Je suis née et j'ai grandit en Suisse, à Genève. Ce n'est que plus tard que je suis partie pour aller étudier au Canada, à Montréal en science politique, puis en cinéma. Mes rapports avec la Suisse sont d'abord familiaux. Ma mère est Suisse et mon père y vit depuis ... je ne sais même plus combien de temps tellement ça fait longtemp. Lui est né en Algérie, d'origine marocaine. La Suisse, c'est mon pays. Je dis maintenant (et ce n'est pas encore parfait comme définition identitaire) que je suis Suisse de père marocain-algérien. J'aimerais pouvoir y aller plus souvent, surtout pour passer du temps en famille, mais aussi pour travailler sur des projets créatifs avec des compatriotes. Un peu la même chose que j'ai fait en allant tourner Mokhtar au Maroc. Ça risque d'être le cas bientôt si l'un de mes projets se concrétise.
-Quel est le message que vous voulez passer avec Mokhtar et la superstition?
"Mokhtar" c'est d'abord parti du besoin de raconter une histoire vraie que j'ai entendue au Maroc pendant un voyage et qui ne m'a jamais quittée. En rentrant à Montréal, je me suis mise à l'écrire tout de suite, sans réfléchir à ce qu'allait être le message. Maintenant, je peux dire que ce qui m'a touchée dans cette histoire, c'est que je me suis mise à la place de l'enfant qui, en commettant cet acte, a perdu son innocence. À cause de quoi? À cause d'une croyance populaire, à cause de la peur de son père, à cause du milieu dans lequel il est né. Encore aujourd'hui certaines superstitions tuent et la peur qui les accompagne toujours peut, comme dans mon histoire, faire perdre les moyens du plus aimant des pères.
-Combien de temps vous avez mis pour réaliser votre court métrage?
Si je ne compte pas le temps passé à écrire et à financer le film, "Mokhtar" a été réalisé sur une période d'un an jusqu'à sa première mondiale au Festival international de Toronto. Nous avons mis un mois à chercher les acteurs non professionnels. C'est en sillonant les routes du Maroc, dans un marché de poissons, une école primaire ou une coopérative de femmes, que nous avons trouvé nos comédiens qui, en réalité, sont des paysans qui n'ont jamais joué devant une caméra. Le tournage a duré 5 jours dans le petit village de pêcheur d'Imsouane entre Agadir et Essaouira avec une équipe mixte de québécois et de marocains. Nous avons vécu là une expérience cultuelle et cinématographique qui restera toujours gravée dans le cœur de chacun. Le montage c'est fait à Montréal où j'ai eu la chance de travailler avec la monteuse de grand talent Hélène Girard qui m'a appris beaucoup sur le cinéma.
Quels sont vos projets ?
J'ai plusieurs projets aujourd'hui, mais je travaille surtout à l'écriture de mon premier long métrage. C'est un film qui s'inspire d'une expérience personnelle et qui se passe à Genève dans un contexte de printemps arabe. J'ai hâte d'être bientôt de retour à Genève pour une période de recherches et d'écriture.