Les rues devant la Maison Blanche à Washington sont noires de monde cette nuit. Des chants patriotiques sortant des poitrines de centaines d’américains sont diffusés sur certaines chaines de télévision. Osama Ben Laden est mort. L’homme le plus recherché du monde. Celui qui a changé pour toujours l’ambiance à bord des avions et dans les aéroports et qui a mis fin de manière dramatique à la sanctuarisation du territoire américain est mort.
Ben Laden avait longtemps défié les services de renseignement américains et ridiculisé la plus grande puissance du monde lancée dans une traque stérile contre l’ennemi public no1 des Etats-Unis. Ben Laden avait infligé aux Etats-Unis la plus terrible blessure de son histoire et institué la terreur aveugle comme tactique de combat, un matin de Septembre, où « la terre s’arrêta ».
L’opération de ce dimanche 1er mai marque un tournant dans l’histoire des Etats-Unis et des relations internationales. Il va renforcer les rapports entre les services américains, pakistanais, indiens qui se sont toujours méfiés les uns des autres. Elle va revigorer les services américains critiqués pour n’avoir pas prévu : la terrible attaque du 11 septembre, la crise financière de 2008, les révolutions arabes de cette année 2011, et bien d’autres événements qui avaient instillé le doute dans l’imaginaire de l’américain moyen sur l’efficacité du renseignement américain.
Mais c’est surtout une victoire pour le président américain dont les qualités de commandant en chef avaient été contestées par des adversaires qui hier encore doutaient de sa nationalité américaine. Ceci est une autre histoire mais qui compte dans la balance.
Le président Obama dans son discours de circonstance a su avoir le triomphe discret. Il a soigné ses mots en ne cherchant pas une victoire personnelle, en « déminant » l’information de toute charge religieuse, évitant toute idée de guerre de civilisation. Obama a affirmé dans son discours que Ben Laden n’était pas un leader musulman et que ses actions terroristes tuaient régulièrement des musulmans.
Nul ne sait si ce discours sera bien compris dans certaines contrées du Pakistan lointain ou le croissant arabe. Toujours est-il que le président Obama a voulu se présenter en leader de tous les américains qui ont communié dans la souffrance quelque soit leur religion.
En évitant cette nuit dernière du 1er mai la posture d’un cowboy trainant derrière son cheval le bandit recherché. Obama a montré un sens de leadership qui peut épargner au monde bien des déboires, tout en assumant que la justice a fait son chemin après une traque de dix ans.
Il reste au président américain de reprendre l’initiative dans son projet de refaire l’image des Etats-Unis, dans le monde musulman.
Un projet qui connait jusqu’ ici quelques ratés en raison même de la dynamique des rapports de force.
Quoiqu’ il en soit l’Histoire a connu en ce début de mai une accélération qui fera date dans les manuels.
Roody Edmé