Coordonner et non subordonner. Eveiller et non commander. Il y a là une forme de rapports humains dont le modèle est encore à inventer. Cela aussi est l'affaire de tous. Car jusqu'ici l'organisation a toujours été confondue avec la délégation de pouvoir et le despotisme du petit nombre.
Ce ne sera pas facile d'aller à contre-courant d'une conception de la politique vieille de tant de siècles.
Les railleries ne manqueront pas.
L'on nous accusera de substituer à la science le prophétisme et l'utopie. Ce sera bon signe si nous mettons en colère les "réalistes" et les positivistes de toutes nuances; le signe que nous ne cédons pas aux entraînements d'aujour'hui et d'hier, que nous maintiendrons fermement que le possible fait partie du réel, et que toute science dite "humaine" et toute politique qui refuse de tenir compte de cette dimension majeure de la réalité sociale n'est pas science mais scientisme mort, n'est pas politique mais empirisme aveugle.
L'on nous accusera de substituer à la sacro-sainte "organisation" un messianisme et une chevalerie de Don Quichotte. Ce sera bon signe de mettre en colère les hommes d'appareil et les manipulateurs de tous bords: le signe que nous ne céderons pas à la mode d'un certain "manageering" économique ou politique pour lequel l'homme n'est qu'une "marionnette mise en scène par les structures" et que nous maintiendrons fermement que si l'homme ne sauvegarde pas sa "distanciation" à l'égard de toute institution, s'il abdique son droit à l'initiative historique, l'organisation cesse de servir l'homme pour l'asservir.
L'on nous accusera de substituer à la politique une mythologie anarcho-syndicaliste. Ce sera bon signe si nous mettons en colère tous ceux pour qui la politique est devenue le métier de parler au nom des autres en se substituant à eux: le signe que nous ne céderons pas aux facilités de la délégation de pouvoirs et que nous entendons changer le concept même de politique en en faisant la science et l'art de créer les conditions dans lesquelles chacun pourra participer à la détermination des fins de la société et à l'autogestion de toutes les activités sociales.
Roger Garaudy, L'alternative, Robert Laffont éditeur, pages 248-249
L'article intégral:
http://rogergaraudy.blogspot.com/2011/05/lalternative.html