« Sept fois détruite et sept fois reconstruite, Beyrouth se réveille chaque matin comme si elle venait de naître. Une résistance sourde, organique, semble s’opposer à toute tentative d’ordonnancement. Ville insouciante, échevelée, avec ses nuits blanches, ses couleurs criardes, sa boulimie. Ville irresponsable, où se croisent sans se voir les rescapés des utopies d’hier, les nostalgiques de l’islam, les nouveaux riches et les miliciens devenus hommes d’affaires. Au milieu d’un décor délavé, on s’y égare à la recherche de mythes dont on ne retrouve plus les signes : représentations lyriques d’un éden d’avant-guerre ou images macabres de la violence déchaînée.
Tout semble avoir été dit sur Beyrouth. Alors, c’est la tête vide et le cœur grand ouvert qu’il faut aller à sa rencontre. Et soudain, dans cette ville qui ne ressemble plus à rien à force de s’être brûlée à l’imaginaire des autres, se révèle un des défis de cette fin de siècle : inventer, avant qu’il ne soit trop tard, des espaces ouverts à la pluralité des appartenances, où l’expression des différences ne remette pas, à chaque fois par terre, les bases de la convivialité. »
Jade Tabet
« Beyrouth, la brûlure des rêves », Edition Autrement, 2001 Dirigé par Jade Tabet. Contributions de Adonis, Omar Boustani, Jacques Liger-Belair, Amin Maalouf, Samir Kassir, Elias Khoury…