«La France n’est pas la Grèce», se rassure-t-on à l’Élysée. C’est vrai. Entre les situations des deux pays, il y a une sensible différence, mais celle-ci est davantage de degré que de nature.
La Grèce a une dette publique égale à 150% de son PIB. La France n’est «qu»’à 85%. La Grèce ne peut plus emprunter sur les marchés. La France le peut encore, mais avec des signes qui montrent que sa dette est désormais «sous surveillance».
Cela se vérifie en observant l’évolution des cours des primes d‘assurances qu’acceptent de payer les investisseurs pour se couvrir des risques souverains (CDS : «credit default swap»). Pour la France, la prime a triplé depuis septembre dernier. C’est dix fois moins que pour la Grèce. Mais trois fois plus que pour la Norvége et deux fois plus que pour l’Allemagne…
Certes, au delà de la Grèce, de l’Irlande et du Portugal (lire l’article d’Alain Mathieu), cinq autres pays sont plus mal notés que la France : la Hongrie, l’Espagne, l’Islande, l’Italie et la Belgique. Mais nous sommes déjà dans le collimateur.
Aujourd’hui, pour inspirer confiance aux marchés financiers – qui seuls permettent d’accéder aux prêteurs d’argent à moyen et long terme – il faut réduire les dépenses publiques, rétablir l’équilibre de son budget et stabiliser la dette, avant de commencer à la réduire.
C’est ce qui s’appelle «l’assainissement», ou «l’austérité». Soit cette politique est engagée volontairement (comme au Royaume-Uni, après la victoire électorale des conservateurs en mai 2010), soit elle est imposée par les organisations qui viennent au secours des pays défaillants (le FMI et l’Union européenne, qui s’engage via son «Fonds de stabilisation financière»).
Dans les deux cas, et s’agissant des trois pays déjà «opérés», les traitements sont à peu près les mêmes : réduction des dépenses publiques, diminution des traitements et des avantages des fonctionnaires, rabotage des prestations sociales. Les mesures sont d’autant plus sévères qu’elles sont plus tardives.
Si la France est «opérée à son tour», par exemple au deuxième semestre de 2012, il lui faudra s’engager à revenir à l’équilibre budgétaire en deux ans, et pour cela supprimer sur la période son déficit budgétaire, qui sera de l’ordre de 100 milliards d’euros à fin 2011. Tous les impôts, en particulier ceux qui rapportent gros comme la TVA et la CSG seront aussi augmentés dans l’urgence (sous couvert d’une «réforme fiscale»), les traitements des fonctionnaires seront bloqués ainsi que l’embauche dans l’ensemble de la sphère publique. Il faudra enfin réduire les subventions de manière drastique. Et vendre ce qui reste de participations publiques (EDF, France télécom, EADS, Air France, Aéroports, SNCF, Safran, Thalès, Renault, La Poste…).
On dira : «En Grèce, en Irlande, au Portugal, ces plans ont déjà eu des conséquences catastrophiques !». En effet, il n’y a pas de purge sans amaigrissement… Baisse de plus de 10% de la production en moyenne pour les trois pays concernés et augmentation du chômage…
Alors, dans ces cas-là, «à quoi bon ?». Simplement, à gagner du temps… (N’est-ce pas d’ailleurs souvent la principale préoccupation des politiciens ?)
S’agissant de la Grèce, personne ne pense que ce pays pourra échapper à une «restructuration» de sa dette, c’est-à-dire, au minimum, à un non-remboursement partiel de ses dettes. Les banques, principales concernées, reculent l’échéance, et, en attendant, renforcent leurs fonds propres grâce au laxisme monétaire des banques centrales.
Cette politique de gribouille a une espérance de vie… de quelques mois…
Pour la France, l’heure de vérité va sonner au plus tard en 2012.
Comme il est peu probable que la politique menée par Nicolas Sarkozy change avant les élections présidentielles, la crise, inévitable, se produira donc avant, ou après…
Alain Dumait, directeur de la publication du Cri du Contribuable
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