Après m’être attardé le temps de quelques articles sur l’histoire des parfumeurs de Guerlain, j’aimerais revenir aujourd’hui sur l’Histoire du parfum car Guerlain a directement contribué à la faire évoluer via l’invention du parfum à éléments de synthèse, à l’origine de la parfumerie moderne.
L’usage et le commerce du parfum étaient déjà courant dès les Sumériens. Les peuples antiques étaient de grand amateurs de parfums, et plus particulièrement les Egyptiens. C’était avant tout dans un cadre sacré (offrandes aux dieux, embaumement des corps) qu’il est utilisé, même si on lui connaît aussi des usages profanes.
Jusqu’à la fin du Moyen Âge, les techniques de fabrication restent rudimentaires: après être broyés, pilés, bouillis, les matières premières étaient imprégnées de matière grasse. Il s’agissait surtout d’écorce, de résines, de racines ou encore de matières animales, qui servaient de base ou de fixateurs. L’encens étaient très utilisé: produit d’abord à Oman, il a largement contribué à la création des royaumes d’Arabie. À titre d’exemple, l’encens est cité 118 fois dans la Bible, dont 113 dans l’Ancien Testament. Sont également cités à diverses reprises le cinnamome, l’acanthe, la myrrhe, le nard, l’aloès, le safran ou le roseau odorant.
Le commerce du parfum a forgé la fortune d’un certain nombre de ville phéniciennes et grecques. Chypre dictait la mode en matière de nouveaux parfums et recourait à des fleurs telles que la rose, l’iris, le lys ou le jasmin. Corinthe a la réputation d’avoir commercialisé les flacons de parfum (aryballes et alabastres sont les noms des jarres réservées à cet usage)
Les romains ont continué à utiliser les parfums mais n’ont pas particulièrement amélioré les techniques fabrication, mis à part le remplacement de la terre cuite par le verre pour la confection des flacons.Le Moyen Âge n’est pas connu pour son amour du parfum. On note toutefois une augmentation de sa consommation après les croisades sous la forme de boules de savon et d’eau de rose.
C’est à la fin du Moyen Âge et à la renaissance que se produit le grand bouleversement à travers deux innovations majeures: d’un part le perfectionnement de l’alambic avec un système de refroidissement facilitant la distillation; de l’autre la découverte de l’alcool éthylique, qui permet de donner au parfum un support autre que des huiles et des graisses. Premier exemple de ces changements: l’Eau de la Reine de Hongrie (XIVème siècle), à base de romarin et d’essence de térébenthine.
Le parfum acquiert alors ses lettres de noblesse en Occident. ses usages se multiplient et ses techniques se diversifient. il est utilisé parfumer les vêtements, en particulier les gants, le métier de parfumeur étant alors associé à celui de gantier. La ville de Grasse devient la capitale du parfum, on y met au point de nouvelles techniques permettant de mieux recueillir l’essence des fleurs fragiles. Au XVIIIe siècle, on parfume tout, depuis le corps jusqu’aux vêtements et aux divers accessoires, notamment les cuirs. Mais il faudra attendre encore un siècle pour voir apparaître le vaporisateur.
La dernière révolution a lieu à la fin du XIXe siècle, avec l’essor industriel et publicitaire dont les conséquences sont considérables : conditionnement fabriqué en série, apparition des grands magasins et surtout arrivée des premiers produits de synthèse , liés au développement de la chimie organique.
C’est Aimé Guerlain qui crée le premier parfum à éléments de synthèse en 1889. Il contient alors de la vanilline et de la coumarine. La parfumerie moderne est née.
Voici une sélection bibliographiques des essentiels (mais il en existe beaucoup d’autres) qui peuvent permettre d’appréhender l’univers de la parfumerie:
Le Parfum
Edmond ROUDNITSKA, Que sais-je ? n° 1888, Presses Universitaires de France, 1980
Le miasme et la jonquille
L’odorat et l’imaginaire social 18e-19e siècles
Alain CORBIN, Coll. historique, Aubier Montaigne, 1982
Le Parfum
Patrick Süskind
Roman (poche). Paru en 01/1988
Le Parfum
Des origines à nos jours
Annick LE GUERER, Odile Jacob, 2005