Ah ! Comme ça a intrigué. Ou fait rire. Rire, plutôt… Mais qu’est-ce qu’il raconte, encore, ce François Hollande ! C’est quoi cette histoire de « candidat normal » ? C’est assez ridicule, non, comme axe, voire : comme slogan. Allons, se présenter comme un « candidat normal » pour être, demain, « un président normal », c’est une boutade, que sais-je ? Une farce (tranquille) ! Eh bien non. C’en était pas.
Car ce qu’il faut savoir – et ce n’est pas faute de l’avoir écrit – c’est que François Hollande n’est ni un Flanby, ni un rigolo. Chaque terme qu’il emploie est mesuré, pesé. Rien n’est gratuit. Tout fait sens... Certes, c’est à tiroir, peut-être trop fin (il va falloir travailler ce point, d’ailleurs) mais derrière ce « candidat normal », il y avait quelque chose à entendre.
Alors, beaucoup ont pensé à Sarkozy ; qu’il était visé par ce « normal ». Pour des tas de raisons...
N’est-ce pas l’hebdomadaire Marianne (et surtout, Jean-François Kahn) qui, une semaine avant le premier tour de la présidentielle de 2007, s’était fendu de moult pages nous expliquant que oh-là-là, réfléchissez bien, car cet homme, Nicolas Sarkozy, n’est pas « fou » mais tout de même, il est curieux (et « brutal »). Ceci étant, le terme « fou » avait été mentionné.
Ce numéro de Marianne, vous vous en souvenez, portait un titre qui promettait bien des révélations : « Le Vrai Sarkozy ». Un vrai « Pschiiiitt » en réalité. Qui n’aura aucune incidence sur le scrutin. L’affaire étant pliée depuis le 14 janvier 2007, jour d’intronisation du candidat Nicolas Sarkozy avec son fameux et répété « J’ai changé ». A partir de cette date, plus aucun sondage ne donnera Ségolène Royal vainqueur…
Or donc, dans ce « candidat normal » ayant vocation à être un « président normal », tout aussi étrange que cela paraisse de se présenter ainsi aux électeurs, on aura pu voir, entendre, comprendre, une allusion à un « style », un comportement, celui de Sarkozy. Et, comme durant son quinquennat, il aura, par quelques saillies (« Casse-toi pauvre con ! » « Descends un peu le dire si t’es un homme... », etc.) bien inhabituelles chez un président de la République, et autres fantaisies (Fouquet’s, yacht, Rolex, pipolisation…) qu’effectivement, d’une certaine façon, il n’y avait pas là une « anormalité » mais quelque chose qui dénotait... Qui n'était pas dans la "norme"... Bref, ce n’était l’image d’un président ("on" a même dit qu’il n’habitait pas la fonction)... Et si l’on ajoute d’autres considérations, comme « c’est le président des riches » (alors que théoriquement, ce doit être le président de TOUS les français) oui, on pouvait penser que Hollande se présentait comme étant l’antithèse de Nicolas Sarkozy.
Mais c’était oublier qu’avant de pouvoir affronter Nicolas Sarkozy, François Hollande devrait d’abord en passer par les Primaires et battre le favori des sondages (et des médias) soit : Dominique Strauss-Kahn… Oui, je sais, ça fout le vertige. Mais je l’ai dit, chaque mot, chaque terme de François Hollande est pesé, mesuré.
Cela dit, entendons-nous bien. Ce que voulait signifier, sous-entendre Hollande, c’est que pour une grande partie des français, des électeurs (et n’oublions jamais que ce sont ceux de plus de 65 ans qui ont fait la différence en 2007) le « style de vie » de DSK, franchement libertin, aurait été incompatible avec leurs critères – pardonnez-moi – de « normalité » (pas dans "la norme" tolérée)... Or il était clair, évident, que « ce style de vie » aurait été au cœur, ou du moins abordé, lors de la campagne présidentielle... Ce n’est pas le « train de vie » de DSK qui aurait posé problème. D’autant qu’il paye ce qu’il consomme. Il ne le fait pas « au frais de ». Mais son « style de vie »... Le « style », encore une fois… Que reproche-t-on, souvent, à Sarkozy, sinon son « style » ?
Comprenez que je me place du côté de l’électeur (ce que fait aussi François Hollande, c’est à lui qu’il s’adresse). Importante précision. Et si je la fais, c’est parce que : c’est ce « style de vie » qui est en question, aujourd’hui. Et comme bien des amalgames, assez dégueulasses, je dois dire, sont faits. Comme on en tire, si hâtivement, de sales conclusions. Mais dans un pays, voire un monde, où d’aucuns pensent qu’un homosexuel est un pédophile, je ne m’étonne même pas que certains puissent penser que : parce que DSK est un libertin, alors c’est un harceleur, ou pis : un violeur. Il était facile – si je puis me permettre – connaissant ce « talon d’Achille » de DSK, de le « piéger ». Ceci dit, il faudra le démontrer. C’est pas gagné. Mais là n’est pas le sujet.
