A évoquer le soleil, on pense à sa lumière et sa chaleur qui embellissent nos journées et le monde autour de nous.
Longtemps le soleil a été considéré par les médecins uniquement comme un élément bénéfique pour la santé, tant physique que morale, avec en conséquence une éducation hygiéniste fondée sur les bienfaits des bains de soleil et du grand air. Aujourd'hui, ces notions demeurent fortement ancrées dans les esprits, avec en outre une recherche du bronzage en tant que critère esthétique essentiel, constituant pratiquement un impératif social.
Jusqu'au début du XXe siècle la peau diaphane était prisée, tandis qu'un peau hâlée était un signe distinctif des travailleurs au grand air des classes populaires. Puis, peu à peu, le bronzage est devenu à la mode, associé au développement des activités de loisir autrefois réservées aux plus aisés.
«Etre bronzé est un signe de bonne santé psychique, un attribut de la réussite et de l'aisance, l'habit d'un bonheur nouvellement conquis».(2)
Le soleil est essentiel à la vie, mais il ne faut pas oublier qu'il présente des dangers non négligeables.
Ses rayons ont des effets directs sur certaines molécules de la peau, à la fois bénéfiques et néfastes, à court terme mais aussi à long terme, sans que l'on s'en rende compte.
« Le coup de soleil, résultat d'une cascade d'événements aux échelles moléculaire, cellulaire et tissulaire, est aujourd'hui considéré comme assez représentatif de l'ensemble des conséquences de l'agression par les rayons UV. »(5)
Contrairement à ce qu'on a longtemps pensé, le bronzage ne constitue pas une protection. "C'est une cicatrice, pas un rempart". (Louis Dubertret, dermatologue)
De même, jusqu'à une période récente, on était persuadé que les rayons UVA ne présentaient pas de danger, alors qu'ils sont responsables d'une augmentation du risque de cancer de la peau, d'atteintes occulaires et d'un vieillissement cutané prématuré.
Les rayons UVB sont responsables des coups de soleil, tandis que les rayons UVA n'ont pas d'effet visible immédiat mais pénètrent la peau en profondeur. Les deux types de rayonnement ultraviolet présentent une augmentation du risque de cancer.
Depuis plusieurs années, les dermatologues tirent la sonnette d'alarme et dénoncent les dangers d'une exposition excessive au soleil et l'augmentation croissante des cancers de la peau.
Cependant, l'image positive du soleil demeure plus sûre et mieux fondée que les dangers qu'il recèle. Mais les campagnes sanitaires de prévention sont peu convaincantes face aux discours publicitaires des laboratoires pharmaceutiques et cosmétiques, ainsi qu'aux médias qui d'un côté signalent les risques liés au soleil, et d'un autre tiennent le bronzage comme un impératif esthétique.
En outre, l'industrie du bronzage attire dans les solariums de plus en plus de fidèles adeptes d'un teint bronzé tout au long de l'année. Mais croyant préparer leur peau au soleil, ils s'exposent au contraire à un risque multiplié de cancer de la peau.
On ne peut aujourd'hui nier les dangers des rayons UV artificiels, et il donc fortement déconseillé de s'y exposer dans un but esthétique. Et pourtant "l'industrie du bronzage nie en bloc tout lien entre bronzage artificiel et cancer de la peau, et avance l'argument qu'une déficience en vitamine D peut causer cancer et autres pathologies chroniques".(6)
Nous devons apprendre à conjuguer le plaisir qu'il nous apporte avec notre précieux capital santé, à profiter sans risque de ses bienfaits.
Le premier pas est de prendre conscience clairement que "si l'exposition au soleil entraîne le bronzage, elle peut aussi
engendrer le cancer de la peau", car le lien entre soleil et cancer est aujourd'hui largement démontré. (2)
Quelques précautions simples doivent être adoptées pour bien se protéger du soleil, en gardant à l'esprit que la crème solaire ne suffit pas. En effet les recherches ont montré les limites de cette dernière, et la protection solaire idéale qui prémunit de l'ensemble des dégâts du soleil reste à découvrir. Cependant, la suppression de l'exposition solaire n'est guère envisageable, aussi je vous présente ci-dessous quatre précautions à suivre pour y pallier.
Quand se protéger ?
A chaque fois que l'on se trouve exposé au soleil : au cours d'une balade ou d'une visite, à l'occasion d'un pique-nique, lors d'une activité sportive ou au travail, en ville comme à la mer ou à la montagne (en haute altitude d'ailleurs, les rayons sont plus intenses, car l'atmosphère protectrice est plus fine), et pas seulement quand on se dore sur la plage dans le but délibéré de bronzer.
Les 4 précautions essentielles :
1. Les heures où il faut éviter le soleil
Eviter de s'exposer au soleil au moment où il est le plus haut et émet les rayons les plus intenses et donc les plus dangereux, soit en France entre 12 et 16 heures en été. "La suppression de l'expositon directe reste la meilleure des protections lorsque le soleil est à son zénith". (5)
2. Rechercher l'ombre
Rechercher autant que possible les lieux ombragés, sans toutefois oublier l'effet de réverbération du soleil sur le sable, l'eau, le béton ou la neige, qui augmente l'intensité des rayons ultraviolets.
