Une question jugée urgente et prioritaire, puisque tel est le bon plaisir présidentiel et qu’il faut en conséquence nous voter une loi à son propos, et plus vite que ça, je vous prie , devrait sous peu être évoquée au Parlement, un projet de loi en ce sens ayant été enregistré au Sénat au mois d’avril dernier, débattu et adopté il y a quelques jours seulement : je veux bien entendu évoquer la nécessité proclamée de faire siéger aux côtés des juges correctionnels et de l’application des peines des assesseurs issus de la société civile, aux motifs affichés que les décisions judiciaires en tireraient davantage de légitimité, et qu’une telle pratique rapprocherait les citoyens de leur justice.
En soi, l’idée ne me paraît pas particulièrement choquante. Coûteuse, assez irréaliste, c’est certain, mais choquante, non. Après tout, la participation des citoyens à la justice est déjà effective dans de nombreux domaines : les Assises, bien sûr, mais aussi les tribunaux pour enfants, les conseils de prud’hommes, les chambres de l’application des peines des Cours d’appel, les tribunaux des affaires de sécurité sociale, les tribunaux paritaires des baux ruraux(1) sans oublier la création, en 2003, des juges de proximité. La collaboration avec les magistrats professionnels au sein des juridictions concernées s’effectue de façon efficace et sereine, selon l’expérience que j’en ai eue, du moins. Les juges ne méprisent pas les jurés-assesseurs-échevins-proxijuges, ceux-ci se montrent intéressés et motivés par leurs fonctions juridictionnelles, et lorsque ça se passe mal, c’est davantage, pour ce que j’en ai vu, une question de personnes que de statut.
Je suis tout de même étonnée du présupposé, inscrit dans la présentation du projet de loi, selon lequel les juridictions comprenant des citoyens assesseurs rendraient des décisions nécessairement plus sévères que les vilains juges laxistes qui n’en feraient qu’à leur tête, et dont la principale activité serait de déterminer chaque jour quel dangereux criminel ils vont libérer/ne pas condamner, histoire de lui permettre de reprendre au plus vite ses sinistres occupations. A moins que je n’aie mal interprété la phrase précisant que ce projet de participation citoyenne à l’oeuvre de justice “assure que les décisions juridictionnelles ne sont pas déconnectées des évolutions de la société”.
Cela revient, à mon très humble avis, à tabler sur une frénésie de sang d’emprisonnement dont je n’ai jamais eu à constater qu’elle habite les jurés, assesseurs des tribunaux pour enfants ou juges de proximité siégeant en qualité d’assesseurs correctionnels. Si je puis me permettre une suggestion(2) au pouvoir exécutivo-législatif qui souhaiterait accentuer la sévérité des décisions judiciaires pénales : instaurez donc à titre permanent des compositions mixtes magistrats-avocats, ainsi qu’il est prévu en cas de difficultés pour constituer normalement les juridictions correctionnelles collégiales(3) . Effet quasiment garanti.
Je ne suis pas non plus convaincue du gain de légitimité qu’y trouveraient nos décisions, les citoyens assesseurs n’étant destinés à connaître que d’une partie limitée du contentieux, et du contentieux pénal exclusivement. Je bute un peu sur le fait que seule une part du contentieux actuellement attribué aux juridictions correctionnelles collégiales doive d’urgence bénéficier d’un petit supplément de légitimité citoyenne, et non le reste, soit l’ensemble du contentieux dévolu aux juges correctionnels uniques (pourtant réputés “iniques”) et le surplus de celui dont connaissent les juridictions collégiales, soit la plus grande part des infractions à caractère technico-économique, des atteintes aux biens, les infractions à la législation sur les stupéfiants, etc. Ainsi finalement, tant qu’on y est, que l’ensemble du contentieux civil, puisque après tout, les décisions qui en relèvent sont elles aussi rendues au nom du peuple français. Mais il faut croire que ça n’intéresse personne de venir m’aider à trancher mes petits conflits de voisinage, mes affaires de crédits à la consommation ou mes problèmes de bornage. La vie est injuste.
Or doncques, chers lecteurs électeurs, préparez-vous à composer bientôt avec nous le tribunal correctionnel citoyen, comprenant trois juges et deux citoyens assesseurs.
