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Opération épervier: Le procès du colonel Etondè Ekoto dans l'impasse

Publié le 29 avril 2011 par 237online @237online

Écrit par Mutations   

Vendredi, 29 Avril 2011 17:31

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Opération épervier: Le procès du colonel Etondè Ekoto dans l'impasse
Depuis la dernière audience du 15 mars 2011, le procès Etonde Ekoto s'embourbe. Aucune date n'a été fixée pour la prochaine audience.Suffisant pour que le conseil de l'ancien Pca du Port autonome de Douala (Pad) et même certains avocats au barreau du Cameroun crient à la «violation des droits de la défense» et de la «violation du nouveau code de procédure pénale».L'opinion se bute ainsi à un mur d'interrogations dans une affaire qui semble avoir emprunté un obscur labyrinthe.

C'est un article de presse qui déclenche la procédure. Dans son édition du 21 décembre 2006, le Journal Satellite n°179 fait des «révélations sur les détournements» de l'ancien délégué du gouvernement auprès de la Communauté urbaine de Douala. Une semaine plus tard, le Procureur Général près la Cour d'appel du Littoral a, par correspondance datée du 29 décembre 2006, assortie de la photocopie de l'article accusateur, ordonné au Colonel de la Légion de gendarmerie du Littoral, d'ouvrir une enquête sur les faits de détournements de deniers publics, de délits d'initiés et de corruption, relatés par ce journal et susceptibles d'être imputées à Edouard Etonde Ekoto. Ce dernier avait quitté ses fonctions trois mois plus tôt en septembre 2006. L'instruction est assurée par le Juge d'Instruction n°2 près le Tribunal de grande instance du Wouri.

Au terme d'une enquête préliminaire d'un an durant laquelle la plupart des éléments sont essentiellement constitués d'auditions, le juge d'instruction du Tribunal de Grande Instance (Tgi) de Douala a rendu le 07 janvier 2008 une ordonnance à fin d'informer et ouvert une information judiciaire à l'encontre de l'ancien délégué du gouvernement et autres.

Par ordonnance en date du 09 janvier 2008, Edouard Nathanaël Etonde Ekoto est inculpé et placé en détention provisoire au titre de cette affaire. Edouard Etonde Ekoto et ses co-accusés sont poursuivis de coaction de détournement de la somme de 5 millions Fcfa ; de la somme de 2.5 milliards Fcfa ; et de la somme de 2.574 milliards Fcfa. Etondè Ekoto, Mayinga Jacques et Djem Jean sont aussi poursuivis pour coaction de détournement de la somme de 320 millions Fcfa.
La 1ère audience s'ouvre le 14 juillet 2009. Aux termes de l'ordonnance de renvoi qui fixe les limites du litige, Etonde Ekoto est renvoyé devant le tribunal de céans, pour y être jugé de détournement de diverses sommes au titre du capital de la société Cud Finance, des causes du crédit relais à l'emprunt obligataire émis par la Cud, ainsi que sur l'objet même de l'emprunt et des paiements faits à la société Cradem.

Interférence
Alors que l'examen de ce premier volet était en cours devant les juridictions, une nouvelle affaire Etonde Ekoto s'ouvre au même Tgi de Douala. Un réquisitoire introductif d'instance daté du 09 avril 2009 procédait à l'ouverture d'une deuxième information judiciaire à l'encontre d'Edouard Nathanaël Etonde Ekotto et autres. Ils sont poursuivis pour détournement de deniers publics, déclaration frauduleuse de souscription de titres et fausses informations sur le marché des valeurs mobilières.

Cette nouvelle instruction est confiée cette fois au Cabinet d'instruction n° 6. Suffisant pour sortir de leur gong les conseils de l'ancien délégué du gouvernement. «M. Etonde Ekoto a, en pure perte, tenté de faire valoir que le principe non bis in idem s'opposait à ce qu'une deuxième procédure soit ouverte sur les mêmes faits. L'instruction s'est donc poursuivie, avec la volonté de renvoyer Monsieur Etonde Ekoto devant le tribunal de grande instance», soutient Me Claude Assira qui assure la défense du colonel à la retraite aux côtés de Me Albert Nguend Dime et Me Dieudonné Happi, avocats au Barreau du Cameroun.

A ce niveau, une grosse curiosité va naitre. Il y a une interférence sur les deux procédures. La première date de la nouvelle procédure a été fixée au 26 janvier 2011, c'est-à-dire le même jour que la date à laquelle était renvoyée la procédure précédente émanant du juge d'instruction n°2 en l'occurrence le juge Atangana Mbazoa. Me Claude Assira soutient qu'à ce niveau, il se pose deux problèmes pratiques : « Le premier était consécutif à la manière dont les deux procédures devaient être menées, compte tenu du fait que la 1ère était arrivée au stade du réquisitoire intermédiaire. Le second était consécutif au changement de la collégialité, puisque sur les trois membres ayant eu à connaître jusque-là de la première procédure, seul un seul se retrouvait dans la composition du collège des magistrats juges ». Pour résoudre le premier problème, Il a été retenu l'option d'une jonction des deux procédures. Pour résoudre le second problème (le changement de collégialité), Il a été décidé une reprise à zéro. Et ce, pour faciliter «une meilleure appréhension de toutes les subtilités de la cause», indique Me Assira.

Dès lors, à l'occasion de l'audience du 7 mars 2011, les parties ont été autorisées à refaire leurs observations préliminaires sur les difficultés procédurales. A l'issue de ces exposés, l'affaire a été mise en délibéré, pour jugement avant-dire-droit (Add) rendu le 15 mars 2011. Audience au cours de laquelle toutes les exceptions formulées par la défense ont été rejetées. L'affaire est renvoyée à l'audience du 29 mars 2011 pour «exécution de l'Add». Cependant, le 25 mars 2011, un des accusés, Mayinga Jacques en l'occurrence, a exercé son droit d'appel.

