y mettre bon ordre.
Mal lui en a pris ! C’est Sihem Souid qui fut traduite devant la justice pour diffamation. La procédure a fait long feu et elle en est sortie, à l’évidence, grandie dans ses convictions. On pouvait penser que le ministère de l’Intérieur en resterait là, et que tout honte bue, il se contenterait de ce rappel salutaire à la légalité républicaine, qui consiste pour un policier à ne pas laisser un délit impuni. Mais le 24 mai, Sihem Souid est convoquée devant le conseil de discipline. Elle doit y répondre du motif suivant : « manquements à l’obligation de réserve » et, pour cela, elle risque jusqu’à la révocation. La première séance de ce conseil n’a pu se tenir, car la majeure partie des syndicats de police ont refusé de siéger. Mais pour la deuxième convocation, cette possibilité n’est plus ouverte.
Ainsi, n’ayant pu obtenir du juge judiciaire une condamnation, il va s’agir d’une procédure interne, pour laquelle le ministère pense pouvoir garder tous les rênes. Et Sihem est prévenue et clairement menacée : on fera peser sur elle toutes les menaces pour la ramener dans le rang, pour l’écœurer jusqu’à ce qu’elle s’en aille.
La LDH soutient sans réserve Sihem Souid. Elle lui rend hommage pour son courage, sa ténacité et sa volonté de faire respecter les principes. La LDH demande au ministère de l’Intérieur de faire ce qui devrait être sa première tâche : consacrer du temps à parfaire la formation des fonctionnaires qui sont sous ses ordres pour renforcer chez eux la légalité républicaine, plutôt que de le perdre dans une insupportable protection de faits délictueux.
La LDH regrette que l’on laisse se développer un tel climat dans la police. Quand des personnes disposent de la force publique, elles doivent être exemplaires. En prononçant éventuellement la condamnation disciplinaire de Sihem Souid, le ministère de l’Intérieur ne fera que renforcer chez les policiers le sentiment que les droits sont secondaires.