Marc Ferro dans RUE89
Avez-vous été beaucoup sollicité récemment, alors qu'on reparle, à tort ou à raison, de désobéissance civile ?
Non, mais j'ai été beaucoup sollicité sur la question des lois mémorielles, sur le musée de l'histoire de France, et l'identité française. Un historien ne peut être que contre les lois mémorielles : elles entachent sa liberté de recherche. On l'a vu avec le génocide arménien, avec la traite et l'esclavage, mais aussi avec les bienfaits de la colonisation, la loi Gayssot sur les juifs…
Je me suis dressé contre ces lois car ce sont des secteurs de l'Histoire qu'on ne peut plus approcher. Et la tâche s'étend, à la manière d'une peau de panthère. Bientôt on ne pourra plus parler des Albigeois si c'est atteindre le psychisme des descendants des Albigeois près de Béziers. Ou à Nice de l'OAS.
On a accusé à tort les historiens de s'approprier l'Histoire, c'est faux ! L'Assemblée nationale a un droit sur l'histoire du pays puisqu'elle représente la nation ; mais elle n'a pas à faire des lois sur le passé. Elle peut décider d'une fête des harkis… mais je ne suis pas obligé d'y aller !