Concert mercredi 11 mai à la Salle Pleyel. Radu Lupu donne un de ses très rares récitals. Au programme : Robert Schumann (Papillons opus 2 et Bunte Blatter opus 99) et Franz Schubert (sonate en la mineur D 845).
Avec un magnétisme extraordinaire, Radu Lupu captive immédiatement le public de Pleyel pour un concert, dont on sent dès les premières mesures, qu'il s'annonce exceptionnel. Tout de suite, l'extraordinaire clarté des lignes s'impose et le jeu souverain de Radu Lupu se déploie. Droit sur sa chaise (il prend un appui solide, comme un roc, sur le dossier d'une chaise, préférée à la banquette classique), Radu Lupu impose sa patte comme un vieux lion, faussement placide et plus que déterminé. Le toucher est d'une finesse incomparable. Sur Papillons, comme sur les Bunter Blatter, plus complexes, moins évidents, il rend des nuances inouies, déploie des couleurs magnifiques.

Mon écoute de la sonate D 845 de Schubert avait été "déformée" par le déroulement narratif très linéaire et cérébral d'Alfred Brendel au disque. Radu Lupu bouleverse complètement ma perception de cette oeuvre en dévoilant un univers onirique si singulier et prenant. Il se montre imprévisible et fantasque alors que Brendel était systématique et abstrait. Il envoute littéralement et restitue une lecture profondément poétique.
Sur les bis, Radu Lupu revient à Schumann. Il nous démontre à nouveau comment il s'avère être l'un des très rares pianistes à explorer avec tellement de force et de clarté les méandres les plus initmes des compositions tourmentées du compositeur allemand.
Concert prodigieux. Historique. L'une de mes plus grandes émotions en vingt cinq ans d'écoute en concert. Je ne peux qu'être profondément reconnaissant à l'être si cher qui m'y a invité, me fournissant l'occasion de renouer avec les concerts, et que la vie m'avait fait abandonner depuis quelques mois...