La protection vestimentaire est la plus sûre, stoppant au mieux les rayons UV. On se couvrira donc avec les vêtements, un chapeau à larges bords d'au moins 7 cm, et on portera des lunettes de soleil. Cette protection sera complétée par l'application d'une crème solaire sur les parties découvertes.
De nouvelles fibres et traitements spécifiques des textiles en augmentent encore la capacité protectrice.
Mais il est évident que cette forme de protection "est loin de satisfaire les aspirations et les activités en termes de loisirs."(5)
4. Bien utiliser une crème solaire
L'utilisation d'une crème solaire est primordiale, mais elle doit cependant être considérée comme un complément aux autres formes de protection, pour protéger les zones découvertes du corps, car même la plus efficace ne filtre pas la totalité des ultraviolets. "L'écran total n'existe pas". Elle ne doit en aucun cas inciter à s'exposer plus longtemps. (3)
Pour tous ceux qui sont en quête d'un beau bronzage, la crème solaire n'est pas considérée comme un moyen de limiter les effets néfastes du soleil, mais constitue une manière de le rendre inoffensif, autorisant à s'exposer directement au soleil et à bronzer sans crainte. Mais c'est faux.
Le produit solaire le plus performant sera efficace seulement s'il est correctement utilisé. Il faut également savoir que l'indice de protection UVA est toujours inférieur à l'indice UVB. La protection contre les UVB permet d'éviter le coup de soleil, mais elle supprime de ce fait le signal d'alarme qu'il constitue. On perd ainsi "la notion de danger des expositions alors que les lésions non directement visibles se constituent à bas bruit", ce qui incite à prolonger l'exposition au soleil, accentuant ainsi les effets des rayons UVA et UVB. (5)
Il faut appliquer une couche suffisante de produit et l'étaler uniformément sur toutes les parties du corps qui ne sont pas couvertes par les vêtements, sans oublier les oreilles, la nuque, les mains et les pieds. Choisir de préférence une crème pour le visage, et un lait pour le corps. En renouveler régulièrement l'application en fonction des indications du fabricants, car son efficacité diminue avec la transpiration, les baignades, l'activité physique, et simplement avec les heures qui passent.
Le choix de la crème se fera en fonction de la sensibilité de la peau de chacun.
Christophe Bédane, dermatologue et cancérologue explique dans son livre "Photodermatologie" (5) que des études ont montré que les utilisateurs adaptent automatiquement la quantité de produit appliquée à l'objectif d'être bronzé selon le niveau de protection de la crème solaire. C'est-à-dire que plus le FPS (*) est élevé, et moins la quantité de produit utilisée est suffisante, ce qui équivaut à une crème de protection beaucoup plus faible. "Ne paraît-il pas plus logique de se rapprocher en usage au mieux de la quantité qui a servi à qualifier le produit en termes d'efficacité supposée", quand on sait que "l'usage de FPS 12 est fait de manière plus pertinente que celui de SPF 40" ?
Pour une peau "normale", une protection de FPS 40 n'est justifiée que pour protéger du risque d'un coup de soleil intense, déclenché par une exposition lumineuse particulièrement riche en rayons UV, ce qui est le cas en haute altitude, surtout quand il y a de la neige.
Pour les peaux les plus sensibles au soleil, la protection vestimentaire et la suppression des expositions solaires doivent être privilégiées, plutôt que l'utilisation des crèmes solaires de FPS élevé. Ces dernières seront conseillées pour les situations où les deux autres mesures ne sont pas possibles.
Christophe Bédane propose une classification simplifiée des produits solaires, en tenant compte de la photosensibilité individuelle (classification de Fitzpatrick de 1995 **) et l'intensité du rayonnement UV :
- Photoprotection minimale jusqu'à FPS 12.
- Photoprotection moyenne pour un FPS de 15 à 25 (à partir de 15, le produit filtre les UVA).
- Photoprotection élevée à partir d'un FPS de 25 avec photostabilité et résistance à l'eau.
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Photoprotection extrême pour un FPS de 50 et plus pour toutes les conditions extrêmes, y compris les pathologies
solaire.
* FPS : facteur de protection solaire remplaçant l'ancien IP (indice de protection)
** La classification de Fitzpatrick classe notre type de peau selon sa couleur et sa facilité de bronzage :
Type 1 - Peau blanche, très sensible. Brûle systématiquement, ne bronze jamais.
Type 2 - Peau blanche, très sensible. Brûle systématiquement, bronze parfois mais peu.
Type 3 - Peau blanche, sensible. Peu de coup de soleil, bronzage léger et uniforme.
Type 4 - Peau mate, modérément sensible. Peu de coups de soleil, bronze facilement.
Type 5 - Peau mate. Ne brûle pas, bronzage facile.
Type 6 - Peau noire, insensible. Aucun coup de soleil.
Sources :
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« Soleil et peaux : bénéfices, risques et prévention », collectif, 2002, Edition Masson
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« Les représentations associées au soleil et au bronzage : analyse sociologique », par Anne Gotman, sociologue et directrice de recherche au CNRS, juin 2007
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Recommandations de l'Institut National du Cancer
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La peau redécouverte, V. Olivier, L'Express, 16/08/2001
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Photodermatologie, par Christophe Bédane, cancérologue et dermatologue au CHU de Limoges (2008)
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The Lancet (Online February 15, 2011) Blog actualités Scientifiques-Médicales
Pour en savoir plus, lire les recommandations de l'Afssaps.