Le cimetière du Père Lachaise, comme tout le monde sait, est plein de tombes très belles. Une des plus belles parmi celles-ci, est peut-être celle où repose le corps d’Oscar Wilde, un monument en forme d’ange moderniste sculpté par Jacob Epstein en 1909. Dans cette tombe reposent aussi depuis 1950 les cendres de Robert Ross, son exécuteur testamentaire littéraire, son premier amant masculin, son compagnon dans la chasse de beaux jeunes hommes dans les bazars de la nuit, son meilleur ami et sans doute une des personnes qui l’a le plus aimé.
Wilde est mort à Paris le 30 novembre 1900 et c’est Ross lui-même qui a payé les dettes laissés par Wilde et qui a récupéré les droits d’auteur pour ses fils Cyril et Vyvyan Holland. Enfants qui avaient perdu le nom de famille de Wilde suite à la chute de l’écrivain irlandais, (son nom a été effacé des théâtres, la publication de ses livres a été interdite, sa maison et toutes ses possessions ont été confisquées et saccagées, des banquets ont été organisés pour fêter sa condamnation) et qui ont adopté celui du nouveau mari de leur mère. Ross a aussi commandé le monument funéraire à Epstein bien que ses cendres n’y seraient déposées que trente ans plus tard.
Sur la très belle tombe, souvent truffée de marques de rouge à lèvre des admirateurs qui laissent leurs traces en hommage, on peut lire les vers de son dernier poème La Ballade de la geôle de Reading, écrit dans cette même prison où il a survécu pendant deux ans de travaux forcés pour le délit de ne pas éprouver de honte ou de laideur au fait d’être différent, irlandais, prosocialiste, immensément brillant et d’aimer les hommes. La même prison où il a écrit De Profundis, triomphe éminent du pouvoir de l’art même dans l’obscur abyme de la plus grande douleur et le plus insupportable malheur. Il y a été brutalement battu ce qui lui provoqua une infection à l’oreille, qui mal soignée et peut-être au contact d’autres maladies finirait par provoquer sa mort.
Ce son les vers du quatrième chant du poème qui disent :
Les larmes d’autrui empliront
L’urne brisée de la Pitié ;
Des réprouvés le pleureront ;
Toujours pleurent les réprouvés.
Wilde a passé ses dernier mois à Paris, dans ce que l’on pourrait appeler sa troisième et dernière époque parisienne. Mais Wilde n’était déjà plus Wilde et en accord avec la façon dont il se sentait il se faisait appeler Sébastien Melmoth en hommage au martyre de Saint Sébastien, un de ses tableaux préférés de Guido Reni et le classique du roman gothique de son grand oncle Charles Maturin, Melmoth the Wanderer.
Là il s’est employé entre autres à s’autodétruire implacablement, à se convertir esthétiquement au catholicisme et à mourir comme il avait vécu, très au dessus de ses moyens.
Paul Oilzum
Si tu visites le Père Lachaise lorsque tu loueras un des appartements à Paris tu pourrais peut-être te recueillir un instant sur sa tombe. Des fois il y à des touristes américains qui prennent des photos des jeunes qui fêtent des anniversaires sur cette tombe, avec du vin, des poèmes et des fleurs volées sur d’autres tombes avant d’être eux même frappé tragiquement par la vie. Et se relever pour une autre danse.
Traduit par: françoise