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[Chronique] « Goblin » – Tyler the Creator (Odd Future)

Publié le 23 mai 2011 par Nowplaying

[Chronique] « Goblin » – Tyler the Creator (Odd Future)

Impossible de passer à côté du phénomène OFWGKTA. Leur folie anarchique s’est soudainement emparée du monde comme un virus hautement contagieux. Ou est-ce peut-être la folie d’un seul homme qui s’est emparée de nos esprits, celle de leur gourou, Tyler the Creator. Ce pur produit de la génération 90s (il cumule 20 ans d’existence sur Terre) complètement dingue dans sa tête a doublé tous les freshmen et autres newcomers avec deux morceaux diffusés sur le web (« Yonkers » et « Sandwitches ») et des performances télévisées comme scéniques d’anthologie. Tentative d’explications à l’origine de cette rébellion bordélique avec Goblin, le second album de Tyler, ou devrai-je dire « le disque rap indé qu’il te faut absolument en ce moment pour être dans le coup ». Question de swag.

Tyler the Creator a un but dans sa vie artistique qui paraît dingue : égaler son modèle Kanye West. Sachant cela, on devine que la pochette pop-art toute moche est une façon de se foutre de sa gueule, histoire de dire « moi aussi je sais faire des trucs artys bricolés qui veulent rien dire tellement c’est trop compliqué à comprendre pour un humain normalement constitué ». Le morceau d’ouverture « Goblin » confirme la tendance stylistique augurée par les deux fameux extraits « Yonkers » et « Sandwitches » : une vibe pas si horror-core que ça en a l’air et une voix grave caractéristique. On est face à un indie-hip hop pseudo-satanique, régressif et vulgaire à souhait. Les lyrics affreux de Tyler indiquent des propos contradictoire à travers de non-sens (« I’m not a rapist, or a serial killer, I lied », « I’m not homophobic, faggot! »). Avec cette attitude de jean-foutre, on s’amuse à l’entendre provoquer des mecs comme B.o.B. et Bruno Mars qu’il disse sur « Yonkers ». Et le pire, c’est que ces deux artistes ont répondu à ses taquineries…

A côté de tous ces soft-rappeurs qui squattent l’industrie du disque avec leurs discours policés et productions léchées, Tyler passe pour un putain de fouteur de merde de première. Il paraît plus impulsif qu’il en a l’air dans ses chaussures bateau et sa chemise, avec quelques tendances auto-destructrices, additionné d’une personnalité proche de la schizophrénie (la grosse voix ralentie est celle du personnage Dr TC avec qui il alimente continuellement Goblin de dialogues). Après un avertissement qui ne le rend pas directement responsable de nos actes susceptible d’être influencés par ses propos anti-tout, l’énervé « Radicals » gueule une série de fuck… « fuck school », « fuck cops », « fuck your traditions », « fuck your positions », « fuck your religions », « fuck your decisions »… Content de voir que des jeunes personnes sont capables aujourd’hui de se lever et choquer une Amérique toujours blanche et toujours puritaine avec des propos outranciers, sans concession ni états d’âme. « Sandwitches » (avec Hodgy Beats)  possède également cette énergie incitatrice à l’anarchie avec ces phrases dérangeantes (« God is a cancer ») avant de lâcher un « fuck 2dopeboys » (le site internet). Où est la mention ‘Explicit Contents’ d’ailleurs ? Dans ton c…

Pratiquement tout les sons (à l’exception d’un seul produit par Left Brain) sortent des machines du créateur Tyler. Sa bipolarité s’exprime dans ses productions, très redondantes (« Yonkers », « Radicals », « Tron Cat » et « Golden » sont différentes variantes d’un même beat préconçu). Quand il ne conçoit pas ces beats maléfiques aux mélodies synthétiques tout droit sortis de sa cave, à l’opposé, il se penche sur des influences new-wave laid-back (« Nightmare », l’instrumental « Au79 », « Analog »), limite r&b (« She » feat Frank Ocean prévu pour être le prochain single). Par quelques aspects très minimalistes, on pourrait confondre son niveau avec de l’amateurisme à cause de ses instrus semblant sortir de claviers Bontempi (« Her », « Boppin Bitch ») et ces notes de claviers simplistes. Et puis, même si c’est réellement le cas, là aussi, fuck la technologie. Tant pis si c’est inécoutable (« Bitch Suck Dick »). En tout cas, Goblin alterne principalement entre ces deux uniques styles de productions.

Se moquant totalement des formats, Tyler the Creator dépasse allégrement la norme de temps de parole avec des lyrics qui n’en finissent pas. Plusieurs tracks durent plus de 6, 7 voire 8 minutes (« Window » avec d’autres membres d’Odd Future tels que Domo Genesis, Jasper Dolphin, Hodgy Beats et Mike G). Très dense, long à digérer et répétitif, Goblin est encore immature à défaut d’être impétueux, révoltant et parfaitement suicidaire. Autre point faible : Tyler cause beaucoup de viols de salopes au premier degré, ou au second degré (le glauque et pas moins délirant « Transylvania »), n’empêche il est malin, très très malin ce Tyler, c’est ce trait diabolique qui l’habite. Je ne serai pas étonné si quelques adeptes voient dans Goblin un classique du genre. Ferez-vous partie de la secte rap d’Odd Future ?

La note : 7/10



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