depassouline
CeJournalest une leçon de liberté qu’il s’agisse du ton, du style, des idées. Jamais à la pose, bien qu’il ait toujours été son principal sujet, il s’y saisit lui même dans le vif de l’instant, empoigne ses sensations et nous les offre en partage, dans son intimité et peu lui chaut qu’une certaine désinvolture émerge de ce chaos. Fidèle à son principe, il ne corrige pas les répétitions, les redondances, les erreurs, les contradictions, les lieux communs et le galimatias. Il ne s’embarrasse pas non plus d’être compris par ceux qui n’entendent rien aux langues étrangères, et truffe allègrement ses phrases de mots anglais ou italiens sans se soucier de les traduire ; Jean Goldzink, auteur d’une étude sur Stendhal en Italie, parle même d’ « un sabir franglais et crypté ». C’est direct et cru, notamment lorsqu’il évoque l’amour (le sujet de sa vie), les femmes qu’il a aimées, caressées, branlées, enfilées. L’intérêt est forcément inégal pour tout lecteur de bonne foi (ce qui exclut les stendhalonâtres) ; ce n’est pas là que l’historien fera son miel d’observations originales sur l’Europe agitée, celle ci n’étant que le théâtre de sa conquête des femmes ; mais l’ensemble dégage un parfum si enivrant, au plus près de la sensibilité de l’artiste, que sa sincérité désarme, serait-il roué en bien des circonstances.
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