Première partie : Un papa japonais tout ce qu’il y a de plus classique perd son emploi. Quand sa femme demande le divorce, il se retrouve à la rue avec pour seuls biens sa voiture et Happy, le chien de la famille. Gravement malade, se sachant de toute façon condamné, il décide de partir pour le sud, dans un dernier voyage avec ce compagnon à quatre pattes qu’il chérit plus que tout. Seconde partie : les dépouilles de « Papa » et de Happy sont retrouvées au milieu d’un champ, dans la carcasse d’une voiture abandonnée. Un assistant social chargé de récupérer les corps et d’organiser les funérailles décide de retracer la vie de ces deux êtres sans identité.
Mais qu’est-ce qui m’a pris de m’intéresser à un album pareil ? Je l’avais repéré sur le site de l’éditeur, me disant que l’on avait sans doute affaire à un mélo larmoyant. Et puis je suis tombé dessus à la librairie. Et puis je l’ai feuilleté. Et puis je l’ai acheté, pensant peut-être inconsciemment que j’allais pouvoir me lâcher dans un billet plein de fiel comme je n’en n’ai pas rédigé depuis longtemps. Un peu comme quand je m’étais payé l’année dernière Un bol plein de bonheur, manga tire-larmes à la limite du ridicule. Une autre référence de qualité moyenne m’est venue à la lecture du résumé : Je ne suis pas mort, d’Hiroshi Motomiya. L’histoire d’un homme rejeté par les siens qui décide de vivre en ermite au fin fond d’une forêt.
Je me suis donc lancé dans la lecture de ce Chien gardien d’étoiles avec gourmandise, traquant les éléments qui me permettraient de rédiger une diatribe sans concession. Et là, patatras, tout s’est écroulé. Non seulement ce manga ne donne pas dans le pathos dégoulinant mais en plus il est construit avec intelligence. Le « papa» de la première partie n’est pas un battant. Il subit les événements, n’en veut pas particulièrement à la société. Le bouleversement de sa vie sans histoire et de ses habitudes est un élément déclencheur qui le pousse à tout quitter pour partir sur la route. Petit à petit, le renoncement l‘envahit. Il se sait condamné de toute façon. Le dévouement du chien, limite caricatural par moments, se révèle au final touchant. La seconde partie donne quant à elle de l’épaisseur à l’ensemble. Une sorte d’humanité bienvenue avec un fonctionnaire qui tient absolument à redonner un peu de dignité à papa et à Happy.
La postface a achevé de me convaincre. L’auteur explique qu’il a rédigé cette histoire parce qu’il a du mal « à accepter un monde aussi rude qui met cruellement en danger et parfois dans une situation extrême, ces gens simples qui déploient beaucoup d’efforts pour continuer de vivre ». De plus, il remercie le lecteur d’avoir pris le temps de lire son œuvre, qu’il qualifie de « modeste ». Une humilité qui m’a beaucoup plu.
Tenant davantage du roman graphique que d’un manga classique, ce One shot de qualité fait penser à un Into the Wild à la sauce nipponne. Sans compter que pour un peu, j’en viendrais presque à reconsidérer mon refus absolu d’avoir un chien à la maison. Attention, j’ai bien dit « presque »...
Le chien gardien d’étoiles de Takashi Murakami, Éditions Sarbacane, 2011. 125 pages. 17.50 euros.
Le challenge Palsèche de Mo'