Céka - Borris © Casterman - 2010
Synopsis éditeur : « 1941. L’armée allemande lance l’Opération Nordlicht (« Aurore Boréale ») : la prise par les nazis de la ville de Leningrad (aujourd’hui Saint-Pétersbourg). L’entreprise s’avérant vite impossible, l’attaque se transforme en siège, le plus long sans doute de toute l’Histoire : du 8 septembre 1941 au 18 janvier 1944, soit 900 jours ! Il fera 1 800 000 morts – mais jamais la ville ne tombera…
C’est une partie de l’histoire de ce siège – et surtout de la résistance héroïque qu’opposèrent les Russes à leurs envahisseurs – que raconte Lutte Majeure, à travers un épisode presque dérisoire mais néanmoins hautement symbolique survenu en 1942 : l’ordre formel donné par Staline de reformer l’orchestre symphonique de la ville et de lui faire interpréter publiquement la 7e symphonie de Chostakovitch dans la ville assiégée, afin de galvaniser le patriotisme de la population. On savourera le titre choisi pour l’album par Céka et Boris Joly à la lumière du titre complet de cette œuvre musicale : 7e symphonie « en ut majeur »…
L’entreprise, à la limite de l’absurde, atteindra néanmoins ses objectifs : créer un petit moment d’éternité qui réussit, le temps de quelques mesures, à faire oublier toutes les privations aux assiégés. Et proclamer à la face du monde d’alors que l’URSS ne baisserait jamais les bras face à l’agression nazie ».
-
Céka et Borris ont fait le choix d’une fiction animalière pour nous faire revivre cet événement historique. Une parenthèse musicale qui semble assez dérisoire compte-tenu du contexte global.
En ouvrant l’album, un léger mouvement de recul. L’ambiance graphique est sombre et j’ai eu du mal à accepter ces personnages anthropomorphes aux faciès de cochons. Depuis, j’ai appris que Borris avait pris l’habitude depuis longtemps de dessiner ses personnages ainsi. Il n’y a donc pas, dans cet album, de symboliques particulières comme c’était le cas dans Maus d’Art Spiegelman (les Juifs en souris, les Allemands en chat, etc). Rapidement, j’ai apprécié ces personnages expressifs et certains dessins aériens où l’on voit les personnages transcandés par la musique. A travers ses choix graphiques, Borris nous fait ressentir également tout le poids du quotidien d’une guerre côté civil, tout le poids de leurs souffrances et de la mort omniprésente. Durant les nombreux passages muets, j’ai ressenti leur abattement à vivre cette tragédie.Le scénario de Céka œuvre en sourdine et, de manière imperceptible. Il monte en intensité et se révèle dans les dernières pages de l’album. L’intrigue est préservée et mise en valeur pour que la Petite Histoire dépasse bientôt la Grande. Les personnages gagnent en présence durant la lecture, leur fragilité nous touche. Ils sont humains, la musique les aide à survivre dans cette vie où cannibalisme, recherches de rations alimentaires, vols et délation rythment leur vie.
Cet album m’a fait penser au film Les virtuoses (autre contexte social, même émotion).
Un album étonnant que j’ai trouvé assez terne pendant une bonne partie de la lecture. Son dénouement met en lumière tout ce qu’on percevait jusque-là et donne une portée incroyable à ce récit.L’avis de Cécile, l’interview de Borris à Castermag’, une interview des auteurs sur le site de la FNAC et la fiche album de BDGest.
Extraits :
« Chaque réveil était une nouvelle épreuve. Et un étonnement d’être encore en vie. En vie ou en survie dans la peau d’un mort-vivant » (Lutte Majeure).
« Qu’est-ce que c’est que cette guerre où les morts n’ont même pas le droit au souvenir ? » (Lutte Majeure)
Lutte Majeure
One Shot
Editeur : Casterman
Collection : KSTR
Dessinateur : BORRIS
Scénariste : CEKA
Dépôt légal : février 2010
Bulles bulles bulles…
éé
This slideshow requires JavaScript.
é–––