A la fin de la chronique du dernier album de Raphael Saadiq dans le 1er numéro de Now Playing (p.53-54), j’avais conclu par cette question : « quoi de neuf ? » Il semblerait que ce retour aux sources de la Soul Music très en vogue soit en train de perdre son (second) souffle.
On peut dire sans trop se tromper que le mouvement Soul ‘revival’, ou ‘vintage’ c’est selon, a été initiée par le fameux Back To Black d’Amy Winehouse avec l’écho mondial que l’on connaît. Certes, de nombreux artistes de Soul de la vieille époque sont toujours dans le circuit (Al Green, Ron Isley,…), mais peut-être qu’à l’heure où le r&b est édulcoré à base de pop et d’eurodance, le grand public a retrouvé dans cette vague rétro des valeurs traditionnelles du siècle dernier et une forme d’élégance retrouvée.
Puis cette vague s’est transformé en tsunami et de nombreux artistes anglo-saxons et américains, comme Raphael Saadiq avec son millésimé The Way I See It, Seal, Plan B, Aloe Blacc, notre Ben l’Oncle Soul national, Cee-Lo Green et même R Kelly ont pris le train en marche… En Europe, les critiques s’enflamment autour de cette mode rétro, les radios épousent cette tendance et les ventes décollent. Par exemple, Good Things d’Aloe Blacc est disque d’or en France. En tout cas, cela a permis aux français de découvrir Aloe Blacc, Raphael Saadiq et Cee-Lo principalement.
Pour Aloe, cette reconnaissance est une véritable consécration. En revanche, le public hexagonal semble être atteint d’une drôle d’amnésie. Les journalistes télé arrivent à peine à reconnaître Raphael Saadiq, aperçu comme un « nouveau prodige », alors qu’il y a dix ans le chanteur-auteur-compositeur cartonnait avec les Lucy Pearl, et avant ça avec les Toni Tony Tone. Cee-Lo, lui, c’est pire, il est simplement vu comme le « chanteur des Gnarls Barkley« , la presse généraliste ignorant presque tout de sa carrière au sein des Goodie Mob et de ses deux premiers albums solo.
Comme chacun sait, les modes ne durent que périodiquement, et cette tendance Soul vintage n’échappera pas à la fin du cycle. C’est évident qu’à force d’entendre « Soulman » du dandy Ben à longueur de journée depuis des mois sur toutes les longueurs d’onde, il y a largement de quoi être saoulé. Idem pour la ritournelle « I Need a Dollar« , impossible d’y échapper, même dans le métro, quand c’est repris par les roumains (aïe). Comme quoi, c’est très vendeur.
Quoique plus tant que ça finalement. Stone Rollin’ de Raphael Saadiq, qui nous la joue rétro mais rock’n roll cette fois, a connu un démarrage médiocre au Billboard américain (seulement 22 000 exemplaires vendus). Ce faible score pose la question de savoir combien de temps va encore être exploité le filon rétro avant lassitude complète.