Les conditions de séjour d'Oussama Ben Laden au Pakistan, autant que celles de sa mort, sont sources de fortes tensions entre Washington et Islamabad. L'administration Obama exige que l'armée pakistanaise lui rende des comptes. Et à raison ..En effet, dans le sillage du 11-septembre, les Etats-Unis avaient exigé que le Pakistan se positionne : soit le pays conservait ses liens avec les Talibans afghans, soit il se rangeait du côté des Alliés pour appuyer son intervention chez son voisin. Pervez Musharraf avait tranché : ce serait Washington. Dès lors, une somme était allouée chaque année par l'administration américaine pour le développement des infrastructures de sécurité, autant que pour le développement de la démocratie (18 milliards de dollars depuis dix ans).
Mais un certain nombre d'élus au Congrès a estimé que l'Amérique n'en avait pas pour son argent, surtout si les soupçons de connivence entre les milieux militaires pakistanais et Al-Qaida se trouvaient fondés. Ils ont donc demandé à ce que cette somme soit supprimée.
Force est de constater, pourtant, que Washington a besoin d'Islamabad. La lutte contre les Talibans afghans dans la province du Baloutchistan (le Mollah Omar s'y cacherait avec ses partisans), ou du Nord-Waziristan, demande la participation des autorités pakistanaises. Des autorités qui lorgnent d'ailleurs de plus en plus sur la Chine, superpuissance capable, à leur yeux, de supplanter les Etats-Unis comme partenaire privilégié. Pékin ne s'y est pas trompé et multiplie les appels du pied : coopération dans le nucléaire, construction d'infrastructures portuaires, etc.
Or Washington, par sa subvention, pouvait garder un oeil sur le programme nucléaire pakistanais, assez opaque et sensible, en raison de la rivalité avec l'Inde mais aussi à cause du risque islamiste dans le pays. Le sénateur démocrate John Kerry appelle ainsi ses collègues à la raison : "Nous sommes à un moment où nous devons résoudre des questions très importantes. Ce n'est le moment pour rien d'autre qu'une discussion lucide et sérieuse, avec la conscience qu'il y a beaucoup en jeu" tempère-t-il devant la presse. (photo : Juan Blazquez, CC)