Pourquoi dit-on parfois, à l'ancienne (Oh l'ancienne, tu les a couchés, les moutards?), d'une bande de gens ou d'un troupeau d'enfants que ceux-ci s'entendent "Comme larrons en foire" ?
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audio mp3 1'42 minute
Une production de l'Atelier de Création Grand-Est de Radio France. Texte, voix, réal.: Serge Fournel. Coach: Max Chari.
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C’est étonnant, mais c’est comme ça, depuis toujours : lui, il est très moche, bête, inintéressant, vaniteux, tout le contraire de moi. Et pourtant, chaque fois qu’on se voit, c’est dingue, on s’entend comme larrons en foire !
Mais qu’est-ce que quoi ? Vous en connaissez, vous, des larrons ? Les ronds en foire, oui, ça j’ vois ce que c’est. Comme des queues de pelles, des barriques, des boudins. C’est vrai que les pochtrons s’entendent souvent très bien entre eux. Ou bien y’eut-il jadis une chanson populaire guillerette et enlevée, un rigodon festif, qui faisait comme ça : « Lalaron,la laron Lalaron, la lalaron» !? Ouais, ça envoie pas mal, mais c’est pas ça. Ou faut-il entendre lardons en foire ? Eh, c’est vrai, les lardons qui rissolent rigolent ! Tout le monde sait ça. D’où, copains comme cochons ! Ou bien, c’est un verbe qui a disparu vers le moyen-âge.
Mais oui, c’est ça ! le verbe hilarer. Je hilare, tu hilares, il hilare, nous hilarons ! En foire. Et pis c’est tout...
Eh bien non, cessez d’hilarer, Clinton, Ouaf ! et suivez-moi !
Notre larron est très ancien, puisque les quatre évangiles sont unanimes pour affirmer que Jésus fut crucifié entre deux larrons. L’un des deux se repentit de ses crimes avant de mourir. Quels crimes ? Le larron est depuis toujours quelqu’un qui commet des larcins, un brigand, un pillard. En espagnol, el ladron est encore aujourd’hui le voleur. On « s’entend comme larrons » dès le XVIème siècle, en vue de préparer, évidemment, un mauvais coup. Et la foire, où nos larrons se rendront bientôt est évidemment le lieu idéal où l’on peut détrousser aussi bien les marchands que les clients, à la bourse bien pleine, ou s’emparer furtivement de marchandises sur les étals. « On s’entend comme larrons en foire » dès le XVIIème. Celui qu’on appelle le « troisième larron » apparaît dans une fable de La Fontaine. Il profite d’un litige entre les deux autres pour en tirer avantage, dans « Les voleurs et l’âne ». Nous avons même eu des larronnesses, chez Victor Hugo, et des larronneaux, petits larrons commettant de petits vols !
Or donc...ce sont au départ des filous. Aujourd’hui, ce sont deux personnes, ou une bande de gosses, qui s’entendent comme larrons en foire, c’est-à-dire à merveille, et qui piquent, au pire, des fous rires !
Voila ! En un mot comme en cent, c’est ça !