Précisons d’emblée que ces derniers ne sont qu’improprement surnommés “jurés populaires correctionnels”. Ils sont à peu près aux jurés d’assises ce que le Dom Pérignon est au Canada Dry(4).
En effet, contrairement aux jurés, ces citoyens assesseurs ne seront en aucun cas majoritaires dans les tribunaux correctionnels(5) : le projet de loi prévoit la présence de deux citoyens assesseurs aux côtés de trois magistrats professionnels. Leur avis, même contraire, ne pourra jamais l’emporter sur celui des juges. L’équilibre des votes entre professionnels et citoyens dans les deux juridictions est diamétralement opposé. L’ambition d’une sévérité accrue des décisions pénales du fait de la présence de ces citoyens assesseurs apparaît ainsi compromise, pour ne pas dire illusoire.
Ils ne voteront pas à bulletins secrets, ce qui, qu’on le veuille ou non, portera atteinte à la spontanéité de leur vote, les citoyens assesseurs se trouvant tenus d’expliquer et de motiver leur choix. Et vous savez quoi ? Il n’est parfois pas évident d’expliquer à deux collègues chevronnés, lorsqu’on est un juge débutant, qu’à notre sens ils font fausse route, et de tenter de les convaincre qu’on a une meilleure décision à leur proposer. Je peux imaginer les difficultés qu’éprouveront les citoyens assesseurs placés dans cette position, qui sera d’autant plus difficile que leur participation à l’oeuvre judiciaire ne sera que ponctuelle.
Les citoyens assesseurs ne seront pas récusables selon les mêmes modalités que les jurés d’assises (c’est-à-dire par le Parquet ou la défense, de façon immédiate et non motivée), mais seulement pour l’une des causes de récusation applicables aux magistrats (prévues par le Code de l’organisation judiciaire, et qui supposent une cause de partialité chez le magistrat concerné). D’un point de vue pratique, je suppose d’ailleurs que la plupart de ces causes n’apparaîtront pas avant l’audience de jugement (lorsque le prévenu ou la partie civile s’apercevra que l’un ou l’autre est le meilleur ami/l’ennemi juré de l’un des citoyens assesseurs qui viennent de s’asseoir aux côtés des juges, par exemple).
Enfin, contrairement aux jurés d’assises, qui sont compétents pour juger l’ensemble des crimes(6) ainsi que des délits connexes, les citoyens assesseurs ne seront pas amenés à connaître de l’intégralité du contentieux correctionnel, mais seulement de celui qui leur sera attribué : d’après le projet de loi initial, leur présence devait être nécessaire au jugement “des délits qui portent quotidiennement atteinte à la sécurité et à la tranquillité de nos concitoyens”, soit les homicides involontaires causés par des conducteurs et des propriétaires de chien (ce qui excluait le contentieux, très technique, des homicides involontaires survenus dans le cadre d’infractions à la législation sur le travail ou à la suite d’erreurs médicales), les violences ayant entraîné une infirmité ou une mutilation permanente, les violences commises sur des mineurs de moins de quinze ans par un ascendant, sur une personne particulièrement vulnérable ou sur un fonctionnaire appartenant à l’une des catégories visées (policiers, gendarmes, pompiers, administration pénitentiaire …), les menaces de mort ou d’atteinte aux biens dangereuse pour les personnes, les menaces sous conditions, les agressions et atteintes sexuelles, l’enregistrement et la diffusion d’images de violence, les vols avec violence et certains vols aggravés, les extorsions, les dégradations volontaires dangereuses pour les personnes et les embuscades. Les sénateurs ont modifié cette liste en y ajoutant les atteintes à la personne humaine passibles d’une peine d’emprisonnement d’une durée égale ou supérieure à cinq ans prévues par le titre II du livre II du code pénal, les vols avec violence prévus par le dernier alinéa de l’article 311-4, le 1° et le dernier alinéa de l’article 311-5 et l’article 311-6 du code pénal(7) , ainsi que les extorsions prévues et réprimées par les articles 312-1 et 312-2 du même code, les destructions, dégradations et détériorations dangereuses pour les personnes passibles d’une peine d’emprisonnement d’une durée égale ou supérieure à cinq ans prévues par la section 2 du chapitre II du titre II du livre III du code pénal, l’usurpation d’identité ayant pu déterminer des poursuites pénales à l’encontre de la personne qui en est victime, et les infractions prévues par le code de l’environnement passibles d’une peine d’emprisonnement d’une durée égale ou supérieure à cinq ans.
