Suisse - Au royaume des livres,les aveugles aussi sont rois

Par Benard

Cécile Denayrouse | 29.04.2011 | 23:59

Chaque mois de mai, c’est la même histoire. Les Genevois affluent en masse au Salon du livre, ce grand supermarché de la culture où tout est pensé pour titiller le portefeuille. Tous les Genevois? Non! Un petit groupe d’irréductibles lecteurs résiste encore et toujours à l’envahisseur. Et pour cause: leur truc à eux, c’est le braille ou la lecture audio, faute de rétine opérationnelle. Des produits inconnus à Palexpo.

A en croire les statistiques, les aveugles et les malvoyants mériteraient pourtant toute leur place à la grande fête du bouquin: ils dévorent près de 30 ouvrages en moyenne par an, là où le lecteur lambda en avoue 4 ou 5 tout au plus. Légitimes donc. «Nous tenions auparavant un stand au Salon, explique Anne Pillet, directrice de la Bibliothèque braille romande et livre parlé(ndlr: la BBR pour les intimes), mais cela nous demandait beaucoup d’énergie pour finalement peu de retombées.»

Car le lecteur aveugle fait plutôt dans la discrétion et se déplace peu. En réalité, son univers littéraire commence et se termine à la BBR, à la place du Bourg-de-Four. Une petite bibliothèque qui n’est pas un temple de la lecture comme les autres. Certes, on y trouve les traditionnels rayonnages de livres, le même silence studieux. Sauf qu’ici, pas le moindre porteur de canne blanche à l’horizon. Explication? «Les livres en braille sont bien plus lourds que leurs homologues traditionnels, sourit la maîtresse des lieux. Il faut savoir qu’un texte imprimé sur une seule feuille A4 équivaut à 4 pages A4 de braille.» Beaucoup plus compliqué à transporter, surtout pour quelqu’un qui n’y voit goutte.

Mais si le boulimique de mots ne vient pas au livre, le livre vient à lui: l’abonné reçoit gratuitement par la poste les ouvrages demandés. Chouchouté l’abonné, puisque ses livres tactiles peuvent être imprimés «à la demande», directement sur place grâce à une machine spéciale. Chaque parution nécessite plusieurs relectures scrupuleuses. «Nous essayons de répondre en priorité aux demandes d’étudiants. Ils peuvent espérer recevoir ce qu’ils souhaitent en un mois. Pour les autres, tout dépend du travail des bénévoles.»

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