Le projet de révision constitutionnelle prévoit d’inscrire dans la Constitution des lois cadres de programmation des finances publiques, d’une durée de trois ou cinq ans, qui fixeront le plafond du niveau des dépenses de l’État et de la Sécurité sociale. Serait également institué un “monopole fiscal” en vertu duquel, toute mesure touchant aux impôts et aux cotisations sociales ne pourrait être prise qu’en loi de finances (LDF) ou loi de financement de la Sécurité Sociale (LFSS). Ce verrouillage fiscal amputerait grandement les pouvoirs du Parlement historiquement fondés sur la capacité à lever l’impôt et le vote du budget de la Nation.
Le projet ne relève pas d’une idée saugrenue mais d’un copié-collé de l’obligation inscrite en 2009 dans la Constitution Allemande de ramener son déficit budgétaire à 0,35 % de son PIB. Une idée relancée par le “pacte de compétitivité” porté par Nicolas Sarkozy et Angela Merkel au niveau européen dernièrement. L’objectif avoué est de rassurer rapidement les marchés financiers sur la capacité de la France à maîtriser sa dette.
Le consensus n’est pas le fort de Nicolas Sarkozy qui voit surtout là l’occasion de créer un point de clivage avec la gauche qui ne veut pas d’une telle réforme qualifiée de “grotesque” par le PS. Autant dire que le projet est loin d’être adopté d’autant qu’il lui faudrait être approuvée par une majorité des 3/5éme des deux chambres réunies en Congrès.
Dans tous les cas de figure Nicolas Sarkozy sortira gagnant. Soit sa réforme passe ce qui constituerait une victoire personnelle et un gros pavé dans la cour du PS en cas de victoire en 2012 soit, la gauche bloque la réforme donnant ainsi l’image d’un refus démagogique de la réalité budgétaire.
La question de fond est de savoir si on peut imposer une gestion saine des comptes publics. C’est pourtant déjà le cas pour les collectivités territoriales. Une telle réforme mettrait la classe politique devant ses responsabilités en lui imposant une cohérence entre les discours et les actes.
Si la droite souhaite alléger les impôts, multiplier les niches fiscales elle devra réduire d’autant les interventions de la puissance publique et assumer ce choix devant les citoyens. A l’inverse si la gauche prône un interventionnisme public large avec des services publics forts, il lui faudra afficher le coût réel de ceux-ci par des impôts dimensionnés en conséquence. Dans les deux cas il s’agit de payer le prix réel des choses et ne pas le renvoyer sur les générations futures. Car, de la même façon que le surendettement est mauvais pour les ménages et aliène leur liberté, des déficits publics trop élevés obèrent l’avenir du pays.
Reste la question de la souveraineté nationale car le projet prévoit également d’inscrire dans la Constitution le fait d’adresser les programmes de stabilité budgétaire au Parlement avant leur transmission à Bruxelles.
En théorie, il ne s’agit pas d’une révolution puisqu’en application du pacte de stabilité et de croissance les États se sont engagés à ne pas avoir un déficit public supérieur à 3% de leur PIB. La crise financière a mis au grand jour le fait que ces dernières années cette règle n’est pas respectée. Peut-on pour autant instituer une solidarité financière entre Etats sans prévoir un minimum de contrôles sur l’équilibre des budgets nationaux ? Cigale ou fourmi, la France va devoir choisir.
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