La crise de 2008-2009 et ses suites : recul marqué de l’emploi et ralentissement des salaires, puis reprise en 2010
En 2009, le marché du travail connaît les plus fortes réductions d’emploi salarié observées depuis le début des années 1950 : 248.000 emplois sont perdus, la plupart au premier semestre. À la fin de l’année 2009, la situation se redresse et sur l’ensemble de l’année 2010, l’emploi marchand s’accroît de 125.000. L’intérim a été le premier secteur touché (-35 % en un an), et ce, dès le second trimestre 2008. Puis, courant 2009, il se stabilise et repart à la hausse. L’onde de choc s’est ensuite propagée vers les emplois stables. Et ce sont les formes d’emploi les plus flexibles qui sont à l’origine du redémarrage de l’emploi en 2010. Au regard de la chute de l’activité économique, ce repli de l’emploi se révèle, en fait, inférieur à ce que l’on aurait pu prévoir. Les jeunes et les hommes sont les plus touchés. Les seniors sont dans une situation paradoxale : leur taux de chômage augmente, mais leur taux d’emploi également. Cette dégradation dumarché du travail a pesé sur les évolutions de salaires, mais cet effet a été contrebalancé en 2009 par la faiblesse de l’inflation. Après une quasi-stabilité en 2008, le salaire moyen par tête augmente de 1,2 % en moyenne en 2009. En 2010, sa hausse devrait être également de 1,2 % en moyenne en euros constants.
Les évolutions de l’emploi et des salaires depuis 1990
Sur la période 1990-2008, l’emploi s’accroît de 13 %, progression tirée par celle de l’emploi salarié, privé comme public. La baisse des non-salariés de l’agriculture (-55%) et des salariés de l’industrie (-22%) est plus que compensée par les créations d’emplois salariés de certains services marchands (+65%) dont ceux auprès des particuliersemployeurs ou de la fonction publique territoriale (+56%). Ces évolutions se sont traduites par une croissance du poids des emplois les plus qualifiés mais aussi de celui des employés non qualifiés. Cette croissance de l’emploi a permis une augmentation de 3 points du taux d’emploi des 15-64 ans. Cette hausse a avant tout profité aux femmes. A contrario, le taux d’emploi des plus jeunes, les 15-24 ans, s’est réduit, reflétant la hausse de leur scolarisation. Cette évolution s’est accompagnée dans les années 1990 d’une croissance du poids des emplois temporaires et du temps partiel. Sur la période 1990-2008, la croissance des salaires nets moyens, +0,5% en moyenne annuelle et en euros constants, est avant tout portée par l’augmentation de la qualification du travail. Les salaires nets moyens des cadres et des ouvriers progressent au cours de cette période, alors que ceux des employés et des professions intermédiaires sont stables. En termes d’inégalités salariales, le constat est quelque peu différent. Ainsi, en termes de salaires offerts, l’écart relatif entre le 1er et le 9e décile se réduit de 1990 à 2008, notamment sous l’effet du dynamisme du Smic pour la période 1995-2005, tandis que le poids des salaires du dernier décile s’accroît.
L’adéquation entre spécialité de formation et emploi, et son impact sur les salaires
60% des actifs de 15 à 55 ans ont une spécialité de formation professionnellement ciblée. Parmi eux, seuls 40% ont un emploi en adéquation avec celle-ci et ce sont les titulaires de bac+2 et bac+5 qui sont le plus souvent en adéquation, à l’opposé des titulaires de baccalauréats professionnel ou technologique. L’adéquation entre spécialité de formation et domaine d’emploi a un impact positif sur le salaire, nettement moins important cependant que le niveau de diplôme. Cet impact est globalement plus fort pour les niveaux de diplômes élevés. L’adéquation est plus élevée pour les spécialités de la santé, de l’esthétique, de la formation pédagogie, du transport, de la finance et de l’informatique.
Les mobilités inter-entreprises choisies et contraintes
Sur la période 2003-2009, 53% des changements d’entreprise font suite à une démission, 33% à la fin d’un contrat à durée déterminée et 12% à un licenciement. Les mobilités consécutives à un licenciement sont 1,5 fois plus fréquentes dans les petites entreprises que dans celles de plus de 500 salariés. L’industrie est par ailleurs le secteur dans lequel les mobilités découlent le plus souvent d’un licenciement. La moitié des changements d’entreprise des démissionnaires sont liés à l’intérêt du travail, les motifs salariaux n’étant indiqués comme raison principale du changement que par une personne sur cinq. Dans leur nouvelle entreprise, les salariés qui étaient en fin de contrat à durée déterminée bénéficient d’une hausse du temps de travail et d’une progression salariale particulièrement importantes. Parmi les démissionnaires, ceux qui souhaitaient obtenir de meilleures conditions de travail ont en moyenne une revalorisation salariale plus faible mais obtiennent en contrepartie une diminution de leur temps de travail. On observe le contraire pour ceux qui ont justifié leur changement d’entreprise par des considérations principalement salariales.
Les effets des hausses du Smic sur les salaires mensuels dans les entreprises de 10 salariés ou plus de 2006 à 2009
Conséquence des négociations salariales de fin d’année, les plus fortes progressions salariales s’observent généralement au premier trimestre de l’année. Toutefois, jusqu’en 2009, les salaires proches du Smic augmentaient bien plus fortement au troisième trimestre de chaque année, juste après la revalorisation du Smic au 1er juillet. Une fois neutralisées la conjoncture et les caractéristiques des établissements, le salaire mensuel de base des postes rémunérés entre 1 et 1,1 Smic augmente en moyenne de 0,38 point de plus que celui des postes rémunérés au-delà de 3 Smic quand le Smic augmente de 1% d’un trimestre sur l’autre. La diffusion des hausses du Smic devient quasiment nulle au-delà de 2 fois le Smic. Les hausses du Smic se répercutent d’autant plus fortement et d’autant plus haut dans l’échelle des salaires que les branches conventionnelles couvrent un grand nombre de postes rémunérés au voisinage du Smic et que les minima salariaux des grilles conventionnelles de branche sont proches du Smic. La diffusion des hausses du Smic s’opère dans les deux trimestres suivant le relèvement. On constate par la suite une moindre progression des salaires mensuels du bas de la hiérarchie. À l’horizon d’un an, l’effet du Smic perdure sur les salaires initialement les plus proches du Smic à hauteur de 0,16 point.
Les transformations du paysage social européen de 2000 à 2009
En Europe, alors que la part dans la population en emploi des agriculteurs, des artisans et des commerçants diminue entre 2000 et 2009, celle des cadres et des professions intermédiaires augmente. Globalement, la part du groupe des ouvriers et des employés ne diminue que très légèrement mais les emplois se déplacent de la catégorie des ouvriers qualifiés vers celle des employés non qualifiés du commerce et des services directs aux particuliers. Le recul de l’industrie, l’essor des services à la personne, la poursuite de l’informatisation, l’extension de la fonction commerciale dans les entreprises et l’automatisation de la production sont autant de facteurs qui expliquent ces transformations du paysage social européen. Même si les structures socioprofessionnelles des grandes régions européennes ont tendance à s’uniformiser, les ouvriers de l’industrie prédominent dans les pays de l’Est, les professions des services sont très présentes dans les pays de l’Ouest et le travail indépendant reste une singularité forte des pays du Sud.