On vous entend déjà râler. Un énième film de super-héros? Une histoire d’amour mièvre entre un musclor vicking et une belle astrophysicienne? Une avalanche d’effets spéciaux sans âme? Et bien … non. Contre toutes attentes, Thor, adaptation d’un comic book Marvel (tout comme Daredevil, Spiderman ou Hulk), mérite le déplacement. Kenneth Branagh, réalisateur fasciné par Shakespeare (Beaucoup de bruit pour rien, Peines d’amour perdues, Henry V), crée un univers visuel convaincant. De cette histoire de guerrier puissant (Chris Hemsworth) banni du royaume d’Asgard par son père (Anthony Hopkins), il tire un blockbuster en forme de tragédie grecque, nettement au-dessus de la moyenne. Rivalités fraternelles, relations père/fils, rapports humains et quart d’heure philosophique (sur la sagesse, l’humilité et le pouvoir) sont au programme d’un film qui réussit sur deux tableaux: le divertissement, et la prise de risques.
Déjà, il fallait oser ce casting ! De l’inconnu en tête d’affiche, jusqu’à l’embauche d’un réalisateur friand de théâtre et d’Histoire, le film prend le spectateur à contrepied. Pas étonnant donc que des acteurs de la trempe de Natalie Portman, Stellan Skarsgård ou Kat Dennings se soient lancés dans le projet. Il faut bien l’avouer: Thor n’est pas un blockbuster comme les autres. Plus mature (dans le traitement de son récit), plus soigné (esthétiquement, la reconstitution de ce royaume mi-futuriste, mi-moyenâgeux est impressionnante), et moins nunuche (comprendre: pas de happy end !), le film est la preuve qu’il y a encore pas mal de choses à offrir dans le genre. Confier ce type de projets à des cinéastes plus aguerris- à l’instar de Nolan pour The Dark Knight- semble être le choix le plus judicieux qui soit. Et, en attendant The Avengers de Joss Whedon (le papa de Buffy), Branagh hisse ici le super-héros dans une dimension plus humaine, touchante, voir même (lors de quelques instants de grâce), étonnamment intelligente. Vous auriez donc sacrément Thor de passer à côté.