The Antlers - Burst Apart (2011)

Publié le 22 mai 2011 par Oreilles
À l’heure où la scène rock de Brooklyn n’en finit pas d’être le vivier d’innombrables groupes indés dont la célébrité n’est plus à faire, il est toujours bienvenu de se pencher sur un disque n’ayant pas encore fait trop d’émules. C’est le cas pour The Antlers dont le succès reste modéré bien qu’ils soient les auteurs d’une musique inspirée, aussi mélancolique que celle de The National, fer-de-lance de cette scène du sud-est de New York. Il est évident que le trio n’a pas encore le succès commercial de MGMT, Vampire Weekend et autres consorts, de même qu’il n’a pas la force mélodique flagrante qui lui permettrait d’être un groupe « branché ». Mais le projet solo de Peter Silberman, devenu trio après deux albums, continue de faire son bonhomme de chemin, lentement et tout en modestie sans céder à la tentation commerciale. En 2009, Hospice, son premier album de groupe, avait connu un succès unanime - grâce, il faut le dire, au label Frenchkiss (The Dodos, Local Natives) - lui permettant de figurer dans tous les classements de l’année 2009 et de s’assurer un futur prometteur.
Après cette catharsis qu’était Hospice, sorte de concept-album sur les affres du cancer, Burst Apart ne pouvait que redresser la barre. Toutefois, si ce nouvel opus est largement moins déprimant que son prédécesseur, le trio exploite la même veine, toujours dans ce registre mélancolique et torturé. Chaque morceau instaure un climat d’étrangeté souvent émouvant, et ceci, sans excès d’instrumentation ou de fioritures. Un peu comme les ambiances sinueuses du Radiohead période Kid A et Amnesiac. Ainsi, c’est souvent en mid-tempo, que les compositions s’étirent dans un format chanson. Les nappes de synthés et quelques petites touches d’électronica finement dosées font osciller leur musique entre ambient dronatique et dream pop. Les accords saccadés de "I don’t want love" et les flûtes synthétiques de "French exit" prennent le temps d’introduire l’auditeur dans un univers fantasmagorique.

La voix de Peter Silberman flotte langoureusement sur une instrumentation tout en finesse et retenue. C’est surtout sa voix de tête qui devient une récurrence dès le radioheadien "Parentheses", aussi haut perchée que celle d’Hayden Thorpe (Wild Beasts) ou Jónsi. "Tiptoe", quant à lui, rappelle la pop baroque de Patrick Watson. Il est clair que ce falsetto en déplaira à plus d’un même s'il reste bien dosé sur l’ensemble du disque, souvent traité comme une nappe. Et si l’on adhère à l’organe vocal sur-développé de Silberman, alors on appréciera ses hauteurs vertigineuses sur "Rolled together" et "Corsicana", tous deux délicats et émouvants. On appréciera également le captivant "Hounds" avec ses effusions de cymbales et ses arpèges de guitares éthérés.
Jusqu’ici on pourrait croire que c’est un disque mou du genou et chiant. Eh bien non ! Car, c’est à mi-parcours que The Antlers lancent un titre à l’efficacité pop indéniable : "Every night my teeth are falling out". Le gimmick de guitare et les petites notes de banjos déchargent un groove entraînant qui connaît son apothéose avec le chant plaintif de Silberman. Et c’est vraiment à partir de ce morceau que le reste du disque devient grandiose jusqu’au final "Putting the dog to sleep" dont les claquements de guitare funky nous rappellent combien ce disque est vraiment une réussite de bout en bout.
En bref : avec ce second album de groupe, The Antlers continuent de développer, en marge, une pop aérienne et délicate. Un disque qui pourrait bien avoir sa place dans les classements de fin d’année.

Le Myspace, le site officiel et le site du label Frenchkiss
"Rolled together" :

"Every night my teeth are falling out" :