En cette période de commémoration de la victoire de François Mitterrand en mai 1981, alors que la campagne présidentielle de 2012 se prépare, il n'est pas inutile de revenir sur le tournant du premier septennat de Mitterrand, à savoir le tournant de la rigueur. Ne va-t-on pas revivre ce phénomène après 2012?
Rappelons ces événements connus : arrivé au pouvoir, la gauche applique le programme commun. La politique économique du gouvernement Mauroy est une politique de relance de la consommation. Il espère ainsi réduire le chômage.
Mais cette politique se heurte à une perte de confiance des milieux économiques et à des attaques contre le franc, menées par des spéculateurs anglo-saxons (Ronald Reagan et Margaret Thatcher sont aux manettes et ne viennent pas en aide à la France socialiste !).
La mort dans l'âme, Mitterrand est obligé, en mars 1983, de faire volte-face. Il instaure, avec le gouvernement Fabius, une politique de rigueur et tourne le dos aux idéaux de la Gauche.
On peut faire le parallèle avec l'arrivée au pouvoir de Sarkozy en 2007. Son programme politique d'inspiration libérale est mis en place mais la crise économique mondiale de 2008 l'empêche de la poursuivre et l'oblige à mettre un frein à ses réformes.
N'est-ce pas cela qui nous attend l'an prochain?
Pendant un an, on ne va entendre parler que de candidats, de leurs personnalités et de leurs petites phrases. On entendra aussi leurs programmes, bien lisses, gentils et remplis de bonnes intentions.
Certaines intentions seront rapidement oubliées l'élection passée. Mais surtout, quelque soit le vainqueur, il ne pourra pas appliquer ses idées car le principe de réalité se rappellera immédiatement à lui.
On l'a déjà vu pour le PS qui espère une croissance assez forte pour financer les mesures qu'il préconise dans son programme. Mais il en sera de même pour l'UMP et le Front National.
De quoi est fait ce principe de réalité? D'abord d'une croissance anémique et qui le restera, ensuite d'un déficit budgétaire de l'Etat et des comptes sociaux qui détruisent, par avance, toutes les marges de manoeuvre envisageables.
Mais si en 81, nous avons eu les attaques contre le Franc, si, en 2008, nous avons eu la Crise, nous allons, selon toute vraisemblance, avoir le Peak Oil pétrolier après 2012 et/ou d'autres aspects de la crise (crise alimentaire, banqueroute de l'Etat, krach immobilier).
Faut-il pourtant tout voir en noir? Non, mais rester lucide : l'époque est dangereuse. On reprochera, dans l'Histoire, au vainqueur de 2012, de n'avoir pas su prévoir des politiques capables de répondre à ces défis pourtant facilement prévisibles.
Les partis politiques qui veulent gagner en 2012, doivent aujourd'hui construire une fusée à trois étages:
-Premier étage: la politique spectacle; les petites phrases et le spectacle indispensable pour convaincre la majorité de nos concitoyens rivés devant leur poste.
-Deuxième étage: un programme politique à la fois réaliste et aérien qui nous fasse rêver, avec des valeurs et des idées séduisantes pour convaincre la minorité qui, par l'analyse politique, dans la presse et dans la blogosphère, veut un programme qui l'intéresse.
-Et enfin, un troisième étage, réaliste, lucide et imaginatif, celui de la politique que l'on va REELLEMENT appliquer quand on sera au pouvoir. Et dans un monde de plus en plus complexe et difficile, il faudra autre chose que des formules et des bonnes intentions pour réussir, il faudra innover et inventer une politique qui aura anticipé sur l'avenir immédiat.
Car l'Histoire, la grande Histoire oublie les deux premiers étages de la fusée et ne retient que le dernier, celui qui va sur la Lune !