Ont également été attribués à la future juridiction mixte une foule d’autres délits(8) et contraventions dès lors qu’ils seront connexes avec les précédents. Sa compétence sera en revanche exclue en matière de délinquance organisée, et de délits relevant du tribunal correctionnel siégeant à juge unique.
Les tribunaux correctionnels citoyens sont ainsi destinés à connaître de contentieux pouvant comporter des aspects techniques parfois ardus, notamment en matière d’homicides involontaires. Notamment aussi, bien sûr, concernant ces fameuses infractions lourdement réprimées par le code de l’environnement, mais j’avoue ne pas pouvoir vous en donner d’exemple(9) : je viens de parcourir rapidement ledit code, histoire de trouver une infraction réprimée d’une peine d’emprisonnement égale ou supérieure à cinq ans, mais n’ai réussi qu’à constater que le maximum encouru par la plupart des infractions qu’il prévoit est, au pire, de deux ans. Tenez, pour vous prouver que je l’ai vraiment feuilleté, je sais désormais que le fait de répandre des OGM partout est passible d’un an d’emprisonnement. J’ignore donc quelles infractions les sénateurs avaient en ligne de mire(10) , mais j’ai le sentiment que les fameux délits environnementaux punis de cinq ans d’emprisonnement ne doivent pas se trouver sous le pas d’un cheval.
Une telle extension de compétence aura évidemment un coût qui viendra s’additionner à celui que la Chancellerie avait initialement envisagé, et qui n’était d’ores et déjà pas négligeable. L’étude d’impact concernant le projet de loi initial prévoyait ainsi que la mise en oeuvre de cette réforme entraînerait, à partir de 2014, des dépenses d’investissement concernant l’immobilier (30 millions d’euros) et la création de postes de travail (2,7 millions d’euros – 97 postes de magistrats, 26 postes de greffiers). S’y ajouteraient des coûts de fonctionnement, comprenant les indemnités versées aux citoyens assesseurs (7,4 millions d’euros) et des dépenses d’entretien (1 million d’euros).
Je ne suis pas du tout calée en termes de budget, de prévisions financières, d’ETPT(11) et de ressources humaines, mais j’ai au moins l’occasion de pratiquer un peu, depuis quelques années, l’activité judiciaire pénale dans mon tribunal. Et si cette réforme aboutit en l’état, il me semble, à vue de nez, qu’elle va nous coûter ce dont précisément aucune juridiction ne dispose jamais en suffisance : du temps.
Essayer de se représenter ce que serait l’application pratique de cette réforme en l’état du projet revient en effet à peu près à imaginer le résultat que j’obtiendrais en m’attaquant à un concours de programmation informatique(12) ou aux plats que sortirait Maître Mô en se présentant à Top Chef. Autrement dit, une avalanche de bugs à chaque étape, prévisible par quiconque a mis un pied en juridiction au cours des dernières années(13) .
- La formation :
Les citoyens assesseurs, tirés au sort sur une liste annuelle élaborée à partir des listes électorales, comme les jurés d’assises, se verront attribuer un service juridictionnel dont la durée ne pourra pas être supérieure à huit jours par an.
Il est évident, tout d’abord, qu’avant cette période de “jury duty”(14) , ces assesseurs devront être formés, ne serait-ce qu’un minimum, à leurs futures fonctions. L’identité de leurs formateurs n’a à ma connaissance pas encore été déterminée : président de l’audience correctionnelle ? Directeur de centre de stage(15) ? Anciens jurés ? Magistrats honoraires ?
Opter pour l’attribution de cette tâche à des magistrats en activité impliquera de leur dégager du temps à cette fin. Leur préférer des non-professionnels ou des retraités supposera de prévoir un budget spécifique pour assurer l’indemnisation de ce temps qu’ils consacreront à la formation des citoyens assesseurs.
Ce temps sera, au passage, conséquent : à titre de comparaison, les jurés d’assises disposent d’une journée de formation, la première de chaque session, au cours de laquelle toutes les notions utiles leur sont expliquées par le président de la cour d’assises, un membre du parquet et un avocat.
