Larcenet © Dargaud - 2011
Souvenez-vous quand je présentais le premier tome de Blast :
« Prénom : Polza
Âge : 38 ans
Situation actuelle : a choisit d’être clochard « Pas SDF ! Clochard ! Le premier subit quand le second choisit ».
Antécédent professionnel : critique culinaire
Antécédents tout court : sept internements en hôpital psychiatrique durant les 6 dernières années, automutilations, comportement asocial, altération du jugement, état délirant, hallucinations, une dizaine d’arrestations, voie de fait, ébriété, outrage, stups, vol simple…
Signe particulier : Intelligent, il a de l’esprit et manie le verbe.
Polza est en garde-à-vue. Carole est, par sa faute, hospitalisée dans un état critique. Deux flics sont là pour l’écouter et avoir sa version des faits, « maintenant que vous l’avez serré, il faut le comprendre » invective le commissaire. Le souci c’est que Polza va avoir besoin de temps.
Posez-vous avec ce pavé de 220 pages, Polza se raconte… ».
Les ingrédients restent les mêmes dans ce second tome (second pavé de seulement 200 pages). La garde-à-vue se poursuit, le temps joue en défaveur des policiers qui se trouvent dans une situation délicate : recueillir un maximum d’éléments dans un laps de temps restreint.
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Manu Larcenet joue réellement avec les ambiguïtés de son personnage, à l’image du visuel de couverture : un clochard entouré de livres, avouez que cela a de quoi titiller nos représentations ! Étrange vision qui sort des clichés habituels.
Quoiqu’il en soit, j’ai vraiment apprécié cet album qui répond à mes attentes. Les pistes s’affinent, l’enquête se peaufine, le rythme est là et l’alternance passé/présent offre un bon équilibre entre la rigueur des policiers et les délires de Polza.
Au niveau graphique, on navigue bien. Passages muets ou plus loquaces, pleines pages pour contempler ou découpe des planches plus sèches (en cases) pour illustrer les temps d’enquête… il n’y a pas d’ennui, jamais de lassitude et beaucoup d’originalité dans la construction de l’album. Les longs monologues de Polza et la présence récurrente de ses « Blast », sorte d’excursions mentales dans un monde imaginaire où les lois du temps et de la pesanteur s’évanouissent au profit de la plénitude, ont un très bon rendu. Le travail de Larcenet est aboutit, on est aux premières loges pour profiter et ressentir ce sentiment de plénitude (accomplissement) décrit par Polza, je pense que l’utilisation de véritables dessins d’enfants sur ces passages y joue pour beaucoup (pas de codes particuliers, de la simplicité, il y a là quelque chose de naturel à ces états de transe). Enfin, de nouvelles touches de couleurs, plus structurées cette fois, font leur apparition et créent une troisième ambiance teintée d’ocres et de rouilles : celle des souvenirs d’enfance de Polza, sorte de mémoire corporelle et émotive, qui matérialisent tout un lot d’émotions et d’impressions non maitrisées/intellectualisées par Polza. J’aime beaucoup cette manière bestiale (car corporelle) de parler de son intimité, de son vécu. J’aime beaucoup cette grosse carcasse fragile et la manière qu’il a de refuser son besoin de reconnaissance et d’affection.
Une lecture que je partage avec Mango et les participants aux
Les entretiens : Manu Larcenet parle du tome 2 de Blast, entretien avec Manu Larcenet mis en ligne sur Bedeo.
J’ai partagé cette lecture avec Choco, je vous invite à découvrir son avis.
Écouter l’entretien avec Manu Larcenet diffusé le 29 avril 2011 sur France Inter.
EDIT : émission Un monde de Bulles du 6 mai 2011.
L’avis d’Yvan et de Sébastien Naeco.
Extraits :
« Vous êtes sans doute de ceux qui ne se soulent qu’à la communion du petit neveu ou au remariage de tata Jacqueline. Vous pensez qu’en émoussant vos sens ou votre illusion de contrôle, l’ivresse vous diminue. C’est une erreur. L’ivresse n’est pas un asservissement, c’est une libération. C’est le seul moyen de se connaitre sans se faire peur » (Blast, tome 2).
« Depuis toujours, pour ne pas ajouter l’odeur à l’outrage visuel, j’ai mis un point d’honneur à être rigoureusement propre. Deux douches par jour, hygiène buccale impeccable, savons parfumés, crèmes, déodorants. Comme vous sans doute. La vérité, c’est que, comme vous, je sentais l’employé du mois… Vous savez, ce relent putassier industriel qu’on trouve partout. Le métro, les administrations, les ascenseurs… L’odeur uniforme de la majorité » (Blast, tome 2).
« Avec une perception accrue et un étonnement bourgeois, je réalisai que, sûrement, le froid pouvait me tuer. Paradoxalement, j’en conçus une certaine joie. Si je risquais de mourir et que cette même éventualité m’effrayait un peu, ça voulait dire que j’existais encore » (Blast, tome 2).
Blast
Série en cours
Tome 2 : L’apocalypse selon Saint-Jacky
Editeur : Dargaud
Dessinateur / Scénariste : Manu Larcenet
Dépôt légal : avril 2011
Bulles bulles bulles…
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