A propos de Les couleurs de la montagne de Carlos César Arbeláez 3 out of 5 stars
A La Padrera, un petit village de la région d’Antioquia perdu au milieu de la Cordillère des Andes colombienne, Manuel et sa bande de copains ne vivent que pour leur amour du football. Lorsque Ernesto, son père, lui offre un ballon de football pour ses 9 ans, Manuel devient fou de joie. Mais dès le lendemain, Julian, le meilleur ami de Manuel, envoie le ballon dans un champ miné…
Pour un habitué des documentaires, Carlos César Arbeláez, avec Les couleurs de la montagne, signe un bien joli premier film de fiction.
Filmé à hauteur d’enfant, inspiré du propre aveu du réalisateur par Truffaut (L’argent de poche) et le cinéma iranien contemporain, Les couleurs de la montagne décrit l’histoire d’amitié entre plusieurs copains dont Manuel et Julian, deux enfants vivant dans la menace permanente et le conflit armé qui gangrènent depuis des décennies la Colombie. Cette lutte qui oppose l’armée à des guérilleros marxistes et des groupes paramilitaires d’extrême droite à la solde de grands propriétaires terriens est à la fois la toile de fond du film et au cœur des préoccupations des habitants de La Padrera.
Manuel et ses parents vivent dans la peur quotidienne d’être kidnappés et tués du fait qu’ils aient refusé de se rendre plusieurs fois aux réunions des guérilleros. La femme d’Ernesto a exhorté plusieurs fois son mari de quitter la région, ce qu’Ernesto a refusé courageusement. Cette ambiance de guerre civile latente, ce « contexte psychologique » d’angoisse des habitants, Carlos César Arbeláez les dépeint de manière assez sensible et réaliste. La peur d’Ernesto, éleveur et propriétaire terrien, est palpable. Elle s’est immiscée en lui depuis longtemps et ne le lâche plus, le faisant vivre dans la tension permanente comme ses voisins.
Difficile dans ce contexte de rester un enfant insouciant. Pourtant, Manuel continue avec sa bande de rêver comme les enfants de son âge. De football notamment. Manuel aime bien sa nouvelle maitresse. Il s’est lié d’amitié avec un enfant albinos et est devenu très proche de Julian, qui fait une tête de plus que lui. Même s’il sent intuitivement le danger se rapprocher, Manuel, un peu comme l’enfant de Miel de Semih Kaplanoglu, préfère s’évader, au sens propre comme par le rêve et faire pour sa maitresse des dessins des montagnes qui l’entourent.
Joué par des acteurs la plupart non-professionnels et qui s’en sortent très bien, Manuel (Hernān Ocampo) et Ernesto (Hernān Mendez) en tête, Les couleurs de la montagne est un premier film très prometteur. Où à la barbarie et à la tyrannie quotidiennes des guérilleros, des enfants opposent leurs fresques colorées. Acte suprême de résistance. Et de poésie…