Formera-t-on les citoyens assesseurs de l’année au début de leur année de service judiciaire (ce qui poserait des problèmes pratiques dans les grosses juridictions, une formation dispensée simultanément aux centaines de citoyens qui leur seraient nécessaires pour fonctionner étant nécessairement peu efficace) ? Au début de chaque semaine (ce qui mobiliserait des effectifs considérables) ? Peu après que l’idée initiale eut été émise par le président de la République, M. Mercier, garde des Sceaux, avait au cours d’une interview évoqué une formation hebdomadaire, se déroulant “chaque lundi” dans tous les tribunaux français, et devant permettre aux citoyens assesseurs d’accomplir leur devoir du mardi au vendredi. Cette hypothèse, d’une précision d’horloge suisse, n’a depuis plus été mentionnée par quiconque – peut-être parce que quelqu’un a fini par réaliser que les tribunaux correctionnels siégeait aussi le lundi, et pour certains le samedi …
- Avant l’audience :
Le Parquet sera en première ligne pour affronter les problèmes de composition d’audience qui se poseront, puisqu’il aura, dès sa permanence téléphonique et armé de la liste des infractions relevant de la juridiction mixte, à affecter chaque dossier qu’il souhaite poursuivre à la formation compétente, tribunal correctionnel citoyen ou tribunal correctionnel collégial tout court. Bonne chance au passage à mes collègues désireux de poursuivre efficacement les infractions lourdement réprimées par le code de l’environnement ..
Les citoyens assesseurs devront être avisés quinze jours à l’avance des audiences auxquelles leur présence sera requise. Faudra-t-il leur communiquer la liste des prévenus (ce qui ne peut en tout état de cause se concevoir en cas de comparution immédiate) afin qu’ils puissent se déporter et être remplacés en temps utile, le cas échéant ? Faudra-t-il prévoir de convoquer un ou plusieurs citoyens assesseurs supplémentaires à chaque audience en cas de défaillance, de récusation voire d’affaire difficile(16) ?
Les sénateurs ont par ailleurs clarifié la situation des audiences jusqu’alors composées de deux juges et d’un juge de proximité : les juges de proximité seront exclus des tribunaux correctionnels citoyens, afin de ne pas permettre de supériorité numérique citoyenne sur les professionnels(17)
Par ailleurs, par un effet purement mécanique, qui dit création d’audiences dit mobilisation supplémentaire de magistrats professionnels. Si cette mobilisation risque de gripper certains rouages des juridictions les plus importantes, il est évident qu’elle causera des problèmes conséquents d’organisation des services dans les tribunaux de taille plus réduite. Non, parce que le service civil, par exemple, n’est peut-être pas assez sensible pour justifier l’octroi présidentiel de citoyens assesseurs légitimateurs, mais il faut néanmoins qu’il soit assuré, si possible dans des délais raisonnables, par des juges dont l’activité pénale grignotera de plus en plus de temps de travail.
- Allongement des délais d’audiencement et du temps d’audience devant les tribunaux correctionnels citoyens
Cet allongement est aussi prévisible qu’il sera conséquent. Le nombre de dossiers par audience du TCC devra être sensiblement réduit, et pas seulement parce que les TCC examineraient plus scrupuleusement chaque affaire que les juges professionnels qui les expédient en deux à quatre minutes chrono.(18)
En effet, le projet de réforme prévoit de procéder à diverses adaptations procédurales devant rapprocher les audiences du TCC des audiences d’Assises, afin de permettre aux citoyens assesseurs “de participer de façon éclairée au jugement des affaires”. Ainsi, chaque audience citoyenne débuterait-elle par la lecture du serment des citoyens assesseurs (“Vous jurez et promettez d’examiner avec l’attention la plus scrupuleuse les charges qui seront portées contre le prévenu, de ne trahir ni ses intérêts, ni ceux de la société qui l’accuse, ni ceux des victimes ; de ne communiquer avec personne jusqu’après votre déclaration ; de n’écouter ni la haine ou la méchanceté, ni la crainte ou l’affection ; de vous rappeler que le prévenu est présumé innocent ; de vous décider d’après les charges et les moyens de défense, suivant votre conscience, avec l’impartialité et la fermeté qui conviennent à un homme probe et libre et de conserver le secret des délibérations, même après la cessation de vos fonctions” – soit le petit frère du serment des jurés), puis se poursuivrait-elle par un rapport oral du président comportant l’exposé des éléments à charge et à décharge figurant au dossier, effectué sans que l’orateur ne laisse transparaître son sentiment sur l’éventuelle culpabilité du prévenu(19) . Ce que nous sommes de toute façon déjà supposés faire, évidemment.
