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Alex Beaupain - L’entretien

Publié le 29 avril 2011 par Chroniquemusicale @chronikmusicale

Alex Beaupain“Je n’arrive pas à écrire des chansons joyeuses”

Vous sortez aujourd’hui votre 3ème album (hors musiques de film), comment l’avez-vous composé? Vous avez travaillé seul?

J’ai écrit quasiment toutes les chansons de l’album, il y a juste 4 musiques sur lesquelles c’est d’autres compositeurs. Je suis très jaloux de mes textes en fait, j’aime bien que les textes ce soit tout moi. Par contre pour les musiques, quand je repère une musique de quelqu’un que je connais et que je trouve bien, j’aime bien lui piquer.
Donc là j’en ai piqué quatre en l’occurrence.

Sinon mon truc c’est d’écrire des chansons quand j’ai envie. Donc je ne me suis pas mis à un moment donné pendant un mois à table en me disant « allez il faut écrire des chansons ». Je les ai écrites au fur et à mesure, comme ça, sur une période disons, de six mois ou peut être un peu plus, jusqu’à en avoir une vingtaine, pour en garder onze qui sont celles de l’album.

On entend une véritable insertion de l’électronique dans cet album. Comment et pourquoi avoir pris cette orientation?

J’étais beaucoup dans mes deux premiers albums sur des chansons qui étaient des ballades, des chansons un peu mid-tempo, j’avais envie là qu’avec des programmations, des éléments électroniques on ait un album plus rythmé, plus dansant presque.

C’est là que j’ai eu la bonne idée de contacter quelqu’un qui s’appelle Jean-Philippe Verdin, le réalisateur de l’album, avec qui on a beaucoup parlé de ça : Comment pouvait-on en France aujourd’hui faire de la chanson avec des éléments électro ?
Le seul truc qui m’ait dit, et là je me suis dit « c’est lui qui me faut », c’est qu’il voulait éviter qu’en entendant les chansons on ait l’impression que ce soit des remix de chansons, que l’arrangement n’aille pas à la chanson.

Lui a réussi à apporter cette touche d’électro sans qu’on ait l’impression que ce ne soit plus de la chanson. Cela reste de la chanson format pop, batterie, piano, claviers etc… mais par des synthés, par des choses, par des programmations je trouve qu’il réussit à apporter cette petite touche plus synthétique.

Voilà, l’album est plus synthétique que mes précédents albums qui étaient sans doute plus acoustiques en fait.

Je l’avais vu sur la Nouvelle Star, elle ne m’avait pas forcément plus intéressé que ça.
C’est vraiment quand son premier album est sorti et que j’ai entendu quelques chansons de cet album que je me suis dit « humm, ça c’est vraiment intéressant ». J’avais pas forcément l’idée à ce moment-là de faire quoi que ce soit avec elle.

La chanson que je chante avec elle Avant La Haine est une chanson qui était déjà présente dans un film de Christophe Honoré qui s’appelle Dans Paris, qu’il m’avait piqué à l’époque pour la mettre dans son film. Je voulais depuis assez longtemps faire ma version, parce que c’était des acteurs qui chantaient.

Puis j’ai lu des interviews de Camélia dans lesquelles elle disait qu’elle aimait beaucoup les films de Christophe Honoré et particulièrement Dans Paris. Là je me suis dit « tiens c’est rigolo quand même, elle aime vachement ça, ya un truc un peu légitime d’aller lui demander ». A une soirée pour le lancement d’un magazine de chansons, qui s’appelle Serge, on m’a proposé de reprendre cette chanson avec elle. A partir du moment où elle a commencé à chanter cette chanson, je me suis dit « là c’est intéressant parce qu’elle apporte à la chanson autre chose ». Si c’est pour refaire exactement la même chose que faisaient Romain Duris et Joana Preiss dans le film de Christophe c’est nul. Il faut que la version m’appartienne et que ce soit autre chose. Camélia a, au contraire de Joana qui la chantait dans le film, une voix très rock, très forte, elle est vraiment dans le truc d’une voix très affirmée, plus que Joana qui avait une voix éthérée comme ça.
Je trouvais ça rigolo, car cela permettait que quelque part elle prenne le rôle de la force et que moi je sois plutôt dans le rôle de la douceur. D’inverser un peu les rapports traditionnels dans les duos qu’on a entre garçons et filles. Garçons, Marc Lavoine avec une voix comme ça de mec et la fille qui chante tout éthérée. Là ce que je trouvais rigolo c’était que ce soit elle qui prenne le pouvoir.

Avant la haine -Version R. Duris & J. Preiss

Avant la haine - Version A. Beaupain & C. Jordana

Vos chansons sont toujours graves, presque désabusées (sur le couple, sur la politique). Vous avez un regard pessimiste sur la vie?

Par tempérament je suis peut-être un peu mélancolique disons et surtout j’ai un truc, mais ça j’y peux rien, je n’arrive pas à écrire des chansons joyeuses. En plus, les chansons que je préfère sont les chansons tristes.

A partir du moment où c’est ce que je sais le mieux faire et c’est ce qui me touche le plus naturellement je vais vers ce truc là quand j’écris des chansons. Après dans la vie de tous les jours je ne pense pas que je sois un triste sir, je pense que je m’amuse avec mes amis, que je trouve qu’il y a  plein de trucs joyeux qui m’arrivent.
Gainsbourg avait une phrase très belle pour ça, il disait « quand on prend une photo de ciel bleu, c’est beau ça fait un monochrome bleu, mais il ne se passe rien. A partir du moment où il y a des nuages qui commencent à arriver, des formes que ça bouge, là tout d’un coup il y a quelque chose qui se passe ». Peut-être que les chansons pour moi c’est pareil. Il faut qu’il y ait des tempêtes, de la tristesse.

Le dernier truc c’est que dans les chansons on exagère tout. Pour qu’une chanson m’émeuve il faut que ce soit un peu lyrique, donc que ça exacerbe les sentiments, les choses. Heureusement que je ne suis pas un poète maudit qui écrit avec son sang dans sa mansarde du 18ème. Quand la chanson est sentimentale j’aime bien que ce soit très premier degré, donc forcément c’est très exagéré, ou un peu en tout cas.

Vous avez fait beaucoup de musiques de film, est-ce similaire ou différent de la composition de son propre album?

Quand je fais un album c’est moi qui décide de tout, de ce que je fais, de ce que je veux, tout ça. Ce qui peut être une liberté assez angoissante.

Quand je fais une musique de film, j’en ai fait principalement avec Christophe Honoré, je dois répondre aux attentes d’un réalisateur, vous êtes donc dans un cadre, tout en gardant sa personnalité parce que si c’est pour faire de la musique de film comme tout le monde on s’en fout. La vraie différence elle est là.

Après moi je fais surtout les deux pour pas m’ennuyer. Si je ne faisais que de la chanson, pfff un album tous les deux ans, après une tournée et puis après voilà. Déjà je ne gagnerais pas ma vie et puis je trouverais ça très ennuyeux. Alors que là quand je suis stressé d’être tout seul responsable de mon projet, je fais une musique de film parce que c’est cool, j’ai un réalisateur qui est responsable, je suis un peu plus aux ordres quoi.
Et puis quand le réalisateur commence à me gonfler un peu parce qu’il me met la pression, parce que c’est lui le chef, ça m’énerve j’ai envie d’être le chef, je peux repartir vers mes chansons à moi.
Voilà c’est une façon de ne pas s’ennuyer et de d’avancer aussi.

Merci à D. Ghosarossian qui a mené l’entretien.

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