En direct – Et si le séisme de Lorca était celui prédit par Bendandi ?

Publié le 12 mai 2011 par Labasoche

C’est la rumeur du jour sur le Net. Tout est parti de la soi-disant prophétie d’un sismologue autodidacte, mort en 1979, Raffaele Bendandi, qui avait élaboré sa propre théorie sur les séismes. Selon lui, ou plutôt des « experts », qui s’étaient penchés sur ses travaux, en avaient déduit qu’il avait prévu un tremblement de terre dévastateur le 11 mai 2011… à Rome. Hélas, un séisme a bien eu lieu, mais en Espagne, dans la ville de Lorca. Sur le Web, les adeptes des théories les plus folles se frottent les mains et crient au génie du savant italien.  La chute du clocher d’une église de Lorca en direct à la télévision :

Un tremblement de terre de magnitude 5,3 a ébranlé le 11 mai, en fin d’après-midi, le sud de l’Espagne, notamment la ville de Lorca dans la province de Murcie, faisant huit morts. Alors que l’aide s’organise pour les victimes,  sur Internet, dans les blogs ou sur Twitter, certains gonflent la poitrine et s’évertuent à expliquer que tout avait été prévu 30 ans plus tôt par Raffaele Bendandi, un scientifique italien, mort en 1979. Ainsi, il n’est pas rare de lire dans les commentaires des sites d’actualités que  »quand on regarde sur la carte, ce n’est pas si loin que ca » ou encore « ce qui nous prouve qu’on peut prédire l’avenir »…

Quel crédit accorder à Raffaele Bendandi ?

Bendandi, qui est mort à l’âge de 86 ans, estimait que les séismes  étaient la conséquence d’un certain alignement des planètes, de la lune  et du soleil.  En 1923, il avait prédit qu’un tremblement de terre allait frapper la  région des Marches, sur la côte Adriatique, le 2 janvier 1924. Malgré  une erreur de deux jours, il se retrouve en une du Corriere della Serra : « L’homme qui prédisait les séismes ». Pourtant, si des « experts », qui se sont penchés sur ses  travaux, en ont déduit qu’il avait prévu un tremblement de terre dévastateur le 11 mai 2011, la fondation Bendandi a souligné que dans ses écrits, « il n’y a aucune trace de séisme à Rome le 11 mai  2011″.  Le doute reste donc entier. Mais pas pour tout le monde…

Internet célèbre son nouveau « Nostradamus« 

Lorsque l’on effectue une simple recherche sur Internet, associant les mots « Lorca + Bendandi », 8.560 résultats remontent. Parmi ceux-ci,  « Raffaele Bendandi, le Nostradamus italien » ou encore « La prophérie de Bendandi s’est déplacé de Roma à Lorca ». D’ailleurs, mercredi, plus de 20% des Romains ne se sont pas présentés au travail ou à l’école mercredi, par peur ou sous prétexte de la rumeur du séisme dans la Cité éternelle, tandis que les hôtels et gîtes des alentours faisaient le plein.  La circulation était d’ailleurs inhabituellement fluide dans la capitale et on notait des rangs clairsemés à l’entrée des écoles. Réputés superstitieux, les commerçants chinois de Rome avaient déserté leur quartier de l’Esquilino avec 9 rideaux de fer sur 10 baissés pour « maladie », « inventaire » ou « congé ». Rappelant que la rumeur a d’abord circulé « de bouche à oreille », M. Mastrantoni a déploré qu’une « partie des citoyens romains y ait cru comme ils croient aux magiciens, aux sorciers ou aux astrologues ».

Lorca se trouve sur un réseau de failles sismiques liées à la remontée de l’Afrique vers le nord. Mercredi 11 mai cette ville était très proche de l’épicentre, ce qui a provoqué d’importants dommages.

Huit personnes ont été tuées et 130 blessées à Lorca, dans le sud-est de l’Espagne, par le séisme du mercredi 11 mai, qui s’est produit à 16h47 TU (18h47en France).
L’épicentre de ce séisme n’est situé qu’à deux kilomètres de la ville de Lorca, et il est très peu profond : à 2 km selon le centre sismologique euro-méditerranéen (CSEM), un kilomètre seulement selon l’institut géophysique américaine (USGS). Cette double proximité explique que les dégâts ont dont été très importants pour un séisme de 5,1, une magnitude modérée.

La région de Lorca et de Murcie est traversée par un réseau de failles sismiques bien connues. En effet cette zone du sud de l’Europe fait les frais de la remontée du continent africain vers le nord-ouest, au rythme d’environ 2 cm par an. «Lorca est proche de la frontière entre la plaque africaine et la plaque eurasienne» explique Samuel Auclair, ingénieur en sismologie au Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM). Les contraintes s’accumulent et de nombreuses failles accommodent la déformation provoquée par la remontée de l’Afrique en encaissant une partie des tensions.

« Cependant il arrive un moment où cela ne peut plus se produire de façon élastique et où il se produit une rupture le long de la faille » .

Dans le cas présent c’est sur la faille d’Alhama de Murcia, qui passe sous la ville de Lorca, que ce serait produite la rupture. « Le déplacement observé le 11 mai –un décrochement- correspond à la nature de cette faille » explique Samuel Auclair. Cette faille est impliquée dans les cinq séismes importants qui ont secoué la région de Murcie ces 12 dernières années (notamment en 1999 et en 2002).

La collision entre les plaques africaine et eurasienne dessine une ligne qui court depuis les Açores jusqu’au détroit de Gibraltar. Elle est notamment responsable du grand tremblement de terre de Lisbonne en 1755. Après le détroit de Gibraltar la déformation se prolonge vers l’est, au sud de l’Espagne et au Maghreb.