Il s'agit de la première manifestation d'ensemble consacrée à Manet en France depuis l’exposition de 1983 au Grand Palais. N’écoutant que mon courage, et désireux de vous faire le compte rendu de cette exposition, j’ai donc bravé la foule du musée d’Orsay. Pour celles et ceux qui souhaitent tenter leur chance je vous signale que, non seulement il y a une file d’attente pour rentrer dans le musée, mais qu’il y en a une autre à l’intérieur pour accéder à l’exposition, mais que ne ferais t’on pas pour ses lecteurs !
Edouard Manet (1832-1883) inspira le mouvement impressionniste, mais s’attacha toujours à préserver son indépendance. L’influence considérable qu’il exerça sur la peinture française et, plus généralement, sur l’art moderne s’explique à la fois par le choix de sujets tirés de la vie quotidienne, par l’utilisation de couleurs pures et par une technique rapide et libre.
Il étudie d’abord la peinture dans l’atelier de Thomas Couture puis multiplie les voyages à l’étranger en Hollande où il admire particulièrement l’œuvre de Frans Hals, et en Espagne où Vélasquez, et surtout Goya influencent beaucoup son propre travail.
Les premiers tableaux de Manet représentent essentiellement des scènes de genre, souvent d’inspiration espagnole, ainsi que des portraits. Au début de sa carrière il s’inspire de Gustave Courbet, sa technique picturale est franche et directe. En 1863 il expose son célèbre « Déjeuner sur l’herbe » au « Salon des refusés », nouveau lieu d’exposition inauguré par Napoléon III pour accueillir les œuvres rejetées au Salon officiel. La toile de Manet attira immédiatement l’attention du public, mais fut violemment attaquée par les critiques. Salué par de nombreux jeunes peintres qui reconnaissaient en lui leur chef de file, Manet se trouva au centre d’une dispute opposant les défenseurs de l’art académique aux artistes « refusés ». Les peintres impressionnistes Edgar Degas, Claude Monet, Auguste Renoir, Alfred Sisley, Camille Pissarro et Paul Cézanne, subirent l’influence de Manet mais, bien qu’étant leur ami, Manet ne se considéra jamais comme l’un d’entre eux. En 1864, le Salon officiel accepta deux de ses tableaux, et, en 1865, Manet y exposa Olympia (1863, musée d’Orsay, Paris), un nu dont le réalisme peu orthodoxe souleva des vagues de protestations au sein des cercles académiques. A sa mort il laissa plus de quatre cents peintures à l’huile, des pastels et de nombreuses aquarelles.
Le parcours de l’exposition nous montre d’abord l’apprentissage de Manet chez Thomas Couture, sa complicité avec le poète Stéphane Mallarmé qu’il a représenté ici. On arrive ensuite devant le fameux « Déjeuner sur l’herbe » où la présence d'une femme nue au milieu d'hommes habillés sans prétexte mythologique ou allégorique fut jugée obscène à l’époque. Manet s'en amusait d'ailleurs, surnommant son tableau "La partie carrée". Dans le cadre de l’imaginaire érotique du peintre on passe devant « La blonde aux seins nus ». Vient ensuite l’influence espagnole avec ce « Combat de taureau » et « Le balcon » inspiré des « femmes au balcon de Goya », Manet peint la vision d’une scène en pleine lumière quand les reliefs s’effacent. On découvre ensuite quelques portraits de Berthe Morisot une artiste qui rejoint le groupe des indépendants, futurs impressionnistes et fut l’épouse d’Eugène Manet, frère d’Edouard. Au passage j’ai bien aimé « La serveuse de bocks », image de la vie d’une brasserie prise sur le vif. On termine sur Manet et l’actualité de son époque, la guerre de sécession, l’expédition Française au Mexique et la Commune. Ce portrait de Clemenceau peint vers 1880 nous le montre, jeune député avant qu’il ne devienne ministre et « premier flic de France ».
Exposition « Manet inventeur du moderne » au musée d’Orsay jusqu’au 3 juillet 2011.