Top14 : Changement d’ère !

Chronique du lundi 23 mai 2011.

Le rugby français en rêvait et Lyon et maintenant Bordeaux l’ont fait. Avec l’arrivée de 2 des plus grandes villes de France, le Top14 rentre dans une nouvelle ère, celle où le rugby des villages va être définitivement remplacé par celui des villes. Explications…

La garantie de clubs plus sains économiquement :

L’argent a un certain pouvoir, c’est vrai. Avec l’augmentation, ces dernières années des budgets, il est logique que le paysage rugbystique français change. Il n’est plus possible de maintenir en Top14 des clubs qui se trouvent dans un environnement économique faible. Que ce soit Béziers dans le passé, Narbonne ou Bourgoin actuellement, la loi du budget s’impose de plus en plus, c’est logique et même inéluctable. Et le rugby français ne doit pas aller à l’encontre d’une évolution logique qui doit lui permettre d’assurer la pérennité économique de son entreprise. Seuls des clubs qui sont entourés par un tissu économique suffisamment porteur peuvent espérer survivre sur la durée. Ce qui ne veut pas dire, pour autant, que seules les 14 premières villes de France ont leur place en Top14. Il y a de la place pour des villes de taille moyenne aussi, mais le temps où il y avait majoritairement des villes de taille moyenne situées à moins de 150 km de Toulouse est révolu et c’est tant mieux !

Que ce soit Castres ( merci aux Laboratoires Pierre Fabre ), Biarritz ( merci aux 2 Serge pour Cap Gemini ), Bayonne ( merci au peuple Basque et maintenant à Afflelou ), Perpignan ( merci à la Catalanité ) et Brive ( merci à ??? ), ces villes ont leur place en Top14. Toutes ? Peut-être pas. Car après Lyon et Bordeaux, c’est Grenoble ( 16ème ville française avec plus de 150 000 habitants ) puis ensuite Limoges ( 25ème ville avec 140 000 habitants ), St Etienne ( 14ème ) ou Nice ( 5ème ) sans parler des Nantes, Lille ou une 3ème équipe de la région Parisienne qui peuvent pointer le nez et leurs ambitions. Et la culture de ce sport dans tout ça ? Bien sûr que l’économique ne fera pas tout. Le rugby français est une famille avec ses prés carrés, ses habitudes et ses places fortes. Difficile d’imaginer, donc, que cela va disparaître sous l’unique joug de l’argent. Néanmoins, les présidents de certains clubs ont intérêt à être vigilant et à ne pas se tromper de stratégie.

Prenons l’exemple de Perpignan qui vient de rater sa saison, entre autre à cause de choix budgétaires qui ont empêché l’équipe d’avoir un ouvreur de dimension internationale cette saison. L’ancien président, Marcel Dagrenat, avait trouvé la bonne stratégie, la Catalanité, qui a permis de resserrer les moyens et les énergies au service du club. Cette stratégie fonctionnait lorsque les budgets des clubs étaient en-dessous de 10 millions d’euros. Est-ce qu’elle peut encore marcher maintenant qu’il faut plus de 20 millions par saison ? C’est possible, à la condition que le club réussisse son ouverture vers l’Espagne et aille chercher les partenaires de l’autre côté des Pyrénées, le premier étant le FC Barcelona, fort vecteur d’intégration, comme cela est apparu lors du quart de finale jouée dans la capitale de Catalunya.

Sans argent, point de salut. C’est une évidence. Il peut y avoir un modèle Auxerre dans le rugby français mais le Top14 ne peut plus être le championnat des bourgades du Sud-Ouest. L’arrivée de Lyon et de Bordeaux en est le signe évident, il ne faut pas se le cacher…

Lyon et Bordeaux vont-ils se maintenir en Top14 ?

La 1ère saison en Top14 de ces 2 équipes sera difficile, c’est certain. Ces équipes n’ont aucune expérience à ce niveau et elles vont souffrir. La ProD2 a été, cette saison, relativement pauvre en termes de jeu, privilégiant un certain défi physique, mais à un niveau très éloigné de celui du niveau supérieur. Elles n’ont donc pas le choix, elles doivent se renforcer pour espérer, non seulement remporter des victoires, mais surtout tenir pendant toute la saison. Côté Lyon, le travail a été relativement anticipé avec un budget qui devrait atteindre 12 millions d’euros et des contacts avec des joueurs expérimentés. Côté Bordeaux, il est évident que l’anticipation est moindre. Cette problématique ne devrait vraiment être traitée qu’à partir de cette semaine. Pourtant, l’avenir est plutôt rose pour ces 2 clubs car, encore une fois, elles représentent un potentiel économique qui n’est pas négligeable.

De possibles partenaires seront immédiatement intéressés par la visibilité qu’offrent Lyon et Bordeaux, non seulement régionalement, mais aussi nationalement. Un directeur de la communication d’une entreprise nationale qui investit sur une équipe de Bordeaux ou de Lyon est cohérent. Il aurait, par contre, une plus grande difficulté à justifier sa démarche s’il s’agissait de Bourgoin ou d’Albi, par exemple. Ainsi, ces 2 équipes ne devraient pas être en difficulté financièrement même si l’incertitude économique de notre pays reste fragile. Il ne faut pas oublier non plus, que, quelques soient les résultats, elles pourront évoluer plusieurs fois dans des stades de plus de 35 000 personnes, ce qui est toujours une bouffée d’oxygène au niveau économique. Leur problème se situera bien, uniquement, sur le terrain.

La chance des 2 promus, c’est d’arriver en Top14 une année de Coupe du Monde. Avec des matchs joués pendant l’épreuve internationale, certains clubs vont se trouver affaibli, sans leurs meilleurs joueurs, et les occasions seront belles pour ces 2 équipes de prendre, en début de compétition, des points essentiels pour leur maintien. Après, il faudra souffler pendant les parenthèses Européennes et essayer de gagner le maximum de matchs à domicile. En tout cas, ce qui est sûr, et c’est une bonne nouvelle, c’est que il ne suffira pas, la saison prochaine, de regarder le classement des budgets pour être sûr de connaître les 2 clubs qui ont le plus de chance d’être relégables.

Même si l’une ou les 2 formations connaissaient l’échec en cette 1ère accession en Top14, elles ne disparaîtraient pas du paysage pour autant. Avec cette première accession, la graine est maintenant plantée. Même en redescendant en ProD2, ces équipes conserveraient des budgets conséquents et des joueurs expérimentés pour remonter rapidement et pérenniser l’histoire nouvelle du rugby Français…

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