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Etat chronique de poésie 1208

Publié le 15 mai 2011 par Xavierlaine081

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1208

Pour un soir, un soir seulement il m’était permis de rêver. J’étais perdu en des rêves infinis, d’infinis mensonges me prenaient dans leur barque de mystère, mais à chaque coup de rame je m’approchais un peu plus du vrai.

Et le vrai avait doux visage, folle passion, sans rien dire de ce qui venait entre deux regards.

Nous étions suspendus à des lèvres qui parlaient tandis que, ailleurs, les cœurs battaient à tout rompre de se trahir.

*

Je me suis évanoui dans cette nuit sans fin.

J’avais entendu ton appel, mais tu étais happée vers d’autres rivages qui n’étaient plus les miens, alors je me suis enfui, avec la lâcheté de celui qui a tout à écrire, mais rien à dire.

La nuit m’a surpris, dévalant rue sans nom et celle des potiers.

Mes yeux criaient aux étoiles la folle envie de ne plus quitter ce monde imaginaire, tellement plus beau que le dit réel qui se décline en variations de noir et de gris.

*

Ma parole n’avait rien d’autre à prononcer que la joie d’entendre, et de retrouver mes auteurs préférés. Ils m’attendaient, sagement alignés dans le noir de mon antre.

Dès que j’allumais la lumière, ils se mirent à parler.

Les uns, pourtant morts depuis longtemps, m’en voulaient de mon infidélité provisoire. D’autres cherchaient à deviner ce qui pouvait justifier ma jubilation impossible à murer sous le fard d’un sérieux de bon aloi.

Et tous riaient du bon tour qu’ils m’avaient joué en me suggérant cette phrase inattendue : « Un auteur ne meurt jamais, en fait. La preuve ? Je les entends toutes les nuits qui se parlent, dans ma bibliothèque ».

*

Vous aviez donc tenu à m’asséner la preuve que je n’avais pas médit.

Et me voilà la proie d’un enfer : mon imagination se met à gonfler, chaque jour un peu plus. Elle me rend insupportable la compagnie des vivants. Je ne suis plus que mots jetés à la hâte sur un papier virtuel.

Je sais pourtant qu’il suffirait d’un souffle pour que plus rien de tout cela existe.

Je me réveillerai alors, vide et sans consistance, en proie à l’irrémédiable souvenir de qui je fus en ces temps d’écriture.

Je me regarderai dans une glace sans me reconnaître.

Je ne saurais si l’amour était ou est, ou sera.

*

Il ne me restera, une fois effacées toutes traces de ce rêve aux yeux ouverts, qu’à suivre la pente commune, vers la fosse.

Et nul ne viendra pleurer tant je n’aurais existé que dans une dimension inaccessible à la plupart. Je me résoudrai au silence et à la solitude. Mes rêves me reprendront sans doute dans leurs bras de divine beauté, sans doigts pour leur donner corps, une fois la pierre retombée.

.

Manosque, 8 avril 2011

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