Les Nuits Botanique ( Soir 8): Dark Dark Dark au Grand Salon ( Musée), Bruxelles, le 19 mai 2011

Publié le 19 mai 2011 par Concerts-Review

"Dans le Grand Salon, Lady Ava est très entourée comme il se doit, par les invités qui, dès leur entrée, se dirigent d'abord vers elle pour la saluer."
Alain Robbe-Grillet,' La Maison de Rendez-Vous'
Ce soir, en l'absence de Lady Ava, inconsolable depuis la disparition du pape du nouveau roman, les invités se dirigent vers Nora Marie Invie et ses complices de Dark Dark Dark, devant assurer l'intermède musical dans le Musée du Botanique.
Quelle excellente idée que la programmation de cette formation de chamber folk dans les drapés rouges bourgeoisie Second Empire du Grand Salon: intimisme et solennité font bon ménage.
S'il te plaît, Dominique, n'élève pas la voix, mon voisin te fusille du regard!

 Dark Dark Dark, donc!
Des malins nous signalent que le copain de Faustine Hollander avait bien choisi JoieJoieJoie comme patronyme et Dutronc: émoiémoiémoi en 1966, déjà!
Trêve de plaisanteries, nous citâmes Nora Marie Invie, une grande bringue avec une figure d'institutrice du 19è siècle, mais fringuée haillons de chez Karl aus Hamburg, au chant, piano ou accordéon.
Nous nous attardons sur le chant en citant Christian Hagen: 'Call me a sucker for a sweetly warbled soul vocal, but Dark Dark Dark’s Nona Marie Invie has one of the most fascinatingly wonderful vocal tones in ages.", sans avoir l'intention de le cataloguer sucker, tant son analyse est justifiée!
Au banjo, à la clarinette et parfois aux vocals, la casquette Marshall Lacount- Walter McClements au piano, accordéon ou trompette- Brett Bullion ou Mark Trecka ( nous hésitons) aux drums et vu de dos, probablement Jonathan Kaiser à la basse.
Ces sombres jeunes gens de Minneapolis ont pondu deux enfants, le dernier en 2010 'Wild Go'.

20h30', pas de setlist, on joue à l'inspiration!
Nona Marie au piano entame le mélancolique ' Something for myself', poésie de femme résignée, enrobée de douces harmonies vocales et de plaintes d'accordéon Richard Galliano.
Tu peux citer Mumford & Sons ou Vandaveer, on ne te fusillera pas!
Le titre suivant 'Say the word' est construit dans le même moule, le chant intrigant, ensorcelant de Miss Invie pénètre insidieusement dans tes pores, s'infiltre dans tes veines pour interpeller ton coeur.
En contrepoint, les couplets récités d'une voix grave ( comme dans 'Right Path') par le marshall nous offre un beau contraste, les percussions et lignes de basse restent discrètes, le piano, l'accordéon et le banjo créent les climats envoûtants.
On est moins enthousiastes lorsqu'on entend les comparaisons avec Beirut, bien sûr les influences balkaniques sont bien présentes, mais on est loin de l'esprit fanfare ou gypsy de la bande à Zach.
Le sautillant et jazzy 'In your dreams' , avec son baritone humming chorus, offre des relents chanson à boire dans la veine Tom Waits.
Trompette et clarinette pour 'Celebrate' pour lequel on peut accepter le raccourci vers Beirut.
Le nostalgique 'All the things' qui clôturait le premier album ' The snow magic', une irrésistible rengaine/chant de marins aussi triste que les ballades de Regina Spektor ou Amanda Palmer, orpheline des Dresden Dolls.

Une nouvelle valse/cabaret au menu: 'The Hand' aux souffles mariachi et Nora Marie qui constate amèrement...You don’t remember when you met me in the park,
You had your collar up.
Well I remember when you met me in the park
Our eyes were shooting stars!...
Pour conclure sur... No stars singing from the skies, no…no sur fond de trompette mourante.
Ai refilé tous mes Kleenex à soeur Dominique qui n'avait aucune envie de sourire.
C'est beau, non, sanglote la brave jeune dame?
La suivante a été écrite par un ami, Elephant Micah: ' Wild Goose Chase' , titre lent, tout aussi ténébreux que leurs compositions personnelles.
Une nouvelle fois la voix de la frontwoman ébranle ton âme sensible.
Le gospel/chanson de rupture ' Trouble no more' cédera place au lumineusement tragique 'Bright, bright, bright' , titletrack d'un EP sorti avant 'Wild Go' .
C'est qui encore qui proclamait noir c'est noir il n'y a plus d'espoir?
La dernière 'Daydreaming' , un ultime chant vibrant, un piano contemplatif, paupières closes tu te laisses tanguer au gré de cette mélodie fragile.
50' combinant grâce, inventivité et majesté.
Le public ,venu nombreux et silencieux pendant tout le set, acclame le quintette!

Séance rappels:
Elle commence très fort avec l'apocalyptique/mythologique/visionnaire ' Wild Go':
Times are different now
The bricks that rose now fall
Willows grow
Where they could not grow
Rivers flow
Where they could not flow...
Pour suivre avec le nocturne lancinant: 'Robert', plus Chopin que Stockhausen !
Que dites-vous, Anne-Sophie?
C'est Schumann que l'on baptisa Robert...
Ecoutez, chère amie, ne suis pas un petit dictionnaire des célébrités ambulant!
Nona Maria congédie les apôtres, nous n'avons pas encore répété ce nouveau titre en formation complète, solo, donc!
Une country ballad romantique, avec références à la 'Tennessee Waltz' version Patsy Cline...
and if I said I never thought of you... , t'es parti, but my life goes on...chanté d'une voix fêlée.
Magie!
Un quatrième bis avec le band au complet: 'Make Time', un doublé vocal parfait, une trompette Herb Alpert, pour le titre le plus lighthearted et enjoué du set.
Merci Bruxelles, aux porte du Musée les CD's se vendent à la pelle !