Titre sans prétention d’un film remarquable. Après un mois d’été à Barcelone, Lili rentre chez elle et compte bien retrouver Loïc, son frère jumeau dans la petite maison qu’occupent ses parents en banlieue. Mais l’ambiance est morose, mesquine, étouffée, et le père finit par avouer, les épaules basses, que, cette fois, le fils a dépassé les bornes, et qu’il s’est fâché définitivement avec lui.
Depuis la dispute, plus un seul signe de vie... Le secret pèse sur la maison et Lili ne comprend pas. Pas un appel. Pas un SMS. Pas un seul signe... Elle se sentait pourtant si proche de ce frère à la fois charnel et spirituel. L’absence et le silence sont immédiatement trop lourds à porter et Lili ne possède plus que la chanson qu’il a enregistrée avant de partir. Une guitare, une voix, un son particulier, l’ombre de l’oreillette sur la chair délicate et les grands yeux battus de Mélanie Laurent. « Lili, take another walk out of your fade world »… Et Lili descend peu à peu vers l’enfer. L’ombre du frère chéri est devant elle, creuse le ventre, abîme l’estomac.
Lili ne mange plus, Lili n’est plus que la mélodie envolée de Loïc. Colorée de soleil au début du film, légère, facétieuse, la gracile libellule bat des ailes, rejoint les papillons que la vie a plantés d’une aiguille... Le père, bouleversant Kad Mérad, n’a plus que la poudre sur les doigts et le poids d’une responsabilité immense... « L’autre abruti » comme l’appelait son fils, comprend qu’il maintenant est en train de perdre sa fille, et il est prêt à tout pour venir la rechercher jusqu’au fond des Enfers... Dût-il même écouter la musique d’Orphée, et regarder en face, et dans les yeux, ce Loïc qu’il n’a jamais essayé de comprendre et qu’il a dégoûté, révolté, médusé à force de mesquinerie et de bassesse ou d’indifférence. Et quand le spectateur se retourne avec lui, au seuil de l’Enfer où il est descendu, c’est un autre secret encore plus insoutenable qui se révèle...