« Pour faire le portrait d’un oiseau » selon Jean-Luc Mylayne

Publié le 12 mai 2011 par Erwan Pianezza

Jean-Luc Mylayne est un photographe français très discret dont le travail mérite qu’on s’y intéresse de plus près.  Il photographie principalement les oiseaux, mais son travail ne se réduit pas uniquement à celui d’un photographe animalier.  Chaque photographie est en fait une véritable composition, un tableau qui nécessite parfois plusieurs mois de préparations, de repérages, d’approche et d’observation.

© Jean-Luc Mylayne - No. 423 Janvier Fevrier Mars 2007

Le photographe commence par identifier son « sujet » dans son environnement naturel, repère son nid, ses trajectoires régulières, les points d’eau et de nourriture.  Les oiseaux photographiés sont des mésanges, des moineaux, des hirondelles, des merles, bref des oiseaux communs qu’on finit par ne plus voir tellement ils font « partie du paysage » de nos campagnes.  Il choisit ensuite un lieu et un cadrage précis, sélectionne l’éclairage selon le moment de la journée ou la saison, puis il attend.  A chaque fois, il s’agit donc d’un apprivoisement qui nécessite une patience infinie.  Autre détail technique qui a son importance, l’auteur n’utilise pas de téléobjectif mais un appareil photo traditionnel de moyen format ; les photos ne sont donc prises qu’à quelques dizaines de centimètres de distance.   Jean-Luc Mylayne retravaille également lui-même ses lentilles ce qui lui permet de créer des espaces flous à des endroits précis du cadre.  Le travail est donc très lent…et la prise est unique : à peine plus de 400 clichés en trente ans de travail.

Dès que l’on prend en compte le détail et la précision apportés à chaque prise de vue, on comprend  à quel point certaines photos représentent de véritables prouesses techniques, comme en témoigne cette hirondelle capturée en plein vol :

© Jean-Luc Mylayne - No. 4 Juin Julliet Aout 1979

A croire que le photographe applique à la lettre les conseils dispensés par Jacques Prévert dans « Pour faire le portrait d’un oiseau » :

[…] Parfois l'oiseau arrive vite
mais il peut aussi mettre de longues années
avant de se décider
Ne pas se décourager
attendre
attendre s'il le faut pendant des années
la vitesse ou la lenteur de l'arrivée de l'oiseau
n'ayant aucun rapport
avec la réussite du tableau
Quand l'oiseau arrive
s'il arrive
observer le plus profond silence
attendre que l'oiseau entre dans la cage
et quand il est entré
fermer doucement la porte avec le pinceau
puis
effacer un à un tous les barreaux
en ayant soin de ne toucher aucune des plumes de l'oiseau […]

A notre époque hyper-médiatisée, Jean-Luc Mylayne reste un cas à part dans la profession puisqu’il ne possède pas de site web, ne tiens pas de blog, et donne très peu d’interviews.  Néanmoins, il expose régulièrement à travers le monde et on pourra voir ses photos prochainement lors de la Biennale de Venise 2011 à partir du 4 Juin 2011.