Le sujet c’est : « Qu’est-ce qu’un président normal ? » pour l’électeur. Autrement dit, ce qu’il considère comme compatible avec la fonction. A tort ou à raison. Dans un pays laïc, mais dont on nous rappelle et rabâche, et pas innocemment, les racines chrétiennes.
Voilà ce que veut dire « normal ». Ou du moins, est-ce ainsi que François Hollande l’entendait : la compatibilité (selon l’électeur ; ses critères moraux avant tout) avec la fonction… Soit : ce qui lui apparaît être dans la norme.
Sarkozy, on a vu. Mais DSK ?... Hollande, comme la grande majorité des socialistes, connaissait le « style de vie » de « Dominique ». Sarkozy, aussi. Il lui promettait d’ailleurs, et s’en réjouissait d’avance, une « lessiveuse médiatique ». Sauf que, pour les socialistes, orphelins de victoire présidentielle depuis François Mitterrand, on s’est fixé QUE sur les sondages (cette démocratie d’opinion qui, en réalité, est une manipulation de l’opinion par les médias). Et comme ils étaient écrasants. Enfin ! Ils avaient une vraie chance de reconquérir l’Elysée.
Leur cador sera tombé avant même le début des Primaires.
Et de la façon la plus terrible, « sidérante »…
Mais, de toutes les façons, comment ont-ils pu penser que « ça passerait », que l’on n’attaquerait pas, à droite (et même à gauche) DSK sur son « style de vie » ? Quand on connaît la violence d’une campagne présidentielle, où tous les coups sont permis (il n’y a que guère qu’un Jospin pour refuser d’enfoncer Chirac, en 2002, sur les « affaires ») !
Alors, voulu ou non, inconscient qui parle ou pas, dans ce « candidat normal » de François Hollande aspirant à devenir un « président normal », il y avait, et il y a toujours, un sens. Il est spécifiquement destiné à l’électeur. Car c’est lui qui, selon ses critères, encore une fois très souvent moraux, décide de ce qui lui apparaît « normal » (dans la norme) ou pas. Compatible ou pas avec la fonction [*]… François Hollande connaît DSK, je ne peux pas imaginer « une seule seconde » qu’il ne pensait pas à lui, aussi, quand il a décidé de se présenter aux électeurs comme un « candidat normal » (ne devait-il pas le battre avant de pouvoir en découdre avec Sarkozy ?). Tant cet homme n’a pas pour habitude d’employer des termes (aussi précis dans ce cas, et de surcroît) au hasard, à la légère, pour faire slogan ou amuser la galerie médiatique. Croyez-moi, ce type ne rigole pas. Et sait ce qu’il fait et dit.
[*] Soyons concret : en 2006/2007, Sarkozy (prie) demande à Cécila de rester à ses côtés pour la campagne. Il en va de l'avenir de cet homme. Or, nous savons, désormais, que ce couple était mort.
Et Ségolène Royal ? Lorsqu'elle entre (16 novembre 2006) en campagne (bien avant, en réalité) son couple avec François Hollande n'existe plus. Nous le savons aussi.
Pourquoi agir ainsi, taire la "vérité" ?
Parce qu'ils connaissent les "critères", les "normes" des électeurs. Jamais une majorité ne votera pour un candidat en instance de divorce, de séparation. Vous voyez ? La "norme" ? La voyez-vous mieux ? En gardant à l'esprit qu'il s'agit d'élire celui qui va être garant des institutions de ce pays... Il dépend alors de son image sociale, familiale, rassurante. Voilà tout. C'est cela la "norme" (le "normal"). Et voyez-vous, le fait que Carla Bruni soit enceinte, aura des conséquences. C'est une évidence. L'homme Sarkozy ne peut pas ne pas en tirer profit. De "normalité". Il le fera. Habilement. Car c'est une "image" rassurante, d'autant plus, en des temps de crise. Une image, de surcroît, de bonheur. Bref, il est (mais je l'avais dit aussi) en passe d'être réélu. Cet homme connaît (trop) les "codes".
NB1 : Je tiens à préciser que, pour ma part, et mettant de côté ce qui est du strict ressort de la justice, donc mettant de côté ce qui s’est produit au Sofitel, je ne considère pas le libertinage - je parle bien de : libertinage, pas d’autre chose – comme un comportement qui ne fût pas dans la norme, ou a-normal.
NB2 : voulez-vous que je vous raconte ce soir où je vis, au Louvre, un ex-ministe se radiner avec une "bombe", qui, manifestement, n'était pas sa femme ? Voulez-vous qu'on cause de ces privilèges que s'octroient ces hommes de pouvoir de droite comme de gauche ? Vraiment ?