En France toujours, le film sur sa conquête du pouvoir en 2007 est enfin sur les écrans. Il est suffisamment efficace pour nous montrer comment Sarkozy, humain, n'a jamais changé et ne changera jamais.
La Conquête, ou pas.
Ils sont allés voir le film, séparément. « La Conquête », ovni cinématographique de Xavier Durringer, est sorti mercredi, dans quelques centaines de salles. Brice Hortefeux s'est précipité au MK2 Odéon, à Paris. Il fut déçu. Son personnage d'ami de trent ans n'est même pas évoqué dans le film. Rama Yade l'a vu également. Tout comme Franck Louvrier, le conseiller en communication du Monarque, dépeint comme un toutou aux ordres et quasiment sans idée. Pierre Charon s'est vu en instable et rabatteur. Laurent Solly s'en sort à peine mieux, directeur de campagne aux ordres incapables de comprendre que son patron avait a tête ailleurs.
Pierre Giacometti, l'homme des sondages, futur consultant grassement rémunéré sur fonds publics par l'Elysée pour alimenter le Monarque en études sondagières pour caler le discours. Le film illustre le cynisme efficace en politique, la victoire d'un homme à la rage de vaincre inversement proportionnelle à la force de ses idées.
Certaines critiques, stressées par l'hypothèse légitime d'une réélection du candidat du Fouquet's en 2012, ont accusé le film de rendre sympathique le Monarque en place. Il faudra pourtant revoir ce film l'an prochain quand Sarkozy, portraituré sentimental, compulsif, violent, narcissique et sans idée nous expliquera, en janvier 2012, qu'il a à nouveau « changé ».
La France, ou pas
Nicolas Sarkozy visitait, mardi 17 mai, l’entreprise Novacarb de Laneuveville-devant-Nancy, avant un long monologue de 56 minutes consacré au développement de l'emploi devant 1.200 invités et militants UMP, et une soixantaine de journalistes, dans un gymnase aménagé à Gentilly.
La visite fut discrète. Le Monarque entra par un passage dérobé à l’arrière du site de l'usine. Le spectacle fut « millimétré », s'agaça l'envoyé spécial d'un quotidien local : « quand il se lève pour traverser la salle comble qui applaudit poliment, on se surprendrait presque à chercher la télécommande pour éteindre la télé.» Sur le fond, il y avait peu à retenir de ce déplacement. Comme toujours depuis de nombreux mois, ces visites sont fatigantes à force de vie. Sarkozy livra quelques évidentes lapalissades :« J'estime que si les bénéfices de l'entreprise augmentent, c'est aussi grâce au travail des salariés et des ouvriers ».
Il joua à la fausse fermeté : « Je ne céderai pas plus que nous n'avons cédé sur la réforme des retraites ». Ou encore : « Je pense qu'ils ont grand tort de ne pas considérer que c'est un élément de compétitivité que d'avoir des salariés dans les entreprises qui se voient reconnus pour le travail qu'ils ont fait. C'est une question de justice : le jour où, dans notre pays, on aura compris que, quand tout le monde se sent respecté dans l'entreprise, l'entreprise va mieux, on aura fait un pas de géant dans la compétitivité de la France. »
Il répéta de vieilles promesses jamais satisfaites, comme ce fichu retour à la croissance (molle) : « On n'y est pas encore, le compte n'y est pas, mais les premiers résultats arrivent. Et c'est ça qu'il faut comprendre. Il n'y a pas de fatalité, on peut y arriver si on travaille, si on investit, si on améliore la formation de nos jeunes, si on permet à nos quinquas de rester dans l'entreprise, si on crée de la croissance, on va y arriver ! » Sarkozy, comme Villepin en 2005, veut croire qu'il a encore le temps de capitaliser sur une croissance qui tarde à décoller pour assurer sa réélection. Sur le terrain, le Monarque ressasse même ses anecdotes : « Depuis trente ans, on était habitué à dire aux gens : attendez 55 ans et au revoir. On n'est pas fichu, on est jeune quand on est quinqua.» Il a 56 ans.
Bizarrement, Sarkozy voyage toujours beaucoup (il repart jeudi), mais il traite rarement des sujets du moment.
L'international, avant tout
Depuis que son seul challenger, DSK, a été disqualifié de la compétition présidentielle, Nicolas Sarkozy veut plsu que jamais capitalisé sur la stature internationale. A 11 mois de l'élection, malgré le soutien de la quasi-totalité des médias français, il y a pourtant de gros efforts à faire.
Ainsi, le Monarque surveille la situation libyenne comme le lait sur le feu. Le colonel Kadhafi serait en passe d'être renversé. Le patron de la compagnie pétrolière libyenne a démissionné. Il avait placé sa famille à l'abri. L'Otan continue ses bombardements, dans l'indifférence générale. Les tribus ne soutiennent plus le dictateur. Sarkozy attend son heure. Mais il oublie les victimes civiles.
C'était pourtant « au nom de la protection des civils » que la France, et plus généralement les forces mandatées par l'ONU, étaient intervenues. Depuis le début du conflit, quelque 790.000 personnes ont fui la Libye, provoquant nombre d'exodes vers l'Europe, notamment de la Tunisie voisine. A peine 3.450 d'entre elles ont demandé l'asile politique. Et le représentant à Paris du HCR dénonce la France qui refuse d'ouvrir ses portes à « ce nombre restreint de personnes en difficulté. »
Sarkozy s'en fiche. La Libye est une cause électorale mais chirurgicale. La solidarité à l'encontre de la Tunisie et la l'Egypte, qui ont déjà accueilli plus de 630.000 réfugiés en provenance de Libye, se fait rare. Les frontières françaises sont fermées. Pour faire bonne figure, le Monarque a reçu le premier ministre tunisien ce mercredi 18 mai. Il a promis que « la France sera l'avocate de la Tunisie. »
A distance.
Rien ne change.