Cul-de-sac
Un coup de théâtre intervient les jours qui suivent. «À la stupéfaction générale, la formation collégiale a décidé de façon unilatérale et occulte ne pas tenir l'audience du 29 mars 2011 ! Prétextant l'effet dévolutif de l'appel (un des co-accusés d'Etonde Ekoto a fait appel le 25 mars 2011), le tribunal ne serait plus saisi...!», s'indigne Me Assira.
Pour les conseils d'Edouard Etonde Ekoto, «cette situation est d'autant plus inacceptable qu'aucun délai d'examen des recours (appel effectif et pourvoi éventuel) n'est prévisible ; on rappellera qu'aucun des griefs allégués à l'encontre de M. Etonde Ekoto n'a été établi, d'une manière ou d'une autre». L'audience du 29 mars 2011 n'a pas eu lieu. L'affaire est donc renvoyée sine die. Plus de trois ans après le début de la procédure et près de deux ans après le début de la phase de jugement, il n'y a aucune date de jugement. C'est l'impasse.

A en croire le conseil d'Etonde Ekoto qui cite deux articles de loi, le renvoi d'audience sine die est contraire au nouveau Code de procédure pénale. « Attendu qu'aux termes de l'article 344 (1) Cpp, «le renvoi prononcé en présence des parties qui ont comparu vaut notification du renvoi et de la date de la prochaine audience», rappelle Me Assira qui ajoute : «Aux termes de l'article 343 du Code de procédure pénale, ''le tribunal ne peut renvoyer une affaire sine die sous peine de poursuites disciplinaires contre le magistrat auteur du renvoi''. Il résulte de la combinaison de ces deux textes que l'audience du 29 mars 2011 aurait dû se tenir puisque c'est cette date-là qui a été arrêtée et notifiée aux parties lors de l'audience précédente du 15 mars 2011», soutient-il.

Et le conseil d'Etonde Ekoto de conclure : «En décidant unilatéralement de ne pas tenir l'audience, le tribunal a pris une décision occulte et clandestine. Cette décision occulte a pour conséquence de placer les parties dans une situation proscrite par le code de procédure pénale, et notamment l'article 343, c'est-à-dire, sans connaissance de la date de la prochaine audience (interdiction des renvois sine die)», déplore Me Assira qui ont saisi le 30 mars 2011 la madame le Président du tribunal de grande instance du Wouri d'ordonner la reprise des audiences.
En attendant, le Colonel Edouard Nathanaël Etonde Ekoto et ses co-accusés, apprend-on, se trouvent dans l'ignorance totale de la date de la prochaine audience. «Souhaitant pouvoir être jugés dans des délais moins éloignés que ceux déjà subis à ce jour, ils ont renoncé à faire appel», soutient le conseil d'Etonde Ekoto.

Repères historiques
29 juin 1937 : Naissance à Douala
2007 : Début de la procédure de l'affaire Port autonome de Douala (Pad) au Tribunal de grande instance du Wouri (Tgi). Etondé Ekoto y est poursuivi pour le détournement présumé de 900 millions F.
12-13 décembre 2007 : Edouard Etonde Ekoto est condamné par le Tgi à 10 ans de prison ferme. Il est incarcéré à la Prison centrale de New-Bell (Douala)
07 Janvier 2008 : ouverture du dossier CUD FINANCE SA.
09 Janvier 2008 : Mandat de détention provisoire par le juge d'instruction n°2 du TGI de Douala
Novembre 2008 : une expertise est ordonnée
09 avril 2009 : Le même Tgi du Wouri ouvre une autre procédure judiciaire sur la même cause, alors que l'examen de la première est toujours en cours devant la juridiction.
11 juin 2009 : Edouard Etonde Ekoto qui avait fait appel des 10 ans écopés au Tgi voit sa peine aggravée à 15 ans. Ce qui conduit le conseil d'Edouard Colonel à saisir la cour Suprême.

30 juin 2009 : ordonnance de renvoi par le JI n° 2 devant le TGI statuant en matière criminelle
14 juillet 2009 : début du procès de la première instruction CUD Finance effectuée par le JI n°2
Janvier 2010 : A l'audience, Edouard Etonde demande que Fritz Ntoné Ntoné, l'actuel délégué du gouvernement de Douala soit convoqué à la barre «afin qu'il dise au tribunal ce qu'il me reproche exactement». 16 mois plus tard, cette doléance n'est toujours pas exaucée.
Août 2010 : interruption du procès suite à l'incident provoqué par les conseils qui quittent la salle d'audience, estimant que le tribunal est impartial
26 Janvier 2011 : 1ère audience de la 2ème instruction CUD FINANCE SA confiée au JI n°6. Une nouvelle composition de la formation collégiale est désignée avec deux nouveaux magistrats sur trois dont un nouveau président.
15 mars 2011 : La nouvelle composition du tribunal ordonne la jonction des procédures issues des deux instructions croisées sur le même dossier CUD FINANCE SA. Elle rend un jugement avant-dire droit qui rejette toutes les demandes des accusés et renvoie les causes au 29 mars 2011 pour exécution du jugement avant-dire droit.
29 mars 2011 : L'audience de l'affaire Cud Finance annoncée le 15 mars 2011 n'a finalement pas eu lieu. Il s'agit d'un renvoi sine die.
31 mars 2011 : Lettre de protestation adressée à Madame la Présidente du Tribunal de Grande Instance du Littoral. A ce jour, aucune suite n'a été accordée à cette correspondance.


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