Pour moi la question ne se pose même pas, la critique est une composante essentielle au 7ème Art, et j’ai beau les lire avec parcimonie, je serais bien attristé de voir les internautes supplanter le travail journalistique. Je ne lis pas les critiques des films que je veux voir. Chacun a ses propres attentes de la critique, et pour moi il ne s’agit pas de savoir ce qu’untel a pensé d’un film qui m’intéresse et que je n’ai pas encore vu. Si je tiens vraiment à voir le film, tout le monde peut cracher dessus, j’irai tout de même.
Là où le rôle de la critique est cruciale, c’est lorsqu’il s’agit de convaincre. C’est d’attirer l’attention du spectateur sur un long-métrage sur lequel ses yeux ne se seraient peut-être pas penchés sans elle. C’est pour cela que j’aime les critiques. J’aime le désir qu’elles font naître en moi. Parfois je le regrette après avoir vu le film, parfois je leur suis reconnaissant. En ce moment, j’ai le nez plongé chaque matin dans les quotidiens, à l’affût des petites perles cannoises recensées et encensées dans la presse, histoire de caler les titres dans un coin de ma mémoire en attendant d’avoir l’occasion de voir les films en question.
Les frangins belges, j’y avais goûté il y a une dizaine d’années, suivant une unanimité cinéphile qui les couronnait comme des cinéastes majeurs de notre époque. Et je me suis cassé les dents dessus. Rien à faire, je suis resté hermétique au cinéma des Dardenne, l’œil torve face à leur sombre cinéma social. Du coup j’avais un peu laissé tomber les Dardenne. Je n’étais allé voir ni L’enfant ni Le silence de Lorna, découragé par avance, sûr de mon manque d’intérêt pour eux. Et voilà qu’est arrivé Le gamin au vélo en compétition (une fois de plus) au 64ème Festival de Cannes. Sur le papier, sans rien savoir du film avant sa présentation cannoise, il me semblait peu probable que j’aille le voir en salles.
C’est là que les critiques sont intervenues. Le nez zigzaguant entre les journaux, j’ai lu plus que de raison les articles consacrés au film, juste assez pour savoir ce qu’en pensaient les critiques. Sans surprise, comme il est de coutume avec les Dardenne, les critiques sont unanimes, enthousiastes. Avec les frères belges, il m’en faut plus pour me convaincre. Et justement, il y a eu ce petit plus. Il a été écrit que le film était plus léger que leurs précédents. Qu’il s’en dégageait une forte émotion. Que c’était un film lumineux. Merde, je ne pouvais tout de même pas rater ça ! Et du coup je n’ai pas traîné, et avant que le festival ne s’achève, voici que j’ai déjà vu Le gamin au vélo… et que j’en suis ressorti avec la nette impression d’avoir trop fait confiance en ces échos cannois à la limite du dithyrambe.
Depuis, j’ai parcouru les critiques de Melancholia de Lars Von Trier, un autre des cinéastes que j’appréhende et fuis parfois. Et elles m’ont donné envie, les malines. Malgré les propos inacceptables et inconscients que le cinéaste a tenus à la conférence de presse cannoise, il est fort probable que je me laisse tenter lorsque le film sortira en salles… Heureusement, parfois, les critiques m’aiguillent vers des pépites, aussi. Vivement la prochaine.