Dans le cadre du plan d’action du Club RMA, nous avons dernièrement invité la Direction de la Règlementation, du Développement, et de la Qualité au sein du ministère du Tourisme à une journée de réflexion sur le projet de Loi des guides actuellement à l’étude au parlement, projet sensé remplacer la loi N° 30/96 et qui est basé sur une étude minutieuse entreprise depuis 2007.
Cette étude stratégique tire son diagnostic d’un benchmark réalisé sur un panel de 20 Pays, d’entretiens avec 40% de guides en exercice et d’une sélection de bazaristes et d’agences de voyages entretenant des relations avec les guides. Pour nous, il était important de connaître les grands changements qui auront lieu et surtout de délimiter le champ d’action du métier de guide qui a de plus en plus tendance à empiéter sur le notre.
Il est clair que ce noble métier doit évoluer et surtout se spécialiser pour répondre à une demande de plus en plus exigeante en matière de connaissances, d’histoire, de géographie, de géologie et de sociologie, autant dire que nous sommes très loin du guide des années 70/80 à qui il suffisait de parler une langue étrangère, d’avoir le sens de l’humour et de la responsabilité, des connaissances sur l’histoire du pays et beaucoup de « tchatche » à quelques exceptions prêt.
Ce guide était également l’interface des clients et des fournisseurs avec les agences, gérant les surbooks des hôtels d’étape, la qualité des prestations fournies, l’état des véhicules de transports, les guides d’étapes « obligatoires », les bazaristes et les sautes d’humeur des clients. Je rends hommage à tous ces guides qui nous ont accompagné durant les années glorieuses où le Tourisme n’avait pas de stratégie, peu de budget dédié, aucune expertise mais énormément de bonne volonté et beaucoup de feeling.
Aujourd’hui, ils sont quelques 2780, toutes catégories confondues (Accompagnateur de Tourisme, Guide de Tourisme et Guide de montagne).
Les guides de tourisme ont une moyenne d’âge de 46 ans dont la majorité a été agréée dans les années 80, la moitié d’entre eux est d’un niveau universitaire bac+5, plus de 75% exercent de manière libérale et seulement 25% sont salariés dans des agences de voyages. Le revenu moyen est de 5000 dhs par mois dont plus de la moitié provient des commissions, vente d’excursions et activités connexes. Ce diagnostic nous interpelle tous quand à l’avenir proche de la majorité de cette population qui ne bénéficie d’aucune couverture sociale, ni de retraite complémentaire et ni d’assurance maladie.
Les guides de montagne représentent 11% de la population des guides, sont plus jeunes, formés sur le terrain pour la plupart, une moyenne de revenus d’environ 3700 dhs par mois dont très peu de revenus connexes .Plus de 80% exercent librement et posent aujourd’hui un problème aux agences spécialisées, avec des sites marchands très agressifs souvent relais de francs tireurs étrangers exerçant en toute illégalité les métiers de TO et agences de voyages sans les garanties et assurances nécessaires au mépris des législations en vigueur.
Le projet de loi prévoit un certain nombres de mesures et de leviers à même de donner de la visibilité sur ce métier et surtout des perspectives d’avenir pour ses acteurs.
Parmi ces mesures, la mise en place de formations adaptées pour une mise à niveau avec la participation des guides agréés et des agences de voyages spécialisées, des sessions de sensibilisation et des séminaires, des road shows, des comités de suivi et de pilotage en association avec toutes les fédérations du secteur du Tourisme.
Les objectifs escomptés à moyens terme sont de professionnaliser le métier de guidage, le moderniser à travers la création de sociétés de Guides et simplifier son exercice dans le cadre d’une nouvelle segmentation.
Il est vrai que cette nouvelle approche pose problème, car qui dit société de guides, dit société de services et dans ce cas, il s’agira de définir la liste des services qui peuvent être proposés sans pour cela empiéter sur les services des autres métiers, en l’occurrence les agences de voyages. Pour ma part, je vois une société de guides multilingues, avec des maitres conférenciers, voire des traducteurs, éditant des guides touristiques à commercialiser, connaissant parfaitement l’histoire récente et lointaine du pays et avec une excellente culture générale.
Cette entité assurera à ses actionnaires et salariés un travail régulier, un salaire convenable et une couverture sociale. De plus elle facturera ses services, sera assujettie à un régime fiscal et fournira des services de qualité faute de quoi, elle perdrait toute crédibilité. Ses clients potentiels seront bien sûr les agences de voyages, les hôtels, les organismes institutionnels et la clientèle individuelle.
La clef du succès de cette nouvelle refonte sera bien sûr la formation et l’absorption par le marché des nouveaux entrants qui seront par la force des choses des acteurs de qualité avec un cursus pointu. Il faut également une volonté de tous à évoluer dans un partenariat équitable dans la symphonie tourisme où chaque acteur doit jouer la partition qui lui est attribuée de par ses compétences et son expérience.
A l’issue de cette journée, notre Club s’est engagé à accompagner cette reforme sur le plan régional avec des stages de formation et de l’embauche à terme, de même qu’il est disposé à aider tous les acteurs désirant régulariser leur activité informelle par un accompagnement leur permettant d’exercer de manière citoyenne, légale et responsable.