Le président devrait procéder à la lecture, intégrale ou partielle, des expertises et témoignages lorsque les témoins n’ont pas été convoqués ou ne comparaissent pas, ce qui constitue la majorité des cas.
Les citoyens assesseurs auront la possibilité de poser directement des questions aux parties, sans que leur opinion quant à la culpabilité du prévenu, là encore, ne soit perceptible, sous peine de récusation – ce qui n’est pas si évident à faire, y compris quand on c’est votre métier.
Les audiences du TCC seront par ailleurs d’autant plus longues que, comme aux Assises, il reviendra aux seuls juges professionnels de délibérer sur les incidents d’audience et les demandes formées par les parties civiles, les citoyens assesseurs ne délibérant que sur la qualification des faits, la culpabilité du prévenu et la peine. Eu égard à la nature des infractions relevant des tribunaux correctionnels citoyens, lesquelles génèrent presque immanquablement des constitutions de partie civile, le délibéré devrait en conséquence être scindé en deux, pénal d’abord avec les citoyens assesseurs, puis civil ensuite, entre professionnels.
Il convient également de souligner que le projet prévoit de délibérer, sauf exception, immédiatement après l’évocation de chaque affaire(20) . On retrouve là un facteur rendant nécessaire la réduction du nombre de dossiers audiencés.
Le délibéré devrait par ailleurs comporter un exposé, destiné aux citoyens assesseurs, sur les qualifications retenues, l’éventuelle irresponsabilité pour trouble mental, es peines encourues, la récidive légale, les modes de personnalisation des peines, ainsi que le fait que le tribunal peut toujours prononcer une peine inférieure à celle qui est prévue par le texte répressif.
Pour le cas procéduralement particulier des jugements en comparution immédiate devant les tribunaux correctionnels citoyens, il est envisagé, en cas d’impossibilité(21) de réunir la composition adéquate le jour même, de présenter le prévenu devant le juge des libertés et de la détention ou devant le tribunal correctionnel uniquement composé de professionnels afin de statuer sur son seule maintien en détention jusqu’à sa comparution devant la juridiction correctionnelle avec citoyens assesseurs.
Ce délai de détention, dont il était gracieusement prévu dans le cadre du projet initial qu’il puisse s’étendre jusqu’à un mois, a été ramené par les sénateurs à une durée de huit jours, faute de quoi, le prévenu devrait être immédiatement remis en liberté.
Pour résumer, et à mon humble avis bien sûr : cette éventuelle réforme que personne n’a jamais appelée de ses voeux, hormis son initiateur, impliquera l’affectation de moyens considérables à une machine à ralentir l’activité judiciaire pénale, pour un gain de légitimité tout relatif.
Cela étant, vu son coût prévisible, et eu égard au report à 2014 de son entrée en vigueur sur l’ensemble du territoire, je vous avoue être bien persuadée qu’elle ne sera jamais mise en oeuvre.
NB : Le projet de réforme comprend en outre diverses dispositions relatives à la participation citoyenne aux décisions en matière d’application des peines, ainsi que d’autres modifiant la procédure applicable devant la Cour d’assises. Sur ce dernier point, le Sénat a supprimé les dispositions qui visaient à permettre à la Cour d’assises de statuer à trois juges et deux jurés (même composition que le TCC, oui) dans les affaires encourant quinze ou vingt ans de réclusion criminelle – soit les peines encourues, notamment, pour viol et viol aggravé. Cette composition simplifiée, à l’équilibre pros-citoyens complètement renversé, aurait ainsi permis de désengorger la majorité des Cours d’assises, sous réserve de l’accord de l’accusé(22) et au prix d’une “correctionnalisation de fait” des infractions poursuivies, la juridiction correctionnelle et la juridiction criminelle étant identiquement composées. Le Sénat a néanmoins prévu une réduction du nombre de jurés de neuf à six (en première instance) et de douze à neuf (en appel), qui modifierait le ratio de magistrats au sein des Cours d’assises si elle était adoptée par l’Assemblée nationale, qui doit examiner à son tour le projet au mois de juin prochain.
