Ciné : L'étrangère de Feo Aladag

Par Plumesolidaire

Un film absolument bouleversant dont la fin tragique m'a cloué sur mon fauteuil comme les autres spectateurs.

Une situation qui rappelle hélas, les tragédies familiales qui émaillent les actualités internationales.

J'ai dit

Plume Solidaire

♥♥♥♥♥   pire que top (trop rare)

♥      bof (pas de billet sur Plumeacide) 

♥♥   ah ouais quand même (bien)

♥♥♥   top (très bien)

♥♥♥♥♥   pire que top (trop rare)

♥♥♥♥♥♥   des comme ça y en a qu'un par siècle


L'ETRANGERE de Feo Aladag - Bande annonce - 2011 par Vernoris

  Source : mk2-3 couleurs

Par Juliette Reitzer



«Si seulement elle avait été un garçon », soupire un père de famille dans L’Étrangère, poignant premier long métrage de l’Autrichienne Feo Aladag. « Elle », c’est sa fille Umay, jeune maman d’origine turque, mariée en Turquie, qui vient de fuir un mari violent et espère trouver refuge chez ses parents en Allemagne, où elle a grandi. la phrase, et la naïveté avec laquelle elle est énoncée, font sourire ; elles révèlent pourtant un état de fait (l’inégalité toujours prégnante entre les sexes) en même temps qu’elles en soulignent le caractère inéluctable. « Les hommes jaugent souvent leur degré d’honneur en fonction du contrôle qu’ils exercent sur leurs femmes, leurs filles, leurs sœurs. La violence vient toujours d’une peur de perdre le contrôle, donc l’honneur », confie la réalisatrice qui vit et travaille à Berlin, qui rend cette violence sensible tout au long du film en exposant frontalement la vulnérabilité du corps (pris de force par un mari, violenté par un frère, enlacé par un fils). Pour tenter de s’émanciper de la pression familiale et communautaire, Umay devra fuir et renoncer à une partie de soi – déchirement affectif et physique qui préfigure celui, tragique, de la fin de l’histoire et porte la marque de l’intransigeance de la réalisatrice : « Le droit à la liberté et à choisir son mode de vie ne devrait pas être négociable. On a une voix en tant que femmes, il faut la faire entendre. »
 

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Source : abusdecine

Une poignante histoire de famille

L’histoire d’Umay est encore tristement d’actualité. Mariée à un despote misogyne, la jeune maman décide courageusement de fuir la Turquie avec son fils, pour retrouver son pays natal : l’Allemagne. Or une fois à Berlin, la jeune femme découvre à ses dépends qu’elle est à présent devenue une étrangère… pour sa famille. Elle est confrontée à une terrible évidence : ses parents qui l’ont toujours aimée, prennent le parti du gendre et se détachent d’elle au nom de l’honneur familial. Victime de traditions ancestrales qui placent l’homme au dessus de tout, Umay doit faire face à son père et à ses frères qui tentent à son insu de renvoyer le petit garçon à son père.


Avec « L’étrangère », Feo Aladag réalise ici un premier film brillamment abouti. Ancrée dans un réalisme sans équivoque, l’histoire va à l’essentiel. À aucun moment, la narration ne se complaît dans le mélodrame, alors que certains passages sont des plus bouleversants. Pour exemple, cette très belle scène où Umay habille son petit garçon pour assister au mariage de sa sœur, espérant que le temps d’une fête, tout soit encore comme avant. Nul besoin d’insister, de manière générale, les sentiments éprouvés à l’égard de la famille sont aussi mystérieux que puissants. Subtilement abordés, ils provoquent des transports d’émotion où même les plus réservés ont du mal à contenir leur larmes.


Actrice de formation, la réalisatrice concentre toute sa mise en scène sur le ressenti. Pointant sa caméra sur des vérités qui font frémir, elle part d’un début « heureux » pour gravir un à un les paliers de la violence. L’exercice est ardu, surtout que la majorité du film est tourné en langue turque. La réalisatrice ne se laisse pas piéger et laisse la part belle à son actrice Sibel Kekilli. Juste et sensible, cette dernière porte adroitement ce personnage tiraillé entre la nécessité de fuir pour se reconstruire et la peine de devoir accepter le reniement de sa famille alors si chère. Ensemble elles évitent les écueils pathétiques pour apporter dépouillement et sincérité à ce premier film grave et percutant.

Gaëlle Bouché