L’histoire racontée par Manotti et DOA s’étale entre les deux tours d’une élection présidentielle ; période qui titille sans doute le subconscient du lecteur puisqu’il a pour effet de le placer dans un espace qu’il connaît bien. Et, du coup, les éléments qui épicent le récit (cambriolage qui tourne mal, un vol d’ordinateur, un meurtre quasi-accidentel, des écologistes aveuglés, des témoins malgré eux, un flic de la crim’ bien trop malin pour être manipulé etc…) nous semblent bien connus tant la presse écrite et audio-visuelle nous rapporte, presque chaque jour, des faits forts analogues à ceux décrits par Manotti et DOA. Le réalisme de ce livre est si époustouflant qu’il nous ferait presque oublier que « L’honorable société » est une fiction. Un roman qui, fort habilement, construit sur un fond constitué du lobby nucléaire français, d’intérêts financiers, de contestations politiques vouées à l’échec, de magouilles et de crimes en tous genres, nous fait visiter les coulisses où se meuvent ceux et celles qui, par ambition aussi égoïste que personnelle, aspirent aux pouvoirs politiques dont, pour Pierre Guérin (personnage du livre), le plus haut d’entre eux : la présidence de la République.
« L’honorable société » est un livre très bien construit et fort agréable à lire et ce, malgré, peut-être, un style un peu sec qui rappelle trop, parfois, la stylistique des bibles des séries télévisées ou celle des synopsis cinématographiques. Il est vrai que « L’honorable société » était, avant de devenir un ouvrage de librairie, un scénario pour la télévision… Reste que ce roman est excellent et qu’il honore le polar français.
Chers lecteurs et lectrices, le BSC NEWS MAGAZINE, vous invite maintenant, avec un tantinet d’insistance, à lire « Des petites fleurs rouges devant les yeux », un « poche » aux Editions de la Table Ronde et publié dans la collection « La petite vermillon ». Ce livre est un recueil de trente trois nouvelles signées par Frédéric H. Fajardie. Fajardie est l’un des auteurs qui appartient à la génération du néo-polar, genre littéraire –s’il en est – auquel nous avons fait référence au tout début de cette chronique. Frédéric H. Fajardie a quitté ce monde il y a tout juste deux ans (c’était le 1er mai 2008). Il avait soixante ans. Or, comme l’écrivent Jérôme Leroy et Sébastien Lapaque, les deux romanciers signataires de la préface « Des petites fleurs rouges devant les yeux » et qui revendiquent publiquement l’influence que l’auteur de « Tueurs de flics » a exercé sur eux et leurs œuvres, affirment, avec raison, « qu’il convient aujourd’hui d’assigner à Frédéric H. Fajardie sa place dans l’histoire littéraire ». Or, cette anthologie démontre, par la quintessence des textes choisis, que « Fajardie fait de la nouvelle noire une technique de braconnage sur d’autres terres que celles du polar : autobiographie, écrit de combat, Polaroïd historique, réalisme magique, fantaisie surréaliste, utopie politique ». Et puis, Fajardie c’est du bonheur. Quel autre auteur aurait pu écrire une très courte nouvelle sur « Congo » un « tueur d’étoiles » ? Une histoire poétique qui débute par ces deux phrases simples, surprenantes et belles :
« C’était la vingt-septième nuit.
La vingt-septième nuit que « Congo », ainsi surnommé parce qu’il avait séjourné dans ce pays, tirait sur les étoiles ». Bref, c’est du Fajardie. Un grand écrivain qu’il faut vite reconnaître comme tel tant son écriture « procède d’une pure nécessité intérieure ».