Andalousie

Publié le 20 mai 2011 par Toulouseweb
Les ravitailleurs militaires d’Airbus ont le vent en poupe.
Face aux grands halls d’Airbus Military implantés dans la banlieue de Séville, haut-lieu de l’aéronautique espagnole qui a connu l’essor de Construcciones Aeronauticas avant l’époque des regroupements, plusieurs A330 MRTT (Mlitary Multi-Role Tanker Transport) sur le point d’ętre livrés ŕ des Forces armées lointaines témoignent de la vitalité d’un programme qui a bien failli séduire le Pentagone, il y a quelques mois. Hors marché américain, face au Boeing KC-767A, l’appareil européen fait la course en tęte avec six clients et des négociations en cours avec plusieurs autres.
Quatre MRTT seront livrés cette année, au départ d’Espagne, pivot avec Madrid de la branche militaire de l’avionneur européen. On est évidemment loin des cadences civiles et aucune comparaison n’est possible avec la centaine d’A330 que livre chaque année l’établissement de Toulouse. Mais l’échec américain n’a traumatisé personne, si ce n’est la ville de Mobile, en Alabama. C’est lŕ qu’auraient été assemblés les avions destinés ŕ l’armée de l’Air américaine ainsi que les A330-200F civils, version fret de la męme cellule. Cet objectif n’a pas été atteint mais la victoire du concurrent n’a apparemment traumatisé personne. Tout au contraire, cet affrontement est ŕ la base d’enseignements précieux.
Domingo Urena, directeur général d’Airbus Military, en parle avec sérénité. ŤNous avions décidé de concourir dans l’espoir de gagnerť, dit-il, Ťnous avons perdu mais nous avons néanmoins prouvé que nous étions capables de répondre ŕ une demande américaineť. Laquelle, ajoute-t-il, était mieux adaptée ŕ un avion plus petit que l’A330 MRTT. Sous-entendu, ceci contribuant ŕ expliquer cela, toute notion de nationalisme économique mise ŕ part.
Est-ce pour autant la fin de l’histoire ? Les dirigeants d’EADS ne se sont gučre exprimés sur ce thčme depuis que le dossier a été refermé et les propos que vient de tenir Domingo Urena retiennent d’autant plus l’attention. A savoir qu’il y aura, plus tard, une Phase 2, c’est-ŕ-dire d’autres marchés américains pour des tranches supplémentaires de ravitailleurs. Il semble donc qu’Airbus Military ait déjŕ pris date et, le moment venu, fasse acte de candidature pour ce qu’il est convenu d’appeler les KC-Y et KC-Z, deux lots d’avions supplémentaires destinés ŕ compléter le remplacement des vénérables KC-135R.
Domingo Urena enchaîne spontanément sur l’A400M et, considérant le long terme, entrevoit déjŕ le moment oů le nouvel avion de transport, désormais sorti de ses difficultés, se positionnera sur les marchés étrangers, y compris les Etats-Unis. Ce qui promet un affrontement de longue haleine, sans qu’il soit question pour autant de bâtir des châteaux en Espagne. Pour fixer les idées, explique-t-on ŕ Séville, le marché potentiel que vise le MRTT est estimé ŕ 350 avions, sur 30 ans. A titre de comparaison, au cours de la męme période, environ 800 appareils de la catégorie de l’A400M devraient ętre placés ŕ travers le monde.
Le MRTT ne vise pas un marché de niche mais il est circonscrit avec précision, le nombre de Forces armées concernées étant évidemment limité. Antonio Rodriguez Barberan, directeur commercial d’Airbus Military, estime ŕ 630 appareils le parc mondial de cette catégorie. L’âge moyen de ces avions est de 44 ans, précise-t-il, ce qui est beaucoup, encore que les statistiques dépendent largement des KC-135R américains dont chacun sait qu’ils ont été commandés …du temps de l’administration Eisenhower.
On rejoint ainsi l’un des grands objectifs stratégiques du groupe EADS, la croissance de son chiffre d’affaires militaire qui, outre les missiles, les hélicoptčres, etc., va aussi dépendre des succčs futurs d’Airbus Military : MRTT, A400M mais aussi la gamme des Ťpetitsť C 212, CN-235 et C-295, nés espagnols, il y a longtemps déjŕ (le premier cité résultant d’une association avec l’industrie indonésienne) et qui poursuivent discrčtement une trčs belle carričre. A Mobile, nombreux étaient ceux qui espéraient ętre associés ŕ cette saga et qui attendent déjŕ que le Pentagone leur donne, un jour, une seconde chance.
Pierre Sparaco - AeroMorning