- Si, si, ça existe, et croyez-moi, on n’y rigole guère, et on n’y prend pas son rôle ni le droit applicable à la légère.
- A peine ironique, ne t’énerve pas, Mô …
- Si, si, ça existe aussi.
- Les deux ont des bulles, une couleur dorée, contiennent du sucre, le premier est plus coûteux, mais le second est bien meilleur.
- Ni d’ailleurs dans les cours d’assises “allégées” de première instance dont le projet de loi envisageait la création avant que le Sénat n’y mette le holà.
- A l’exception de ceux qui relèvent de juridictions spéciales, de type cour d’assises spécialisée en matière terroriste, exclusivement composée de magistrats professionnels.
- Autrement dit, car le législateur adore retravailler les codes de façon à les rendre de plus en plus illisibles à chaque réforme, notamment par la méthode des renvois de code à code ou d’un article à l’autre, voire des renvois “à tiroir”, les vols très aggravés, soit qu’ils aient été commis avec des violences ayant causé des dommages étendus, soit qu’ils soient aggravés par deux circonstances au moins.
- Très excitants, comme le détournement d’objet gagé.
- Il est tard, mon billet avance à pas d’escargot fatigué, le blog est en rade de publications depuis des semaines, passons.
- Le naufrage volontaire de l’Erika II, empli d’OGM, dans les eaux d’une réserve naturelle comprenant des installations classées ?… Il faudrait probablement aller jeter un oeil du côté des débats parlementaires – bon, j’essayerai, plus tard.
- Il me semble que ce sigle charmant signifie “équivalent temps plein travaillé”, et sert à affecter les moyens “adéquats” aux juridictions en fonction de leur activité. La Chancellerie a mis en place à cette fin un tas d’outils aux performances aléatoires d’après leurs usagers, qui semblent tous aboutir à la même conclusion : on pourrait faire beaucoup mieux, plus vite, avec encore moins de moyens, si seulement on voulait s’en donner la peine et bouger nos fesses. Je refuse donc de manier ce genre de gadgets – ça me boufferait le temps que je consacre précisément à bouger mes fesses.
- Ca doit bien exister, un tel truc, j’imagine ?…
- J’en soupçonne de moins en moins les rédacteurs de ce projet …
- Désolée pour cet anglicisme, mais l’anglais juridique est tellement en vogue, ces jours-ci …
- Magistrat chargé, dans chaque tribunal, de la mise en oeuvre des actions de formation initiale pour les auditeurs de justice, les candidats à l’intégration dans la magistrature, ainsi que du suivi des stagiaires, étudiants ou autres.
- Il arrive que des jurés s’évanouissent à la seule lecture de l’ordonnance de mise en accusation aux Assises ; les dossiers correctionnels, notamment en matière d’homicide ou sexuelle, sont parfois tout aussi “durs”.
- Conformément, si mes souvenirs sont bons, à la décision du Conseil constitutionnel qui avait déterminé qu’un seul assesseur de la formation collégiale pouvait être juge de proximité.
- A titre indicatif, le nombre de dossiers prévus à chaque audience collégiale de mon tribunal varie de treize à quinze, outre les éventuelles comparutions immédiates du jour. Les audiences débutant à 13 h 30, il n’est pas rare qu’elles se terminent en soirée, voire dans la nuit.
- Le positionnement d’impartialité du président d’audience justifierait d’ailleurs qu’on lui consacre un billet entier, tant il peut poser difficulté – à moi, en tout cas. Il faudrait que j’y pense.
- La pratique actuelle consiste généralement à évoquer plusieurs affaires, puis à suspendre l’audience pour délibérer sur l’ensemble des dossiers évoqués.
- Prévisible … les comparutions immédiates amènent les juges à être mobilisables dans l’heure, ce qui pose déjà souvent difficulté aux professionnels.
- Accord qu’il aurait fortement été incité à donné grâce à une carotte-réduction de la durée maximale de la détention provisoire avant jugement. Oui, c’est petit.