Une première expérience très réussie (ICI) et l'attrait d'un menu dégustation plus conséquent et quelques étiquettes qui n'arrêtaient pas de me faire de l'oeil, il ne nous en fallait pas plus pour décider de retourner une deuxième fois sur Honfleur, d'autant plus que l'occasion nous y était également donnée de rencontrer quelques amis en goguette ou en pause entre deux services.
On ne change pas une équipe qui gagne et nous revoilà tranquillement et solidement installés au Sa Qua Na. Pour cette fois, qui je l'espèce secrètement ne sera pas la dernière - si la maladie pouvait nous laisser encore quelques mois de répit, nous avons choisi le menu-dégustation "vert olive", composé de neuf (petits) plats.
Mise en bouche avec une pascade aveyronnaise,
finement aromatisée à l'huile de truffe.
Lotte pochée au citron vert, livèche et coriandre
un bouillon clair à la noix de coco et huile de Combava
Subtil dosage du citron et du Combava, un soupçon de coco, juste pour adoucir le plat, cuisson millimétrée du poisson, influence nord-africaine du coriandre, subtilement bon !
Malheureusement, j'ai oublié de prendre une photo ...
Un lieu étuvé doucement aux algues, pommes de terre, laitue et huitres, sardines grillées et feuilles du moment.
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Jolie opposition entre la chair tendre et fine du lieu et celle plus 'tannique' et plus relevée, presque salée, de la sardine. Une touche iodée avec les algues. pas mal du tout !
Un filet de daurade juste cuit,
mousserons des prés, petits pois, olives, chorizo et jus de poulet
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Là encore, une cuisson d'une précision diabolique, l'aromaticité des olives, le croquant / craquant des mousserons et des pois, l'association avec le jus de volaille. Superbe, salivant, gourmand tout en respectant la finesse et l'aromaticité du poisson !
Une échine de porc "noir de Bigorre" rotie,
langoustine, sel et poivre, navets longs et piment
Complètement bluffé par cette viande, fumée et parfumée à souhait, fraîcheur presque anisée des navets, savamment relevés par une touche pimentée très mesurée.
Des asperges blanches et vertes,
carré de veau mariné au sel, fruits de la passion, radis et sauce hollandaise
Encore un accord sur le fil, jouant des contrastes, entre une sauce soyeuse et douce, une fine amertume des asperges, le croquant du radis et l'onctuosité du veau. Magnifique !
Un blanc poulet fermier rôti,
coco blanc et pak choï, jus d'épices, graines de céleri et kefir
(déjà bien entamé par le gourmand que je suis)
Tout simplement excellent dans la conception et sa simplicité. Tout est dit !
Je passe sur le plateau de fromages ...
Sur l'idée d'une tarte rhubarbe,
congolais, mousse chocolat blanc, rhubarbe confite et cardamome
Finesse, douceur exquise, épice douce, délicatement fumée, presque mentholée, finesse de la mousse, croquant et arômes coco du congolais (c'est un peu un pléonasme mais ...). Excellent !
Destination Maroc - 2011
Pomme / Mangue / Gingembre, citron, crème de pistache, miel et épices
Une véritable tuerie ! Gras élégant, doux, fin, exotique et complexité gustative. Sublime ce dessert, vraiment !
Passons maintenant aux choses sérieuses. Qu'avons nous bu avec ce sublime repas dégustation. Normand de naissance, mais bourguignon de coeur, il ne me fallut pas des heures de réflexion pour choisir trois flacons dans la carte des vins proposés.
Avec l'ensemble des entrées, jusqu'aux asperges, Chablis Grand Cru Valmur 2007, François Raveneau : très belle robe jaune claire, brillante. Un premier nez un peu sur la retenue et une sorte de réduction. Ensuite, on retrouve la minéralité chablisienne, mais d'une finesse et d'une élégance. Senteurs florales délicates, effluves citronnées mesurées. La bouche apparaît, malgré son extrème jeunesse, d'une belle maturité. Belle corpulence qui s'articule sur un soupçon de vanillé / glycériné, une belle proportion de citron et une minéralité d'une finesse et d'une subtilité extrêmes. Entrée en matière douce, fine, presque modeste, puis le vin se développe en bouche, pour finir sur une belle corpulence. Extrême persistance, toujours sur un registre frais, tendu, pur et élégant. Excellent.
Avec le blanc de poulet, Romanée-Saint-Vivant Grand Cru 2004, domaine de la Romanée-Conti : je dois confesser que je me suis fait un petit plaisir égoïste en choisissant cette bouteille, et le résultat fût très largement à la hauteur de mes espérances. A l'occasion, je remercie ceux qui ont guidé - directement ou indirectement (via l'Oliv) - mon choix (d'ailleurs, je ne fûs pas difficile à convaincre dans l'affaire). Que dire de ce vin. Certes, il est très jeune. Certes, 2004 n'est pas le millésime de référence en Bourgogne. Mais, il est des jours où l'on ne regrette pas d'être né. Ce samedi, c'était le cas (et le meilleur compliment vint de mon père qui, à la fin du repas, dit simplement : "tout était bon"). Bref, une robe rouge carmin assez claire, sur des reflets violines. Dès le premier nez, on est impressionné par la puissance et la finesse : cassis noir, fumé élégant, rose fanée, tout y est : profondeur, grâce, esprit cistercien ... En bouche, on retrouve cette composition tout en dentelle, une texture d'un velouté presque lisse, une charge tannique sans aspérité, un équilibre majestueux, une précision dans les saveurs ... qui se terminent par une finale d'une densité, d'une longueur et d'une noblesse folle, le tout tenu par une belle acidité.. Quelle émotion. Sublimement magnifique.
Avec les dessert, mais sans photo, nous avons opté pour le Poiré, cuvée Granit d'Eric Bordelet (je n'ai pas noté s'il y avait un millésime) : floralité intense, bouche légèrement perlante, sur un équilibre velouté, fruité et élégant. Bel accord sur la finesse avec les desserts.
Voilà, on a coutume de dire "jamais deux sans trois". Va savoir ! (tout du moins, espérons le !).
Bruno