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Construire une dynamique de prise de pouvoir : les mentalités, la première résistance

Publié le 16 mai 2011 par Wilnton @pam_wilnton

Lorsque l’on s’engage dans une dynamique de conquête du pouvoir aux fins de faire émerger dans la pratique politique les aspirations du peuple, la première difficulté à laquelle on fait face, ce sont les mentalités des populations. Attention, il s’agit d’un problème qu’il faut bien cerner afin de pouvoir apporter des réponses adaptées.

J’ai vu une fois un homme politique s’enflammer après qu’un citoyen lui ait lancé à la figure : « Ah ka ! Vous venez demander aujourd’hui qu’on vote pour vous alors qu’une fois que vous allez arriver, vous allez faire les mêmes chose »‘. Plus tard il a avoué que sa colère était dû au fait qu’il avait l’impression que les gens ne comprenaient pas du tout que c’est pour eux qu’on se battait. J’ai vu aussi ce genre de réactions chez beaucoup de jeunes activistes et la vérité est que la manière de réagir des gens amène souvent au pessimisme. Certains acteurs du changement politique ont même fini par se comporter comme s’ils étaient des ennemis du peuple, irascibles vis à vis du citoyen lambda, « cet energumène préocccupé par des faux problèmes, qui n’arrive pas à comprendre les enjeux de son destin et qui est prêt à livrer sa tête pour sa propre mort et pour celle des autres ».

Je souhaite qu’on se positionne à d’autres niveaux par rapport au citoyen lambda. C’est lui qui est l’enjeu de tout destin politique. En fait, la politique a pour objet le citoyen. Non pas celui qui est conscient ou pas, non pas celui qui sait ou ne sait pas, celui qui participe ou pas. Elle a pour objet la gestion de la cité aux fins d’améliorer la vie  de la majorité de personnes dans la cité. La politique repose sur le citoyen. Elle doit porter ses aspirations, et entrainer celui-ci vers une perspective dans laquelle il se retrouve.

Cependant, une dynamique de prise de pouvoir ne peut pas s’accomoder d’un état généralisé de lethargie. Et c’est bel et bien un tel état qui prévaut au Cameroun et dans la plupart des pays sclérosés par des dictateurs. La population a démissionné de son sort. Elle se contente en général de quelques bières, des débats sur le dernier match de champions League ou des Lions indomptables. Quelques divers de quartier alimentent ses réflexions pendant qu’elle n’a qu’une seule préoccupation…le pain quotidien qui sera à rechercher demain…Norbert Zongo disait avec raison que c’est cette attitude qui est la plus mortelle…n’avoir que son pain quotidien…une miche, parfois juste quelques miettes…comme seule préoccupation. Cela condamne à ne vivre que des miettes alors que la boulangerie nous appartient et qu’elle réalise déjà des bénéfices pour nous tous. Et quand elle veut se donner bonne conscience, la population n’entre que dans la scène du discours…d’un discours dont on s’assure qu’il n’a aucune suite…et que l’on est prêt à renier si jamais l’on était interrogé à propos.

La mentalité négative, démissionnaire et parfois rétrograde du peuple est toujours le fruit d’un système politique dominateur et qui s’impose contre les intérêts du peuple. Ce système éloigne du peuple de ce qui est sien, la cité, afin qu’elle ne devienne que l’apanage des apparatchiks du système. On frustrera donc le peuple, le spoliera de ses droits, lui déniera une quelconque prétention à la vie publique, on fera de lui un esclave à la solde des fonctionnaires et autres responsables qui auront tous les droits, chacun profitant de la moindre responsabilité publique pour abuser sur les autres. A aucun moment, il ne sera donné au peuple de s’exprimer librement…toutes tentatives d’expression seront médiatisées comme une instrumentalisation, insurrection, rébellion, insulte, asseyant dans l’inconscient collectif que le peuple ne peut avoir aucune autre initiative que de lécher les bottes du système ou se faire entrainer dans ce qui est mal. On assimilera toute opposition au système comme une opposition aux valeurs (la paix, la démocratie, le bien être, etc.).

Le peuple mis sous cette inféodation psychologique ne sera pas un allié de fait de tout mouvement visant à la restauration de sa souveraineté. Passif, conduit, esclavagé, abruti et endormi, il sera souvent en recul. Et même s’il est soudain reveillé et se manifeste, il reste encore un danger parce qu’il peut facilement prendre le chemin de l’anarchie. Il faut donc savoir travailler avec lui pour qu’il devienne une force positive. En attaquant au coeur des interrogations qui peuvent aider à prendre un chemin différent et faire du peuple l’acteur principal de sa propre révolution.

Cela est un travail dans lequel il faut de la patience, du talent, de l’imagination et du savoir-faire.

Un peuple se prépare en contexte de tentative de prise de pouvoir et cette préparation se fait d’une certaine manière. Parce qu’en face, il y’a des forces d’opposition qui veulent garder les choses telles qu’elles et qui non seulement agissent pour garder la mentalité du peuple acquise au non-changement, mais aussi qui sont prêts à des actes parfois d’une violence remarquable s’ils sentent qu’un travail de prise de conscience est effectif au milieu du peuple.

Nous allons donc aborder les deux paravents de cet aspect dans les prochains articles : Comment orienter la mentalité du peuple et avec quelles méthodes ?



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