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Test de l’ultimatum

Publié le 01 mai 2011 par Copeau @Contrepoints

Les économistes adorent inventer des tests pour vérifier la rationalité des agents économiques.

L’un d’entre eux s’appelle le test de l’ultimatum et en voici les règles. Il se joue a deux joueurs. Le premier reçoit une somme d’argent, mais il doit en donner un pourcentage de son choix a un deuxième joueur. Si le deuxième joueur refuse cette proposition, personne ne touche rien. En bonne logique, le premier joueur devrait donner une toute petite partie de ce qu’il a reçu, en partant du principe que l’autre sera très content dans la mesure ou il vaut mieux avoir quelque chose que rien du tout. Cependant, dans la réalité il n’en est rien et le deuxième joueur refuse souvent l’offre s’il la juge « injuste ». De ce fait, la plupart des joueurs offrent au second joueur 50% de la somme totale, en partant du principe que cette offre ne sera refusée en aucun cas.

La raison pour laquelle je porte à l’attention des lecteurs ce petit test est que la Grèce et l’Allemagne sont exactement dans les termes de ce jeu, la seule différence étant qu’il ne faut pas attribuer des gains mais des pertes… Les Grecs (et les Irlandais et les Portugais et les Espagnols) ont encouru des pertes massives sur leurs obligations d’État et ils aimeraient bien les partager avec les allemands qui sont leurs créditeurs. Si les Grecs proposent de prendre la quasi totalité de la perte, les Allemands seront bien sur fort content mais il est évident que les Grecs seront bien incapables de rembourser leurs dettes. C’est la situation actuelle. Parallèlement, si la Grèce fait supporter une grosse partie de la perte a l’Allemagne et a la BCE en faisant faillite ou en sortant de l’euro, les Allemands seront très fâchés et pourraient couper toutes les lignes de crédit a la Grèce et tout le monde serait perdant. C’est la situation qu’il faut éviter a tout prix.

Test de l’ultimatum

(Dessin de presse : René Le Honzec)

Logiquement dans le jeu de l’ultimatum, les pertes devraient être reparties 50/50, mais malheureusement d’autre contraintes apparaissent immédiatement pour empêcher cet arrangement. Un « hair cut » de 50% s’il était appliqué a toute la dette des pays douteux en Europe, soit €2.000 milliards mettrait tout le système bancaire européen en faillite et de toute façon, les électeurs allemands ne veulent pas payer.

Une solution élégante a ce qui apparaît comme un problème insoluble pourrait être la suivante.

Il faudrait transformer les pertes que les banques devraient enregistrer si la dette grecque était valorisée à 50 cents par euro en crédit d’impôts et ces crédits d’impôts devraient être inclus dans le capital primaire des banques.

Faisons l’hypothèse d’une banque allemande qui détient 10 milliards de dette grecque valorisées a 100%. Si la Grèce renégocie sa dette à 50%, cette banque risque de se retrouver en faillite puisque ni Bâle II ou Bâle III ne prévoient de mettre la moindre capital en réserve pour une dette étatique et ne forcent pas non plus la banque à valoriser a la valeur du marché si la dette est inscrite dans le livre bancaire et non dans le livre de trading.

La solution que je propose est simple.

Cette banque allemande inscrirait à son bilan la dette grecque à 50 et en même temps pourrait ajouter a son capital un crédit d’impôts consenti par l’État allemand pour 50. En termes comptables, une dette de 100 serait remplacée par deux dettes l’une vis-à-vis de la Grèce, l’autre vis-à-vis de l’Allemagne. On pourrait imaginer que ces crédits d’impôts pourraient être vendus aux autres acteurs du secteur privé contre du cash, ce qui permettrait de recapitaliser les banques a peu de frais.

Bien sûr, une telle solution serait équivalente a une baisse des impôts consentie aux agents du secteur privé tant allemand qu’européen, mais au moins l’électeur allemand n’aurait pas l’impression qu’il paye pour les Grecs, mais qu’il sauve ses banques. Qui plus est, il me parait plus raisonnable dans les circonstances actuelles de baisser les impôts sur les Allemands que de les augmenter sur les Grecs. Certes, il s’agit d’une solution qui ne punit pas le pécheur et tout le monde va immédiatement hurler au risque moral qu’une telle solution ferait peser sur le système, mais en bon élève des jésuites, si je suis férocement contre le péché, je ne veux pas automatiquement la mort du pécheur.


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